Expertise judiciaire : transmission électronique entre l’expert, la juridiction, les avocats et les parties.

Par Quentin Daëls, Avocat.

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Explorer : # communication électronique # expertise judiciaire # sécurité des échanges # dématérialisation

Si les transmissions entre l’expert et les avocats sous format papier - courrier simple, courrier recommandé avec avis de réception et télécopie - ne posent pas de difficulté, il n’en est pas de même lorsque les transmissions sont effectuées par voie électronique.

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Lorsque l’on évoque la procédure d’expertise judicaire, le premier réflexe est de se référer aux articles 275 et 276 du Code de procédure civile.

En effet, au même titre que les articles 11 et 16 du Code de procédure civile fixent les rapports entre le juge et les parties, les articles 275 et 276 du Code de procédure civile fixent les rapports entre l’expert judiciaire et les parties.

L’expert judiciaire – qui tient sa mission du Tribunal – doit donc avant toute chose respecter et faire respecter le principe de la contradiction.

Ce principe implique notamment que les parties doivent pouvoir présenter leurs observations et leurs pièces tout au long de la mesure d’instruction et avoir la possibilité de formuler leurs observations et éventuelles critiques à l’expert judiciaire de manière contradictoire.

Si les transmissions entre l’expert et les avocats sous format papier - courrier simple, courrier recommandé avec avis de réception et télécopie - ne posent pas de difficulté, il n’en est pas de même lorsque les transmissions sont effectuées par voie électronique.

En effet, il convient de ne pas oublier que la transmission des observations et la communication des éléments soumis à l’expert judiciaire par voie électronique doivent être effectuées au moyen de procédés techniques particuliers – trop souvent si ce n’est pas toujours – méconnus de l’expert judiciaire, des avocats et des conseils techniques qui participent aux opérations d’expertise.

Pourtant, le non-respect des dispositions des articles 748-1 et suivants du Code de procédure civile - par l’expert ou les parties - pourrait parfaitement justifier une demande en nullité du rapport d’expertise judiciaire.

Communication électronique : accord préalable de toutes les parties et prohibition des messageries électroniques qui ne sont pas sécurises.

Aux termes de l’article 748-1 du Code de procédure civile, en vigueur depuis le 1er janvier 2011 :
« Les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles peuvent être effectués par voie électronique dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent titre, sans préjudice des dispositions spéciales imposant l’usage de ce mode de communication. »

Les convocations, les procès-verbaux de réunion d’expertise judiciaire, les rapports d’expertise judiciaire mais également les pièces peuvent être adressés aux parties par voie électronique à la condition de respecter les modalités fixées par les articles 748-2 et suivants du Code de procédure civile.

Il est notamment nécessaire :

  • d’une part, que toutes les parties aient expressément consenti à l’utilisation de la voie électronique : Article 748-2 du Code de procédure civile, et
  • d’autre part, que les procédés techniques utilisés garantissent la fiabilité de l’identification des parties à la communication électronique, l’intégrité des documents adressés, la sécurité et la confidentialité des échanges, la conservation des transmissions opérées et permettent d’établir de manière certaine la date d’envoi et celle de la réception par le destinataire : Article 748-6 du Code de procédure civile.

En d’autres termes, la communication par courrier électronique « classique » des convocations, procès-verbaux de réunion d’expertise judiciaire, rapports d’expertise judiciaire mais également des observations et des pièces n’est pas possible.

C’est d’ailleurs ce qui avait été rappelé par le C.N.B pour les avocats et C.N.C.E.J pour les experts judiciaires dans l’édition de mai 2011 des bonnes pratiques des avocats et des experts :
« La communication à l’expert ne pourra être faite que sous la forme papier ou sous forme numérique sécurisé, avec en ce cas accord unanime des parties. »

En réalité, la seule communication possible par voie électronique est la communication entre avocats des pièces et des observations techniques par l’intermédiaire du RPVA - Réseau Privé Virtuel des Avocats - ou au moyen de la plateforme OPALEXE entre les avocats et l’expert judiciaire.

Plateforme OPALEXE : l’arrêté du 14 juin 2017 valide la solution technique retenue pour les communications électroniques dans le cadre de l’expertise judiciaire

Parfaitement conscient des limites posées par les dispositions des articles 748-1 et suivants du Code de procédure civile pour les communications par voie électronique, le C.N.C.E.J a conduit - dès 2011 - un projet tendant à garantir la dématérialisation de l’expertise judiciaire, l’identification de l’expert et l’authentification des procédures.

