Discipline des avocats : la nouvelle procédure après le décret du 30 juin 2022.

Par Frédéric Chhum, Avocat et Sarah Bousbacher, Juriste.

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La réforme de la procédure disciplinaire des avocats par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire et le décret du 30 juin 2022 est une révolution sur certains aspects.
Avocats et magistrats vont devoir s’approprier ces nouveaux textes.

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En effet, la juridiction disciplinaire (ancien conseil de discipline) ne sera plus seulement composée d’avocats mais elle pourra, dans certains cas, être présidée par un magistrat du siège de la cour d’appel, en activité ou honoraire (art. 22-3 de la loi du 31 décembre 1971).

Symétriquement, deux avocats membres du conseil de l’ordre siègeront devant la Cour d’appel pour statuer sur les appels des décisions de la juridiction disciplinaire (art. 197 modifié du décret du 27 novembre 1991).

La réforme veut aussi donner plus de droit à la partie plaignante : le plaignant pourra saisir le procureur général ou bien directement la juridiction disciplinaire, en l’absence de conciliation ou de poursuite disciplinaire après information des suites de la réclamation par le bâtonnier, tandis que les différends opposant les avocats restent soumis à l’arbitrage du bâtonnier, sa décision pouvant par la suite être déférée à la cour d’appel.

Le décret du 30 juin 2022 consacre une nouvelle peine complémentaire d’interdiction de conclure un nouveau contrat de collaboration avec un avocat ou un nouveau contrat de stage avec un élève-avocat, et d’encadrer un nouvel avocat collaborateur ou un nouvel élève-avocat, pour une durée maximale de trois ans et cinq ans en cas de récidive.

La juridiction disciplinaire pourra également prescrire à l’avocat poursuivi une formation complémentaire en déontologie.

La discipline des avocats est régie par la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat.

La loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire a apporté de nombreuses modifications portant sur la déontologie et la discipline des professions du droit.

Les articles 8 à 27 du décret n°2022-965 du 30 juin 2022 modifient le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 et réforment la procédure disciplinaire des avocats.

Au total, les conseils de disciplines ont été saisis à 177 reprises en 2019 et 124 reprises en 2018. Ils ont rendu 116 décisions en 2019 et 100 en 2018 (cf exposé des motifs du projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire).

La discipline des avocats est réglementée par le règlement intérieur national de la profession d’avocat, élaboré par le conseil national des barreaux (CNB), qui contient notamment les principes de la profession et le code de déontologie des avocats européens.

A Paris, le Barreau de Paris possède un code de déontologie, appelé le règlement intérieur du Barreau de Paris (RIBP).

Nous traiterons successivement :
- de la répartition des affaires et l’élection du président du conseil de discipline (1) ;
- des sanctions disciplinaires (art. 184 du décret du 27 novembre 1991) (2) ;
- de la procédure devant la juridiction disciplinaire (3) ;
- de la saisine de la juridiction disciplinaire et de l’instruction des requêtes (Articles 188 à 192) (4) ;
- du jugement disciplinaire (5) ;
- du recours devant la cour d’appel (6).

1) Répartition des affaires et élection du président du conseil de discipline.

1.1) Répartition des affaires entre les formations par le bâtonnier doyen (art. 181 du décret du 27 novembre 1991).

L’article 8 du décret n°2022-965 du 30 juin 2022 modifie l’article 181 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.

Le décret du 30 juin 2022 modifie l’article 181 alinéa 2 du décret 27 novembre 1991 qui dispose désormais que « Le président du conseil de discipline, et, à Paris, le bâtonnier doyen, membre du conseil de l’ordre, et s’il est empêché, le plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l’ordre, répartit les affaires entre les formations ».

Ce n’est plus le président des formations disciplinaires qui répartit les affaires mais le bâtonnier doyen, membre du conseil de l’ordre ou s’il est empêché, le plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l’ordre.

1.2) Election du président du conseil de discipline (art. 182 du décret du 27 novembre 1991).

Aussi, le décret n° 2022-965 du 30 juin 2022 apporte une modification d’apparence mineure quant au mode d’élection du président du conseil de discipline.

Le conseil de discipline établit le règlement intérieur, fixe le nombre et la composition des formations et élit son président.

Il en informe le procureur général dans un délai de huit jours (art. 182 modifié du décret du 27 novembre 1991).
Cette modification quasi-orthographique souligne en fait l’importance accordée au président du conseil de discipline.

