Cette double cassation n’est pas surprenante au vu de la jurisprudence applicable aux cautionnements antérieurs au 1er janvier 2022 [1].
En effet, dans cette affaire, une banque a consenti un prêt immobilier à une SCI, garanti par le cautionnement solidaire d’une caution professionnelle et d’une caution personne physique dans la limite de la somme de 385,8k€.
A la suite de la défaillance de la SCI dans le remboursement de ce prêt, la banque a prononcé la déchéance du terme.
Après avoir payé le solde du prêt à la banque, la caution professionnelle a assigné la SCI et la caution personne physique en remboursement, lesquelles ont appelé la banque en intervention forcée et garantie, en invoquant une disproportion de l’engagement de caution et un manquement de celle-ci à son devoir de mise en garde.
Les juges d’appel ont condamné la caution à payer solidairement avec la SCI 303,5K€ à la caution professionnelle.
Pour sa part, la banque a été condamnée à payer la même somme à la caution pour manquement à son devoir de mise en garde.
La banque s’est alors pourvue en cassation et la caution a formé un pourvoi incident.
1- Sur le pourvoi incident de la caution et la proportionnalité de l’engagement :
Sur le premier moyen de cassation, la Cour rappelle au visa des articles L332-1 du Code de la consommation et 2310 du Code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance du 15 septembre 2021, que :
« [...] La sanction prévue au premier de ces textes prive le contrat de cautionnement d’effet à l’égard tant du créancier que des cofidéjusseurs lorsque, ayant acquitté la dette, ils exercent leur action récursoire, que ce soit sur le fondement de leur recours subrogatoire personnel.
Et pour condamner la caution à payer à la caution professionnelle les sommes qu’elle a acquittées, l’arrêt retient que celle-ci ne peut se voir opposer les exceptions opposables au créancier principal, comme la disproportion de l’engagement de la caution.
Par conséquent, en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».
2- Sur le pourvoi principal de la banque et le devoir de mise en garde :
Sur le deuxième moyen de cassation, la Cour de cassation, après avoir rappelé qu’en application des dispositions de l’article 1147 du Code civil, dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, « la banque est tenue à un devoir de mise en garde à l’égard d’une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n’est pas adapté aux capacités financières de la caution ou s’il existe un risque de l’endettement né de l’octroi du prêt garanti, lequel résulte de l’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur », elle ajoute puis rappelle que :
« Les parts sociales dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée font partie du patrimoine devant être pris en considération pour l’appréciation de ses capacités financières au jour de son engagement [...].
Par conséquent, en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la caution n’était pas également titulaire de 99% des parts de la SCI cautionnée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
Pour rappel, cette double cassation n’est guère surprenante au vu de la jurisprudence applicable aux cautionnements antérieurs au 1er janvier 2022.
Par contre, s’agissant des cautionnements souscrits postérieurement, il est nécessaire de rappeler qu’en vertu de l’ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés, et en application de l’article 2300 (nouveau) du Code civil, la disproportion ne prive plus d’effet le cautionnement mais elle est sanctionnée par une réduction de ce dernier au montant à hauteur duquel la caution pouvait s’enger à cette date.