Ce projet consistait à faire évoluer la plateforme OPALEXE - utilisée par un nombre restreint d’experts - pour qu’elle intègre l’identification des experts et des documents qu’ils émettent au moyen d’un système de signature électronique.

Afin de développer OPALEXE, le C.N.B et le C.N.C.E.J se sont rapprochés et ont signé le 15 juin 2016 à Paris un protocole d’accord sur la dématérialisation de l’expertise judiciaire.

L’objectif était d’intégrer la plateforme OPALEXE au RPVA et de permettre les échanges entre le RPVE - Réseau Privé Virtuel des Experts - et le RPVA.

Dans cette continuité, l’arrêté du 14 juin 2017 portant application des dispositions du titre XXI du livre 1er du code de procédure civile aux experts judiciaires a instauré le cadre réglementaire définissant les modalités selon lesquelles il est possible de dématérialiser et de sécuriser la communication de l’expertise judiciaire civile.

En réalité, l’arrêté du 14 juin 2017 a validé la solution technique retenue par la plateforme OPALEXE, de telle sorte que plus rien ne s’oppose au déploiement de la plateforme OPALEXE à toute la France et à toutes les expertises judiciaires et notamment aux expertises automobiles.

Si la plateforme OPALEXE est une révolution pour les avocats qui suivent un nombre important d’expertises judiciaires, la question de la maitrise de cette plateforme peut se poser pour des avocats qui assistent - occasionnellement - un client lors d’une expertise judiciaire ou pour des parties qui ne sont assistées ni par un conseil technique ni par un avocat.

Quentin DAËLS
Avocat
www.qd-avocat.fr

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  • par Gavard , Le 27 juillet 2019 à 09:12

    Bonjour , l expert a t il l obligation d envoyer son rapport a l adresse des demandeurs ...peux t on dire que la procedure n est pas respecter si le demandeur n a pas recu le pre rapport et le rapport definitif a son adresse personnel...merci pour votr aide

  • La suite d’une procédure est-elle légale quand un expert l’a écourtée malgré 75 pièces essentielles preuves d’un recel non remises au mépris des articles 275 et 276 duNCPC . A la base il s’agissait d’une succession non réglée dans les normes par le crédit lyonnais : pas de demande de notoriété après-décès , virement sans ordre à l’origine d’une assurance-vie 20 fois supérieure (100.000 F par abus de faiblesse pour 5.000 F souscrite et signée par l’héritière au lieu et place du père (elle s’est approprié les comptes et les retraites confortables du père pendant 33 mois) par transformation des intitulés de comptes-joints entre époux en comptes joints père et fille sans partage.Des pièces ainsi que des jurisprudences ont été écartées, une somme minime dix fois inférieure au montant détourné par la petite fille a été indiquée par le conseil pour ne pas l’appeler en la cause.
    Feue l’héritière et soeur de mon époux a seule été condamnée et sa fille fonctionnaire de police prétend ne pas pouvoir payer la totalité somme minimisée sans tenir compte de la réserve héréditaire sachant qu’elles ont ouvert des comptes d’épargne dès le 1er décès 33 mois avant celui de l’époux dépouillé, notre conseil n’a pas demandé l’anatocisme.
    Un requête en rectification d’erreur matérielle était en contradiction de motifs et la grosse émargée nous a été remise 18 mois plus tard, notre conseil s’est retiré, personne n’a souhaité la signifier. seul l’arrêt précédant la requête a été signifié à l’héritière décédée, par contre la requête avec la grosse l’a été à son époux sa fille a tenté d’organiser son insolvabilité.
    L’homologation est-elle logique (un état liquidatif est erroné notaire nommé en 2013 au lieu de 2000 sans vérification (chose jugée !!!!) pour le rapport de la mère et épouse et doivent-ils effectuer le rapport, ou est-il préférable d’assigner la petite fille fonctionnaire de police pour détournements : détournements supérieurs à ceux de la mère, frère de feue l’héritière condamnée déshérité par celle-ci (spolié puis lésé). Faut-il le faire au pénal pour être sûr du paiement et d’obtenir des indemnités pour les divers dysfonctionnements alors qu’il y avait eu tentative d’accord amiable refusée au départ ?

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