Ces dispositions s’appliquent aux procédures disciplinaires engagés et aux réclamations reçues postérieurement à la publication dudit décret (art. 28 décret du 30 juin 2022).

2) Les sanctions disciplinaires.

2.1) Peines disciplinaires (art. 184 du décret du 27 novembre 1991).

L’article 10 du décret n°2022-965 du 30 juin 2022 modifie l’article 184 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, qui porte sur la nature des sanctions disciplinaires applicables aux avocats.

En effet, tandis que la nature des peines est conservée, à savoir l’avertissement, le blâme, l’interdiction temporaire d’exercice ainsi que la radiation du tableau des avocats.

2.2) Une nouvelle peine complémentaire : interdiction temporaire, et ce quel que soit le mode d’exercice, de conclure un nouveau contrat de collaboration ou un nouveau contrat de stage avec un élève-avocat (art. 184 III 2° du décret du 27 novembre 1991.)

Le décret du 30 juin 2022 crée une nouvelle peine complémentaire, à savoir l’interdiction temporaire, et ce quel que soit le mode d’exercice, de conclure un nouveau contrat de collaboration ou un nouveau contrat de stage avec un élève-avocat, et d’encadrer un nouveau collaborateur ou un nouvel élève-avocat, pour une durée maximale de trois ans, ou en cas de récidive une durée maximale de cinq ans (art 184 III 2° modifié du décret du 27 novembre 1991).

Cette peine complémentaire été réclamée et votée par l’AG du CNB le 4 février 2022. (Voir réforme de la discipline : pas de collaborateurs pour les avocats harceleurs gazette du palais 8 février 2022)

Lors de sa séance du 1er février 2022, le conseil de l’ordre des avocats de Paris avait voté contre cette proposition.

2.3) Privation du droit de faire partie du conseil de l’ordre ou du CNB (art. 184 III 1° du décret du 27 novembre 1991).

Par ailleurs, subsistent également comme peines complémentaire « La privation du droit de faire partie du conseil de l’ordre, du Conseil national des barreaux, des autres organismes ou conseils professionnels ainsi que des fonctions de bâtonnier pendant une durée n’excédant pas dix ans ».

2.4) Publicité (art. 184 II du décret du 27 novembre 1991).

De plus, la juridiction disciplinaire peut, à titre de peine complémentaire ordonner la publicité du dispositif et de tout ou partie des motifs de sa décision, dans le respect de l’anonymat des tiers. La juridiction fixe les modalités de cette publicité, notamment sa durée (art 184 II modifié du décret du 27 novembre 1991).

2.5) Sursis possible pour l’interdiction temporaire d’exercice (art. 184 IV du décret du 27 novembre 1991) .

En outre, L’interdiction temporaire d’exercice peut être assortie en tout ou partie du sursis pour son exécution. Le sursis ne s’étend pas aux peines complémentaires éventuelles (art 184 IV modifié du décret du 27 novembre 1991).
Une autre grande nouveauté que consacre le décret du 30 juin 2022 tient en l’insertion, d’une obligation de formation en déontologie.

2.6) L’obligation de formation complémentaire en déontologie (art. 184 V du décret du 27 novembre 1991) .

C‘est une nouveauté introduite par le décret du 30 juin 2022.

La juridiction disciplinaire peut également prescrire à l’avocat poursuivi une formation complémentaire en déontologie dans le cadre de la formation continue, ne pouvant excéder 20 heures sur une période de deux ans maximum à compter du caractère définitif de la sanction prononcée. (art 184 V modifié du décret du 27 novembre 1991).

Tout comme, lorsque la juridiction disciplinaire retient l’existence d’une faute disciplinaire, elle peut ajourner le prononcé de la sanction en enjoignant à l’avocat poursuivi de cesser le comportement jugé fautif dans un délai n’excédant pas quatre mois (art 184 V nouveau du décret du 27 novembre 1991).

Encore une fois, ces dispositions s’appliquent aux procédures disciplinaires engagés et aux réclamations reçues postérieurement à la publication du décret du 30 juin 2022 (soit le 2 juillet 2022).

3) La procédure de la juridiction disciplinaire.

La loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire attribue le statut de juridiction au conseil de discipline établi dans le ressort de chaque cour d’appel.

