Pourquoi choisir de mettre en place le forfait jours ?
Le forfait-jours est un choix judicieux dans les entreprises relevant de la convention Syntec-Cinov (dite également BETIC) pour un certain nombre de profils de salariés autonomes dans la gestion de leur emploi du temps.
Côté employeur, ce dispositif permet d’optimiser la gestion des coûts salariaux en supprimant le décompte des heures supplémentaires. Il simplifie également les processus RH grâce à un suivi allégé des temps travaillés.
Côté salarié, le forfait-jours offre des avantages clairs : une rémunération plus élevée grâce aux majorations prévues par la convention, une organisation flexible du temps de travail, et des jours de repos supplémentaires. Par exemple, pour un forfait de 218 jours, l’année 2025 inclut 8 jours de repos.
Les étapes à suivre.
Étape 1 : vérifier si vous remplissez les règles conventionnelles.
La convention Syntec-Cinov prévoit un dispositif spécifique pour le forfait jours : la modalité 3 appelée réalisation de mission avec autonomie complète.
L’accès au forfait-jours est ainsi réservé aux salariés qui remplissent les conditions suivantes :
- Disposer d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés.
A noter : cette condition est prévue par l’article L3121-58 du Code du travail et il ne peut y être dérogé. - Occuper un poste de Cadre avec une classification a minima de 2.3 de la grille conventionnelle.
A noter : les ETAM et Cadres juniors sont exclus du dispositif, à moins qu’ils ne perçoivent une rémunération annuelle supérieure à 2 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), soit 96 192€ en 2025 ; ou qu’ils soient mandataires sociaux. - Percevoir un salaire au moins équivalent au salaire minimum conventionnel, avec une majoration de 22% pour la position 2.3 et de 20% pour les positions supérieures (3.1, 3.2 et 3.3).
A noter : le salaire pris en compte pour apprécier la condition de majoration est uniquement le salaire fixe de base. Les éléments de rémunération variable, les primes et autres rémunérations exceptionnelles ne sont pas prises en compte.
Si vous êtes en mesure de respecter ces conditions pour l’ensemble des salariés susceptibles de basculer sur le dispositif du forfait-jours, vous pouvez passer directement à l’étape 3 : signer une convention individuelle de forfait. A défaut, l’étape 2 s’impose.
Étape 2 : conclure un accord d’entreprise si nécessaire.
Lorsque la convention Syntec-Cinov ne répond pas entièrement aux besoins spécifiques de l’entreprise, il est possible de négocier un accord d’entreprise dérogatoire permettant d’ajuster les modalités du forfait-jours tout en respectant les principes légaux et conventionnels.
Les principaux points de négociation peuvent inclure les sujets suivants.
- Le profil et la classification des salariés éligibles au forfait-jours : il est envisageable d’élargir l’éligibilité à d’autres classifications, à condition que les salariés concernés disposent d’une réelle autonomie dans la gestion de leur emploi du temps.
Il est en effet impossible de déroger à la condition d’autonomie imposée par l’article L3121-58 du Code du travail. - Les avantages spécifiques accordés aux salariés : par exemple, réduire le nombre de jours travaillés (passer de 218 à 216 jours pour augmenter les jours de repos) ou fixer une majoration salariale unique et adaptée (par exemple 18% pour toutes les positions concernées).
- L’adaptation des mesures d’accompagnement obligatoires : cela peut inclure l’organisation de l’entretien annuel, des ajustements du dispositif d’alerte en cas de surcharge de travail, ou encore des mesures pour renforcer le droit à la déconnexion.
Modalités de conclusion d’un accord d’entreprise :
La procédure de conclusion dépend de la taille de l’entreprise et de sa structuration sociale :
- Dans les entreprises de moins de 20 salariés, sans Comité Social et Économique (CSE), l’accord peut être négocié directement avec les salariés, dans le cadre d’un référendum d’entreprise.
- Dans les entreprises de moins de 50 salariés, qui disposent d’un CSE, l’accord peut être négocié directement avec les élus titulaires, sans référendum.
- Dans les entreprises de plus de 50 salariés, les options sont plus nombreuses et l’accord ne pourra être négocié directement avec les élus du CSE que sous certaines conditions (absence de participation syndicale notamment) et devra dans certains cas être complété par un référendum.
