Du pourvoi par devant la Cour de cassation.
Selon l’article L. 421-1 du Code de l’organisation judiciaire :
« La Cour de cassation comprend des chambres civiles et une chambre criminelle. »
Et selon l’article L. 421-2 du même code :
« Les pourvois formés à l’encontre des arrêts et jugements rendus en dernier ressort en matière pénale sont portés devant la chambre criminelle dans les conditions prévues au code de procédure pénale. »
Seront donc successivement abordés le pourvoi en matière pénale, puis en matière civile.
En matière pénale.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation connaît des pourvois formés en matière pénale, y compris sur intérêts civils.
La procédure relative au pourvoi devant la Chambre criminelle ayant déjà été abordée en détail dans un précédent article, elle sera donc ici résumée de manière succincte.
Contrairement aux chambres civiles de la Cour de cassation, et contrairement au Conseil d’État, le demandeur au pourvoi en matière pénale a toujours la possibilité de se dispenser d’avocat, quelle que soit sa qualité (condamné, mis en examen, partie civile ...), et quel que soit le contentieux dont s’agit (affaire criminelle, correctionnelle ou contraventionnelle, application des peines, instruction ...).
À noter que le défendeur au pourvoi, quant à lui, n’est pas dispensé du ministère d’un avocat à la Cour de cassation [1].
Pour ce faire, le requérant doit, soit se rendre personnellement au greffe de la juridiction ayant rendu la décision contestée, soit mandater à cette fin un avocat près ladite juridiction, ou encore un fondé de pouvoir spécial. Si le requérant est détenu, il peut déclarer son pourvoi auprès de son chef d’établissement pénitentiaire [2].
Et ceci dans un délai de cinq jours francs à compter du prononcé de la décision attaquée, ou, dans certains cas, à compter de la signification de la décision [3].
Attention : ce délai n’est que de trois jours francs dans les cas prévus à l’article 568-1 du Code de procédure pénale.
Une fois le pourvoi déclaré, le requérant dispose d’un délai de dix jours [4] pour déposer un mémoire, dit "personnel", signé par lui, contenant ses moyens de cassation, en mains propres au greffe de la même juridiction, selon l’article 584 du Code de procédure pénale.
Le requérant peut rédiger lui-même son mémoire personnel, ou le faire rédiger par un tiers de son choix, tel un juriste auto-entrepreneur.
La méthodologie de la rédaction du mémoire personnel a elle aussi été abordée dans le détail ici. [5]
Dans certaines situations, le mémoire personnel peut aussi être envoyé directement au greffe de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, en trois exemplaires, jusqu’à un mois suivant sa déclaration de pourvoi [6].
Ces situations sont lorsque :
- en toute matière, le demandeur est condamné pénalement par la décision attaquée, et non dispensé de peine [7] ;
- en matière de presse, le demandeur est condamné pénalement ou civilement par la décision attaquée, ou est partie civile [8] ;
- le demandeur conteste une ordonnance de mise en accusation ou de renvoi devant le tribunal correctionnel [9] ;
- le demandeur conteste une décision relative à sa détention provisoire [10].
Attention : la demande d’aide juridictionnelle, en matière pénale, n’interrompt ni le délai pour déclarer son pourvoi au greffe, ni le(s) délai(s) pour déposer un mémoire personnel.
Pour cette raison, le dépôt d’un mémoire personnel est absolument indispensable pour sécuriser la procédure et éviter de se retrouver démuni et hors délai en cas de rejet de la demande d’aide juridictionnelle.
Enfin, le requérant peut, en tout état de cause, mandater un avocat à la Cour de cassation, lequel déposera un mémoire, dit "ampliatif".
Le mémoire personnel peut parfaitement se cumuler avec un mémoire ampliatif : c’est même vivement conseillé, avec ainsi deux cerveaux pour plancher sur un même dossier.
Si le requérant souhaite être représenté par un avocat à la Cour de cassation, ce dernier doit en principe se constituer dans le mois suivant la déclaration de pourvoi, selon l’article 585-1 du Code de procédure pénale.
Ce délai est interrompu en cas de dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle, sauf dans les cas où la loi impose à la Cour de cassation de statuer dans un délai déterminé (Crim 6 septembre 2023 n° 22-86.049).