3.1) Le traitement des réclamations.

3.1.1) Traitement et contenu des réclamations (art. 186-1 du décret du 27 novembre 1991)

L’article 11 du décret n°2022-965 du 30 juin 2022 insère un nouveau chapitre intitulé « chapitre II bis – Le traitement des réclamations » au décret n° 91-1197 du 27 novembre 2021.

Dès lors, le nouvel article 186-1 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 2021 vise à réglementer la forme et le contenu des réclamations formulées à l’encontre d’un avocat, pour e consacrer une nouvelle et vraie procédure offerte aux justiciables, afin, encore une fois, de renforcer, selon le législateur, la confiance dans l’institution judiciaire.

Toute réclamation formulée à l’encontre d’un avocat doit, au préalable, être adressée au bâtonnier.

Si elle émane d’une personne physique, la réclamation mentionne ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance.

Si elle émane d’une personne morale, la réclamation mentionne sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement.

Toute réclamation est datée et comporte les nom, prénoms et adresse de l’avocat mis en cause, et les faits à l’origine de la réclamation.

Elle est accompagnée de toute pièce utile à son examen. Elle porte la signature de son auteur.

Elle est adressée par tout moyen conférant date certaine à sa réception l’ordre (art 186-1 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

3.1.2) Instruction des réclamations (art. 186-2 du décret du 27 novembre 1991).

Quant à l’instruction des réclamations, c’est le bâtonnier qui devra les accuser sans délai « en indiquant à son auteur qu’il sera informé des suites qui lui seront données », conformément au nouvel article 186-2 du décret du 27 novembre 1991.

Lorsqu’il estime qu’une réclamation est abusive ou manifestement mal fondée, le bâtonnier en informe sans délai son auteur en lui indiquant qu’il n’entend pas y donner suite.

Lorsqu’une réclamation n’entre pas dans le champ de l’alinéa précédent, le bâtonnier en informe l’avocat mis en cause et l’invite à présenter ses observations (art 186-2 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

3.1.3) Conciliation (art. 186-3 du décret du 27 novembre 1991).

De même, le bâtonnier peut procéder à une conciliation entre les parties dans un délai de trois mois à compter de la réception de la réclamation formulée à l’encontre d’un avocat, selon le nouvel article 186-3, afin non seulement de faciliter le dialogue entre ces deux parties, mais aussi de désengorger la juridiction.

La conciliation se déroule selon les modalités fixées par le bâtonnier, sous l’autorité de ce dernier ou d’un avocat membre ou ancien membre du conseil de l’ordre, ou d’un avocat honoraire qu’il délègue. Le délégué du bâtonnier peut être un membre de la juridiction disciplinaire mais il ne peut siéger dans les affaires dans lesquelles il est intervenu au stade de la conciliation.

En cas de conciliation, un procès-verbal est établi. Le procès-verbal est signé par l’avocat mis en cause, l’auteur de la réclamation et le bâtonnier ou son délégué à la conciliation. Un exemplaire du procès-verbal est remis à chacun des signataires.

Dans le cas contraire, le bâtonnier ou son délégué atteste l’absence de conciliation.

Les constatations et les déclarations recueillies au cours de la conciliation ne peuvent être ni produites ni invoquées dans la suite de la procédure ni, en tout état de cause, dans une quelconque autre procédure (art 186-3 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

3.1.4) Information sur les suites à donner à la réclamation (article 186-4 du décret du 27 novembre 1991).

Sauf signature du procès-verbal mentionné au cinquième alinéa de l’article 186-3, le bâtonnier informe par tout moyen l’auteur de la réclamation des suites qu’il entend donner à celle-ci.

Le cas échéant, il lui fait connaître les raisons pour lesquelles il n’entend pas engager une procédure disciplinaire.

Dans cette hypothèse, il précise que l’auteur de la réclamation dispose de la possibilité d’en saisir le procureur général de la cour d’appel ou de saisir directement la juridiction disciplinaire (art 186-4 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

3.2) L’enquête déontologique (article 187 modifié du décret du 27 novembre 1991).

Le bâtonnier peut, soit de sa propre initiative, soit à la demande du procureur général, soit sur la plainte de toute personne intéressée, procéder à une enquête sur le comportement d’un avocat de son barreau.

