Contrôle URSSAF : les principales causes de nullité.

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Explorer : # contrôle urssaf # nullité du contrôle # mentions obligatoires # durée du contrôle

Les opérations de contrôle et de recouvrement menées par l’URSSAF doivent nécessairement respecter des règles de forme et de fond, dont la méconnaissance peut entrainer la nullité de la procédure.

-

1. Le défaut des mentions obligatoires dans l’avis de contrôle ou l’absence d’avis de contrôle.

La première étape du contrôle sur place consiste dans l’envoi d’un avis de contrôle par l’URSSAF, qui doit comporter les mentions suivantes :

  • La date de la première visite de contrôle [1] ;
  • Le droit pour l’employeur d’être assisté par le Conseil de son choix durant le contrôle ;
  • La mention de la Charte du cotisant contrôlé (décrivant la procédure de contrôle et les droits de l’entité contrôlée) qui est opposable aux URSSAF ;
  • L’adresse électronique permettant de consulter cette Charte ainsi que la possibilité pour le cotisant de la recevoir sur simple demande.

Le défaut de mention de ces éléments dans l’avis de contrôle ou l’absence d’avis de contrôle est susceptible d’entraîner la nullité du contrôle [2].

2. Les contrôles d’une durée supérieure à 3 mois visant les entreprises de moins de 20 salariés ou les travailleurs indépendants.

Les contrôles visant les entreprises de moins de 20 salariés ou les travailleurs indépendants ne peuvent s’étendre sur une période supérieure à 3 mois, comprise entre le début effectif du contrôle et la lettre d’observations [3].

Cette période peut être prorogée une fois à la demande expresse de la personne contrôlée ou de l’organisme de recouvrement.

NB. La limitation de la durée du contrôle mentionnée ci-dessus n’est pas applicable en présence notamment d’une situation de travail dissimulé ou d’obstacle à contrôle.

Lorsque les opérations de contrôle dépassent la durée de 3 mois, le redressement peut faire l’objet d’une annulation, sur le fondement d’une irrégularité de procédure.

Plusieurs cours d’appel se sont prononcées en ce sens [4].

3. La recherche de documents dans les locaux en l’absence de l’employeur.

Dans le cadre du contrôle sur place, l’agent de contrôle peut solliciter de l’employeur la communication de nombreux documents (copie de bulletins de paie, factures, contrats de travail, transactions, ruptures conventionnelles, etc.).

Toutefois, sous peine de nullité du contrôle, l’agent de l’URSSAF ne peut pas rechercher lui-même ces documents en l’absence de l’employeur [5] ou les demander à un tiers sans les avoir, au préalable, demandés à l’employeur [6].

La même solution s’applique si le contrôle conduit au constat d’une infraction de travail dissimulé [7].

4. Les irrégularités dans le cadre des auditions.

Si l’agent de contrôle dispose de la faculté d’interroger les personnes rémunérées [8], certaines auditions sont irrégulières.

A titre d’exemple, entraîne la nullité du contrôle et du redressement l’audition de salariés d’un prestataire de services exerçant leur activité dans l’entreprise contrôlée [9].

Sont également irréguliers : l’audition de salariés ou de leurs conjoints à leur domicile [10] ou dans les locaux de l’URSSAF [11] ou, encore, l’envoi d’un questionnaire à domicile [12].

A l’inverse, l’audition de salariés sur l’un des chantiers d’une entreprise est valable, même si l’avis de contrôle vise une vérification effectuée au siège social [13].

5. Le redressement établi à partir d’informations obtenues par un tiers.

Les agents de contrôle ne peuvent recueillir des informations qu’auprès de l’entité contrôlée et, comme indiqué ci-dessus (§4) des personnes rémunérées par cette dernière.

Dès lors que les renseignements pris en compte par l’URSSAF pour effectuer un redressement n’ont pas été obtenus auprès de l’entité contrôlée, la procédure de contrôle est irrégulière et le chef de redressement fondé sur ces renseignements doit être annulé [14].

La solution est identique lorsque l’agent de contrôle s’est adressé à l’expert-comptable ou au comptable de l’entreprise [15] ou à des sociétés appartenant au même groupe que la société contrôlée [16].

6. Le non-respect des formalités relatives à la lettre d’observations.

A l’issue du contrôle, l’agent de l’URSSAF doit communiquer à l’employeur, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, une lettre d’observations datée et signée [17].

Cette formalité est substantielle et son omission entraîne la nullité des opérations de contrôle et de redressement [18].