C’est dire si - décidément - le dépôt d’un mémoire personnel est indispensable.
En matière civile.
Contrairement à la matière pénale, le pourvoi en cassation en matière civile est subordonné au ministère d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, « sauf disposition contraire », aux termes de l’article 973 du Code de procédure civile, en demande comme en défense.
À ce jour, la seule disposition contraire existante concerne le contentieux électoral, au sein duquel le requérant - mais aussi le défendeur - peut rédiger lui-même son propre recours (ou son propre mémoire en défense), ou le faire rédiger par un tiers de son choix, tel un juriste auto-entrepreneur [11].
Pour tous les autres contentieux en matière civile, le requérant - comme le défendeur - doit donc mandater un avocat à la Cour de cassation, impérativement, ceci dans un délai de deux mois, « sauf disposition contraire » une fois encore, selon l’article 612 du même code.
À noter cependant qu’en matière civile, contrairement à la matière pénale, ce délai est bel et bien interrompu par un éventuel dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle [12].
En matière électorale, la procédure à suivre est édictée à l’article 996 du Code de procédure civile, en ce qui concerne le contentieux des inscriptions sur les listes électorales en matière d’élections politiques. Cet article reprend in extenso les articles R. 19-1 et suivants du Code électoral.
Le pourvoi doit donc être formé « dans les dix jours suivant la notification de la décision du tribunal judiciaire », selon l’article R. 19-1 du Code électoral.
Quant au formalisme, l’article R. 19-2 du même code dispose :
« Le pourvoi est formé par une déclaration orale ou écrite que la partie ou tout mandataire muni d’un pouvoir spécial fait, remet ou adresse par pli recommandé soit au greffe du tribunal judiciaire qui a rendu la décision attaquée, soit au greffe de la Cour de cassation.
La déclaration indique les nom, prénoms et adresse du demandeur au pourvoi, ainsi que, s’il y a lieu, les nom, prénoms et adresse du ou des défendeurs au pourvoi.
A peine d’irrecevabilité du pourvoi, prononcée d’office, la déclaration doit contenir un énoncé des moyens de cassation invoqués et être accompagnée d’une copie de la décision attaquée. »
Et en ce qui concerne le contentieux des élections professionnelles, la procédure, édictée aux articles 999 et suivants du Code de procédure civile, est analogue à ce qui précède, à quelques détails près.
L’article 999 du Code de procédure civile dispose :
« Le délai de pourvoi en cassation est de dix jours sauf disposition contraire.
Le pourvoi est formé par déclaration orale ou écrite que la partie, ou tout mandataire muni d’un pouvoir spécial, fait, remet ou adresse par pli recommandé au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée. »
Et l’article 1000 du même code dispose :
« Outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et par le troisième alinéa de l’article 57, la déclaration désigne la décision attaquée. »
Le requérant veillera donc à vérifier qu’aucune disposition ne vient déroger au délai de dix jours pour former son pourvoi, et veillera en outre à respecter les formes prescrites, parmi lesquelles les mentions obligatoires susvisées, en fonction du contentieux dont s’agit.
Mais surtout, le contentieux des élections professionnelles, contrairement au contentieux des inscriptions sur les listes électorales, autorise le demandeur au pourvoi à faire valoir ses moyens de cassation au sein d’un mémoire séparé de sa déclaration de pourvoi, et ceci « au plus tard dans un délai d’un mois à compter de la déclaration » de pourvoi, ainsi qu’il est dit à l’article 1004 du Code de procédure civile.
L’article 1005 du même code donne obligation au demandeur, « à peine d’irrecevabilité prononcée d’office », d’en « notifier, dans le mois de la déclaration, copie au défendeur par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ».
Le défendeur peut alors à son tour déposer un mémoire, en respectant les formalités édictées à l’article 1006 dudit code qui dispose :
« Le défendeur au pourvoi dispose d’un délai de quinze jours à compter de la notification du mémoire du demandeur ou de l’expiration du délai d’un mois prévu à l’article 1004 pour remettre contre récépissé, ou adresser par lettre recommandée, au greffe de la Cour de cassation un mémoire en réponse.