Il peut désigner à cette fin, parmi les membres ou anciens membres du conseil de l’ordre, un ou plusieurs délégués qui établissent un rapport et le transmettent au bâtonnier. Lorsqu’il décide de ne pas procéder à une enquête, il en avise sans délai et par tout moyen l’auteur de la demande ou de la plainte.

Au vu des éléments recueillis au cours de l’enquête déontologique, le bâtonnier décide s’il y a lieu d’exercer l’action disciplinaire.

Il avise de sa décision sans délai et par tout moyen le procureur général et, le cas échéant, le plaignant.

Lorsque l’enquête a été demandée par le procureur général, le bâtonnier lui communique le rapport.

Le bâtonnier le plus ancien dans l’ordre du tableau, membre du conseil de l’ordre ou, à défaut, le membre du conseil de l’ordre le plus ancien dans l’ordre du tableau, met en œuvre les dispositions du présent article lorsque des informations portées à sa
connaissance mettent en cause le bâtonnier en exercice.

4) La saisine de la juridiction disciplinaire et l’instruction des requêtes (Articles 188 à 192).

4.1) Saisine de la juridiction disciplinaire (art. 188 du décret du 27 novembre 1991).

Dans les cas prévus à l’article 183, directement ou après enquête déontologique, la juridiction disciplinaire est saisie par requête du bâtonnier dont relève l’avocat mis en cause, du procureur général ou de l’auteur de la réclamation. (art 188 modifié du décret du 27 novembre 1991)

Une précision est apportée lorsque la requête émane de l’auteur de la réclamation, car elle doit contenir « sous peine d’irrecevabilité, une réclamation préalable adressée au bâtonnier (art 188 modifié dernier alinéa du décret du 27 novembre 1991).

En outre, sous réserve des dispositions du troisième alinéa du présent article, le président de la juridiction disciplinaire saisit le conseil de l’ordre dont relève l’avocat poursuivi » (art 188-1 nouveau dernier alinéa du décret du 27 novembre 1991).

Le président peut, sans tenir d’audience et avant saisine du conseil de l’ordre, rejeter par ordonnance motivée la requête de l’auteur de la réclamation s’il l’estime irrecevable, manifestement infondée ou si elle n’est pas assortie des précisions permettant d’en apprécier le bien-fondé.

Dans ce cas, l’ordonnance est notifiée par tout moyen conférant date certaine à sa réception au requérant. Copie en est communiquée par le secrétariat de la juridiction à l’avocat poursuivi, au bâtonnier dont il relève et au procureur général (art 188-1 alinéa 3 nouveau dernier alinéa du décret du 27 novembre 1991).

Un tri peut ainsi donc être effectué pour préserver tout le sérieux de la procédure disciplinaire des avocats, et éviter l’engorgement de la juridiction disciplinaire.

Néanmoins, le rejet opéré par le président de la juridiction disciplinaire n’est pas sans appel, conformément au nouvel article 188-2 inséré dans le décret du 27 novembre 1991, ce qui permet de rapprocher encore plus la procédure disciplinaire à la procédure civile commune.

En effet, l’ordonnance de rejet peut être déférée à la cour d’appel. Le recours devant la cour d’appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables en matière contentieuse à la procédure avec représentation obligatoire sous réserve des dispositions suivantes qui sont relatives au délai du recours de quinze jours et à la notification de la décision de la cour d’appel (art 188-2 nouveau du décret du 27 novembre 1991)

Dans le cas où l’ordonnance de rejet est infirmée, le greffe communique la décision à l’avocat poursuivi, et au conseil de l’ordre dont il relève aux fins de désignation d’un rapporteur. Copie de la décision est communiquée au bâtonnier et au procureur général (art 188-2 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

Le conseil de l’ordre désigne, dans le délai d’un mois à compter de la saisine du président de la juridiction disciplinaire ou de la décision de la cour d’appel mentionnée au dernier alinéa de l’article 188-2, un de ses membres, en qualité de rapporteur, pour procéder à l’instruction de l’affaire.

A défaut de désignation d’un rapporteur par le conseil de l’ordre, l’autorité qui a engagé l’action disciplinaire ou le procureur général en cas de saisine directe de la juridiction disciplinaire par l’auteur de la réclamation, saisit le premier président de la cour d’appel qui procède alors à cette désignation parmi les membres du conseil de l’ordre (art 188-3 nouveau du décret du 27 novembre 1991).

4.2) Missions du rapporteur (art. 189 modifié du décret du 27 novembre 1991).