Étape 3 : faire signer une convention individuelle de forfait jours.
La mise en place du forfait jours repose sur une étape cruciale pour la validité du dispositif : la signature d’une convention individuelle écrite entre le salarié et l’employeur.
Deux moments sont possibles pour formaliser cette convention :
- Lors de l’embauche : une clause spécifique doit être intégrée directement dans le contrat de travail.
- En cours de contrat : un avenant au contrat de travail doit être signé pour introduire le forfait-jours. L’avenant doit inclure les mêmes informations que la clause initiale.
Les informations à faire figurer dans la convention individuelle de forfait jours sont les suivantes :
- La période de référence du forfait (généralement l’année civile) ;
- Le nombre maximal de jours travaillés sur la période (218 jours maximum, incluant la journée de solidarité) ;
- Les modalités de suivi des jours travaillés et des jours de repos ;
- Le régime de repos compensateur, précisant les jours de repos prévus et leur modalité d’attribution ;
- Les modalités de contrôle de la charge de travail et les procédures en cas de dépassement ou de surcharge constatée ;
- La rémunération applicable, incluant les majorations liées au forfait jours ;
- L’organisation de l’entretien annuel de suivi ;
- Les dispositifs assurant le droit à la déconnexion.
Étape 4 : assurer le suivi du dispositif.
Une fois la convention individuelle mise en place, l’employeur doit mettre en œuvre un suivi rigoureux pour garantir la conformité du forfait-jours.
1. Suivi des jours travaillés et des repos.
L’employeur doit s’assurer que le nombre de jours travaillés par le salarié ne dépasse pas la limite convenue. Cela passe par :
- La tenue d’un document de suivi, mis à jour par le salarié, indiquant les jours travaillés et les jours de repos.
- Une validation régulière par le manager afin de contrôler les éventuelles anomalies.
- La conservation des documents pendant une durée de 3 ans, pour présentation en cas de contrôle par l’inspection du travail.
2. Organisation de l’entretien annuel de suivi.
L’employeur a désormais l’obligation d’organiser un entretien annuel avec le salarié (deux entretiens annuels étaient obligatoires jusqu’au 1ᵉʳ juillet 2024.). Cet entretien doit aborder les sujets suivants :
- la charge de travail du salarié ;
- l’articulation entre vie professionnelle et vie personnelle ;
- le contrôle du respect des jours de repos ;
- l’identification des difficultés éventuelles liées à l’organisation du travail et la proposition d’ajustements si nécessaire.
3. Prévention de la surcharge de travail.
L’employeur doit mettre en place des procédures d’alerte permettant de détecter rapidement une surcharge de travail. Cela peut inclure :
- Un signalement par le salarié en cas de difficulté à respecter les temps de repos.
- Une évaluation régulière de la charge de travail par les managers.
- Des actions correctives, comme la réorganisation des tâches.
4. Respect du droit à la déconnexion.
L’employeur doit veiller à la mise en place effective du droit à la déconnexion afin de garantir l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Cela implique :
- Définir des plages horaires de déconnexion (soirées, week-ends, périodes de repos).
- Sensibiliser les managers et salariés aux bonnes pratiques en matière d’usage des outils numériques.
- Utiliser des outils techniques (par exemple, blocage des messageries en dehors des heures travaillées).
Étape 5 : vérifier la conformité juridique et adapter le dispositif si nécessaire.
L’employeur doit régulièrement auditer la mise en place du forfait-jours pour s’assurer de sa conformité aux exigences légales et conventionnelles :
- Contrôler les documents de suivi pour garantir qu’aucun dépassement des jours travaillés n’a eu lieu.
- Revoir les entretiens annuels pour vérifier que les ajustements nécessaires sont effectués.
- Évaluer les retours des salariés concernant leur charge de travail et leur équilibre vie pro/vie perso.
- Adapter l’organisation du travail si des écarts ou des anomalies sont identifiés.
En cas d’évolutions législatives ou conventionnelles, et elles sont assez régulières sur le sujet, il faudra s’assurer que les documents de support (conventions individuelles, supports d’entretien, procédures d’alerte et de suivi de la charge de travail, etc.) restent conformes et informer le cas échéant les salariés concernés.