Dans le même délai, il notifie au demandeur, par lettre recommandée, une copie du mémoire en réponse. »
Si la partie adverse constitue avocat à la Cour de cassation, les notifications peuvent se faire auprès de cet avocat, dixit l’article 1007 du même ouvrage.
Enfin, et plus généralement, aucune disposition ne semble faire obstacle à ce que, à chaque fois que le contentieux est dispensé du ministère d’un avocat à la Cour de cassation, le requérant - ou même le défendeur - puisse cumuler le dépôt de son propre mémoire, avec celui déposé par un avocat à la Cour de cassation, comme en matière pénale.
Ainsi, deux cerveaux peuvent plancher sur un même dossier afin de maximiser les chances d’obtenir gain de cause.
Du pourvoi par devant le Conseil d’État.
La section du contentieux du Conseil d’État constitue la juridiction de cassation compétente en matière administrative [13].
Les décisions qui y sont déférées sont celles rendues par les cours administratives d’appel, les tribunaux administratifs statuant en premier et dernier ressort, et les juridictions administratives spécialisées statuant en dernier ressort.
Le délai pour former un pourvoi est de deux mois, « sauf disposition contraire », selon l’article R. 821-1 du Code de justice administrative, lequel précise en outre que « le défaut de mention dans la notification de la décision d’un délai de recours en cassation inférieur à deux mois emporte application du délai de deux mois ». L’on rappellera, en outre, que ce délai est interrompu en cas de dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle [14].
Il a pour point de départ « la notification » ou « la publication » de la décision attaquée, selon l’article R. 421-1 du Code de justice administrative [15].
À l’instar de la procédure devant les chambres civiles de la Cour de cassation, le pourvoi en cassation devant le Conseil d’État, en principe, doit obligatoirement y être formé par l’intermédiaire d’un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, aux termes de l’article R. 821-3 du Code de justice administrative.
Le même article prévoit une exception, à savoir les pourvois « dirigés contre les décisions des juridictions de pension ».
Une seconde exception est prévue par un autre texte, l’article 16, VII, du décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018, lorsque le pourvoi est formé à l’encontre d’une décision de la commission centrale d’aide sociale.
Lorsque le requérant se situe dans l’une ou l’autre de ces deux hypothèses dérogatoires, il peut donc se dispenser d’avocat, et rédiger lui-même son propre recours en cassation, ou le faire rédiger par un juriste, ou un tiers de son choix.
En ce qui concerne l’introduction du pourvoi, l’article R. 821-6 du Code de justice administrative dispose :
« Sauf dispositions contraires prévues par le présent titre, l’introduction du pourvoi en cassation suit les règles relatives à l’introduction de l’instance devant le Conseil d’État définies au livre IV.
Sont de même applicables les dispositions des livres VI et VII. »
Les règles dont s’agit sont celles relatives à la saisine du tribunal administratif.
Ce thème a déjà été abordé en détail dans un précédent article, auquel le lecteur est invité à se reporter.
Le requérant doit ainsi saisir le Conseil d’État, soit en envoyant sa requête signée de sa main, et ses pièces jointes [16], en double exemplaire au format papier au greffe du Conseil d’État, soit utiliser la plateforme en ligne "Télérecours" - la deuxième option étant clairement celle à privilégier, la plus pratique et la moins couteuse en termes de diligence. La première option, au contraire, n’a d’intérêt que pour les requérants non familiers de l’outil informatique [17].
Il doit y rappeler les faits et la procédure, et y présenter ses moyens de cassation, similairement aux requêtes introductives de première instance et d’appel [18].
Enfin, à l’instar de la procédure devant la Cour de cassation, aucune disposition ne semble faire obstacle à ce que, devant le Conseil d’État, à chaque fois que le contentieux est dispensé du ministère d’un avocat, le requérant puisse cumuler le dépôt de son propre mémoire, avec celui déposé par un avocat au Conseil d’État.
Ainsi, deux cerveaux peuvent plancher sur un même dossier afin de maximiser les chances d’obtenir gain de cause.
À noter, également, qu’aucune disposition n’interdit textuellement au défendeur au pourvoi de se dispenser d’avocat pour faire valoir ses observations en défense, y compris au sein des contentieux pour lesquels le demandeur y est quant à lui subordonné, par l’article R. 821-3, précité, du Code de justice administrative.