Le rapporteur a pour mission de procéder à une instruction objective, impartiale et contradictoire de l’affaire. Il procède, à cette fin, à toute mesure d’instruction nécessaire.

Le rapporteur peut entendre toute personne susceptible d’éclairer l’instruction. Dans le respect du principe du contradictoire, le rapporteur informe l’avocat poursuivi de l’audition éventuelle d’un tiers et l’invite à y assister.

L’avocat poursuivi peut demander à être entendu. Il peut se faire assister d’un conseil.

Il est dressé procès-verbal de toute audition. Les procès-verbaux sont signés par la personne entendue et par le rapporteur.

Toute convocation est adressée à l’avocat poursuivi par tout moyen conférant date certaine à sa réception.

4.3) Transmission du rapport d’instruction (art. 191 modifié du décret du 27 novembre 1991).

Le rapporteur transmet le rapport d’instruction au président de la juridiction disciplinaire, et, à Paris, au bâtonnier doyen, membre du conseil de l’ordre, et s’il est empêché, au plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l’ordre au plus tard dans les quatre mois de sa désignation.

Ce délai peut, à la demande du rapporteur, être prorogé dans la limite de quatre mois par décision motivée du président de la juridiction disciplinaire ou, à Paris, du bâtonnier doyen, membre du conseil de l’ordre, et s’il est empêché, du plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l’ordre.

Cette décision est notifiée aux parties par tout moyen conférant date certaine à sa réception. Copie en est adressée au bâtonnier et au procureur général si ce dernier a pris l’initiative de l’action disciplinaire.

La date de l’audience est fixée par le président de la juridiction disciplinaire et, à Paris, par le bâtonnier doyen, membre du conseil de l’ordre, et s’il est empêché, par le plus ancien bâtonnier, membre du conseil de l’ordre.

5) Le jugement disciplinaire.

5.1) La possibilité de l’échevinage.

La possibilité de l‘échevinage est une nouveauté de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire et du décret du 30 juin 2022 et une révolution pour les avocats.

L’article 22-3 nouveau de la loi du 31 décembre 1971 rappelle que par dérogation aux articles 22-1 et 22-2, le conseil de discipline [la juridiction disciplinaire] est présidé par un magistrat du siège de la cour d’appel, en activité ou honoraire, désigné par le premier président, lorsque la poursuite disciplinaire fait suite à une réclamation présentée par un tiers ou lorsque l’avocat mis en cause en fait la demande.

Le magistrat honoraire président du conseil de discipline ne peut siéger au-delà de la date de son soixante et onzième anniversaire.

La récusation d’un membre de la juridiction peut être demandée dans les conditions prévues à l’article L. 111-6 du code de l’organisation judiciaire.

Le membre de la juridiction disciplinaire qui suppose en sa personne une cause de récusation ou estime en sa conscience devoir s’abstenir est remplacé dans les conditions prévues à l’article L. 111-7 du même code.

L’avocat est convoqué un mois avant l’audience par tout moyen conférant date certaine à sa réception.

La convocation comporte, à peine de nullité, l’indication précise des faits reprochés ainsi que la référence aux dispositions législatives ou réglementaires précisant les obligations auxquelles il est reproché à l’avocat poursuivi d’avoir contrevenu, et, le cas échéant, une mention relative à la révocation du sursis.

La convocation rappelle à l’avocat mis en cause la faculté dont il dispose de solliciter que l’audience soit présidée par un magistrat, prévue à l’article 22-3 de la loi du 31 décembre 1971 susvisée.

Cette demande doit, à peine de forclusion, être formulée quinze jours au plus tard avant l’audience.

Elle doit être portée sans délai à la connaissance du premier président de la cour d’appel.

L’auteur de la réclamation est informé de la date de l’audience et de la faculté dont il dispose de demander, par tout moyen, à être entendu par la juridiction disciplinaire.

5.2) L’audience (art. 193 du décret du 27 novembre 1991).

L’audience se tient dans la commune où siège la cour d’appel. L’avocat poursuivi comparaît en personne. Il peut se faire assister par un avocat.

La formation restreinte ne peut renvoyer l’examen de l’affaire à la formation plénière de la juridiction disciplinaire qu’après audition de l’avocat qui comparaît.