Par ailleurs, l’absence de certaines mentions dans la lettre d’observations entraîne la nullité du contrôle et du redressement, comme :

  • L’indication du mode de calcul des redressements envisagés [19] ;
  • La faculté de se faire assister par un Conseil de son choix [20] ;
  • L’absence de signature de tous les agents de contrôle, l’article R243-59 du Code de la sécurité sociale prévoyant que la lettre d’observations doit être datée et signée par les agents ayant participé au contrôle [21].

Toutefois, une simple erreur matérielle dans la lettre d’observations n’entache pas la régularité du contrôle [22].

De même, la lettre d’observations comportant une signature scannée peut être valable [23].

7. Le non-respect des délais avant l’envoi de la mise en demeure.

Pour engager la mise en recouvrement, l’URSSAF doit adresser une mise en demeure préalable au cotisant.

Avant d’envoyer cette mise en demeure, l’URSSAF doit obligatoirement attendre la fin de la période contradictoire [24] :

  • En l’absence de réponse de l’employeur, l’URSSAF doit patienter jusqu’au terme des délais de réponse du cotisant (30 ou 60 jours) ;
  • En cas de réponse du cotisant avant la fin du délai imparti, l’URSSAF doit attendre la date d’envoi de la réponse de l’agent de contrôle.

A défaut de respect de ces délais, la mise en demeure est nulle [25].

8. L’absence de mention du délai de paiement dans la mise en demeure.

L’article L244-2 du Code de la sécurité sociale prévoit notamment que la lettre de mise en demeure invite le cotisant « à régulariser sa situation dans le mois ».

En d’autres termes, l’employeur dispose d’un délai d’un mois pour régler la somme demandée.

Or, la Cour de cassation considère que l’article L244-2 du Code de la sécurité sociale impose que la lettre de mise en demeure porte la mention expresse du délai pour procéder au paiement.

L’absence de cette information formelle est sanctionnée par la nullité du redressement [26].

En conclusion, précisons que la méconnaissance, par l’URSSAF, des garanties procédurales, n’entraîne la nullité de l’ensemble du contrôle et du redressement que si l’irrégularité affecte chacun des chefs de redressement envisagés [27].

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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Notes de l'article:

[1Cass. 2e civ. 25-4-2013, n° 12-30.049.

[2Cass. 2e civ. 10-7-2008, n° 07-18.152 ; 18-9-2014, n° 13-17.084.

[3CSS. art. L243-13, alinéa 1er.

[4CA Amiens, 7-11- 2022, n° 21/02455 CA Besançon, 5-10-2018, n° 18/00207 ; CA Aix-en-Provence, 4-11-2022, n° 20/13302 ; CA Paris, 25 juin 2021, n° 17/07085.

[5Cass. soc. 5-12-1991, n° 89-17.754.

[6Cass. 2e civ. 31-3-2016, n° 15-14.683 ; 7-7-2022, n° 20-18.471.

[7Cass. 2e civ. 22-10-2020, n° 19-18.335.

[8CSS art. R 243-59.

[9Cass. 2e civ. 20-9-2018, n° 17-24.359.

[10Cass. 2e civ. 11-10-2005 n° 04-30.389.

[11Cass. soc. 25-3-1999 n° 97-14.680.

[12Cass. 2e civ. 10-5-2005 n° 04-30.046.

[13Cass. 2e civ. 5-6-2008, n° 06-21.494.

[14CSS art. R243-59 ; Cass. 2e civ. 7-4-2022, n° 20-17.655.

[15Cass. 2e civ. 9 -5-2018, n° 17-17.352 ; Cass. 2e civ. 22-10-2020, n° 19-18.335.

[16Cass. 2e civ. 11-2-2016, n° 15-13.724 ; Cass. 2e civ. 7-1-2021, n° 19-19.395.

[17CSS. art. R243-59.

[18Cass. soc. 12-12-1996, n° 95-12.881 ; 6-2-1997, n° 95-13.685 ; Circ. Acoss 82 du 16-7-1999.

[19Cass. 2e civ. 18-9-2014, n° 13-21.682.

[20Cass. 2e civ. 3-4-2014, n° 13-11.516.

[21Cass. 2e civ. 18-9-2014, n°13-23.990.

[22CA Rennes 12-1-2011, n° 08/04631.

[23Cass. 2e civ. 18-3-2021, n° 19-24.117.

[24CSS art. R243-59.

[25Cass. 2e civ. 4-5-2017, n° 16-15.861.

[26Cass. 2e civ. 19-12-2019, n° 18-23.623.

[27Cass. 2e civ. 8-7-2021, n° 20-16.846.

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