Affaire C. Quesada : Détention provisoire et remise de peine, quelles incidences sur le temps d’emprisonnement ?

Par Avi Bitton, Avocat, Coline Josselin et Clémence Ferrand, Juristes.

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Explorer : # détention provisoire # réduction de peine # incarcération # réinsertion sociale

Ancien champion de l’émission « Les 12 coups de midi », Christian Quesada avait été condamné à trois ans d’emprisonnement ferme pour corruption de mineurs et détention et diffusion d’images pédopornographiques.
Il vient pourtant d’être remis en liberté, un an après son jugement de condamnation. Comment l’expliquer ?
Cet article revient sur l’incidence que peuvent avoir la détention provisoire et le mécanisme des remises de peines sur la durée effective d’emprisonnement d’une personne.

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Cette remise en liberté s’explique par la détention provisoire exécutée avant le jugement, et par le mécanisme des remises de peine.

1) Pourquoi Christian Quesada est-il déjà sorti de prison alors qu’il a été condamné l’année dernière à trois ans de prison ferme ?

A l’issue de l’instruction, le 27 mars 2019, Christian Quesada a été placé en détention provisoire dans l’attente de son procès. Son procès s’est tenu le 8 avril 2020 et il a été condamné à trois ans d’emprisonnement ferme. Il vient de sortir de prison (le 26 mars 2021).

Sa sortie de détention, après seulement un an à compter de sa condamnation, se justifie par deux éléments :
- D’une part, la durée de placement en détention provisoire doit être intégralement déduite de la durée de la peine prononcée (article 716-4 du Code de procédure pénale). Christian Quesada ayant passé 1 an et une dizaine de jours en détention provisoire, cette durée a été déduite de la peine prononcée.
- D’autre part, il a fait l’objet de réductions de peine.

Toutefois, si l’on prend en considération le fait qu’il ait passé un an en détention provisoire, Christian Quesada est en réalité resté, au total, deux ans en détention.

2) Qu’est-ce qu’une remise de peine ?

La remise de peine est appelée « réduction de peine » ou « crédit de réduction de peine ».

La réduction de peine emporte dispense d’exécution d’une partie de la peine privative de liberté et entraîne donc un raccourcissement de la durée d’incarcération de la personne condamnée.

Son objectif est de « récompenser » la bonne conduite du détenu et/ou les efforts réalisés en vue de sa réinsertion.

3) Quelles sont les raisons pour lesquelles on obtient une remise de peine ? Est-ce courant dans les affaires de délinquance sexuelle ?

La réduction de peine peut prendre deux formes :
- Le crédit de réduction de peine, prévu à l’article 721 du Code de procédure pénale ;
- La réduction de peine supplémentaire, prévue à l’article 721-1 du Code de procédure pénale.

Le crédit de réduction de peine (article 721 du Code de procédure pénale) est accordé de plein droit à chaque condamné et il est calculé par rapport à la durée de la peine prononcée :
- Si la peine est supérieure à 1 an, la réduction de peine est de 3 mois la première année et de 2 mois les années suivantes ;
- Si la peine est inférieure à 1 an ou que la partie de la peine restant à subir est inférieure à 1 an, la réduction de peine est de 7 jours par mois (étant précisé que pour les personnes initialement condamnées à une peine supérieure à 1 an, le total de la réduction de peine de la dernière année de détention ne peut excéder 2 mois).

En cas de mauvaise conduite, la personne condamnée peut bien évidemment se voir retirer ses crédits de réduction de peine par le juge de l’application des peines.

La réduction de peine supplémentaire [1] peut venir s’ajouter au crédit de réduction de peine initial lorsque le condamné manifeste « des efforts sérieux de réadaptation sociale » (réussite d’un examen scolaire, apprentissage de la lecture/écriture, participation à des activités culturelles, suivi d’une thérapie, indemnisation des victimes) :
- Lorsque la peine est supérieure à 1 an, la réduction supplémentaire est de 3 mois maximum par année d’incarcération ;
- Lorsque la peine est inférieure à 1 an ou que la partie de la peine restant à subir est inférieure à 1 an, la réduction supplémentaire est de 7 jours par mois d’incarcération.

Toutefois, lorsque la personne a été condamnée pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre ou assassinat, torture ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle, la réduction de peine supplémentaire ne peut excéder deux mois par an ou quatre jours par mois, dès lors que la personne refuse les soins proposés.

Le système de réduction de peine évoqué se retrouve pour tous les types d’infraction et n’est donc pas plus fréquent pour un type d’infraction que pour un autre, tant que le détenu a une bonne conduite en détention et/ou manifeste des efforts sérieux de réadaptation sociale. Il est aussi courant dans les affaires de délinquance sexuelle que dans les autres types d’affaires.

4) S’il commet une infraction pendant cette remise de peine, retourne-t-il en prison ?

Si une personne qui a bénéficié d’une réduction de peine commet un crime ou un délit après sa libération et durant la période correspondant à cette réduction de peine, la juridiction de jugement saisie de la nouvelle infraction peut décider de retirer totalement ou partiellement l’octroi de cette réduction de peine.

Cela signifie que la période correspondant à la réduction de peine octroyée est transformée en emprisonnement et est mise à exécution. Cette période d’incarcération s’ajoute alors à la peine privative de liberté résultant de la nouvelle condamnation.

Avi Bitton, Avocat au Barreau de Paris
Ancien Membre du Conseil de l’Ordre
Site : https://www.avibitton.com

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Notes de l'article:

[1Article 721-1 du Code de procédure pénale.

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