Le président donne la parole au bâtonnier, au procureur général si ce dernier a pris l’initiative d’engager l’action disciplinaire et à l’auteur de la réclamation si celui-ci a demandé à être entendu.

L’avocat poursuivi a la parole en dernier (art 193 modifié du décret du 27 novembre 1991).

Il faut relever que l’article 22 du décret n°2022-965 du 30 juin 2022 a modifié l’article 193 du décret du 27 novembre 1991 afin de permettre au président de la juridiction disciplinaire de donner la parole, lors de l’audience, « à l’auteur de la réclamation si celui-ci a demandé à être entendu ».

Dès lors, face à un avocat, les prétentions du justiciable qui a saisi la juridiction disciplinaire sont mieux prises en compte, quand bien même le nouveau décret tient à préciser que « l’avocat poursuivi a la parole en dernier ».

5.3) Débats publics ou en chambre du conseil à la demande d’une partie (art. 194 du décret du 27 novembre 1991).

Les débats sont publics. Toutefois, l’instance disciplinaire peut décider que les débats auront lieu ou se poursuivront en chambre du conseil à la demande de l’une des parties ou s’il doit résulter de leur publicité une atteinte à l’intimité de la vie privée (art. 194 du décret du 27 novembre 1991).

5.4) Délai pour statuer au fond (art. 195 du décret du 27 novembre 1991).

Par ailleurs, désormais « Si, dans les douze mois de la désignation du rapporteur par le conseil de l’ordre, la juridiction disciplinaire n’a pas statué au fond ou par décision avant dire droit, la demande est réputée rejetée et l’autorité qui a engagé l’action disciplinaire ou, en cas de saisine directe de la juridiction disciplinaire par l’auteur de la réclamation, le procureur général peut saisir la cour d’appel. (art. 195 modifié du décret du 27 novembre 1991).

6) L’appel de la décision de la juridiction disciplinaire (art. 197 du décret du 27 novembre 1991).

La formation de jugement de la cour d’appel comprend trois magistrats du siège de cette cour et deux membres des conseils de l’ordre du ressort de la cour.

Les conseils de l’ordre du ressort de la cour d’appel désignent de concert, pour siéger au sein de cette formation de jugement pendant un an, au moins deux membres titulaires et deux membres suppléants parmi les membres de leurs conseils de l’ordre.

Les désignations ont lieu avant le 1er janvier qui suit le renouvellement annuel des conseils de l’ordre. A Paris, les désignations ont lieu chaque année au mois de janvier. (Décret 30 juin 2022 ; article 27)

C’est une nouveauté prévue par la loi du 22 décembre 2021 qui renforce les pouvoirs des membres du conseil de l’ordre (MCO).

Il faut rappeler que l’avocat qui fait l’objet d’une décision en matière disciplinaire, le procureur général et le bâtonnier peuvent former un recours contre la décision.

La cour d’appel est saisie et statue dans les conditions prévues à l’article 16, le procureur général entendu. La publicité des débats est assurée conformément aux dispositions de l’article 194.

Le directeur de greffe de la cour d’appel notifie l’appel à toutes les parties, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, en indiquant la date à laquelle l’affaire sera appelée.

Le délai du recours incident est de quinze jours à compter de la notification du recours principal.

Le procureur général assure et surveille l’exécution des peines disciplinaires (art. 198 du décret du 27 novembre 1991)

7) Entrée en vigueur des nouvelles règles.

Les dispositions prévues aux articles 8 à 27 du décret n°2022-965 du décret du 30 juin 2022 s’appliquent aux procédures disciplinaires engagés et aux réclamations reçues postérieurement à la publication du présent décret, soit à compter du 2 juillet 2022.

Sources.

Loi 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques

Décret n° 2022-965 du 30 juin 2022 modifiant le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat

Décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat

Loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire Loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire

Dossier législatif de la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire

Discipline des avocats : ce qui change à compter du 1er juillet 2022

Discipline des avocats : que prévoit le projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire ? Frédéric Chhum, Avocat et Sarah Bouschbacher, Juriste

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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  • par NITA , Le 10 octobre 2022 à 16:14

    Un cas d’école à suivre prochainement, le mien face à mon avocat conseil ; Les avocats stagiaires devraient ( si cela reste possible ) y assister, ainsi que les avocats confirmé du bareau de Paris.
    Je résume par, " droits et devoirs d’un avocat " .
    Merci.

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