Lorsque les associés d’une société votent en assemblée générale de la société, une décision pour celle-ci, ils doivent rester loyaux et agir dans l’intérêt social de la société.
Cela suppose que les décisions qui sont prises doivent être toujours dans l’intérêt commun de la société et jamais dans l’intérêt personnel de certains associés.
Autrement, il peut y avoir un abus dans l’exercice du droit de vote, qui pourra alors être sanctionné.
Pour caractériser un abus, il suffit donc de se référer principalement à l’intérêt social de la société.
Pour rappel, l’intérêt social de la société est en quelque sorte la boussole de la société. C’est lorsque la décision avantage celle-ci que l’intérêt social est respecté.
Il y a trois abus possibles : l’abus de majorité (1), l’abus de minorité (2) et l’abus d’égalité (3).
1. L’abus de majorité.
Comme il en est dans tous les domaines de la vie sociale, la minorité est protégée en droit des sociétés.
Cela signifie que lorsque les associés majoritaires exercent leur droit de vote au détriment de la minorité, et contrairement à l’intérêt social de la société, il y a abus de majorité [1].
La sanction de l’abus de majorité sera l’octroi de dommages-intérêts et l’annulation de la décision abusive.
Par exemple, il a déjà été jugé que la mise en réserve systématique des bénéfices pouvait constituer un abus de majorité [2].
En outre, il a déjà été jugé que constitue également un abus de majorité, une décision autorisant un cautionnement hypothécaire dans la perspective de garantir un prêt personnel consenti à un associé majoritaire [3].
L’action en abus de majorité sera intentée contre les associés sur le fondement des dispositions de l’article 1240 du Code civil, dans la perspective de demander des dommages-intérêts, et contre la société au visa des dispositions de l’article 1844 – 10 du Code civil pour l’annulation de la délibération « abusive ».
2. L’abus de minorité.
Suivant les cas, certaines décisions concernant la société ne peuvent être prises qu’à certaines majorités (majorité des deux tiers ou unanimité par exemple).
Dans ces hypothèses, les associés minoritaires peuvent donc disposer d’une « minorité de blocage » qui peut paralyser le fonctionnement de la société.
Les associés minoritaires ont ainsi une sorte de droit de veto qui leur permet d’éviter de voter certaines décisions pour éviter d’abonder par exemple dans le sens/souhait des associés majoritaires.
En pareille situation, lorsque l’associé minoritaire commet un abus en ne votant pas une décision pourtant dans l’intérêt social de la société, il se rend coupable d’un abus de minorité.
Lorsqu’un associé minoritaire refuse de voter par exemple le transfert du siège social de la société, il peut se rendre coupable d’un abus de minorité [4].
Lorsqu’un associé refuse de voter une augmentation de capital alors que le montant des capitaux propres est inférieur à la moitié de la valeur du capital social, il est susceptible de se rendre coupable également d’un abus de minorité [5].
En cas d’abus de minorité, il faut demander la désignation d’un mandataire ad hoc en justice pour voter à la place et au nom des minoritaires aux frais exclusifs de ces derniers, la décision qui n’a pas pu être votée [6].
Il est par ailleurs possible de demander des dommages-intérêts à l’encontre des associés minoritaires, au visa des dispositions de l’article 1240 du Code civil compte tenu de leur faute et du préjudice occasionné au détriment des associés majoritaires.
3. L’abus d’égalité.
Ce type d’abus se rencontre lorsque les associés sont égalitaires dans le capital social de la société.
C’est par exemple le cas lorsque chaque associé détient 50 % du capital social de cette dernière.
En pareille situation, l’abus d’égalité est assimilé à un abus de minorité et il faut donc avoir recours aux mêmes méthodes, à savoir la demande de désignation d’un mandataire ad hoc, pour que celui-ci vote en lieu et place de l’associé récalcitrant la résolution nécessaire à l’intérêt social de la société.
Il sera par ailleurs possible de solliciter des dommages-intérêts à l’encontre de cet associé agissant contrairement à l’intérêt social de la société, au visa toujours des dispositions de l’article 1240 du Code civil.