Durant cette période, une question revenait fréquemment : quelle est l’utilité d’un membre du Conseil de l’Ordre ? Mes confrères exprimaient un besoin réel de comprendre le sens de cet engagement au sein d’une institution qui leur semblait lointaine, voire étrangère.
Une fois élue, le 1ᵉʳ janvier 2014, cette interrogation persistait, tant chez les avocats que chez les non-juristes « En quoi consiste un mandat d’élu au Conseil de l’Ordre ? »
Il faut admettre que répondre simplement à cette question est complexe, tant l’activité est dense, intense et diversifiée.
Dès ma première année de mandat, j’ai été affectée à plusieurs commissions techniques :
- Omissions financières : nous recevons en audience les confrères en difficultés financières pour les orienter dans la poursuite de leur activité ;
- Respect du contradictoire : nous traitons les dossiers de litiges entre confrères liés au respect du contradictoire, rédigeons des avis et, le cas échéant, convoquons les parties pour des auditions (environ 550 dossiers par an) ;
- Succession d’avocats : nous gérons les dossiers complexes liés aux successions d’avocats dans l’intérêt des clients, rédigeons des avis et, si nécessaire, procédons à des auditions (environ 400 dossiers par an) ;
- Déontologie générale : nous traitons les questions déontologiques entre confrères ou entre avocats et tiers, rédigeons des avis et, le cas échéant, convoquons les parties pour des auditions (environ 1 600 dossiers par an) ;
- Ducroire : nous traitons les litiges liés aux honoraires entre auxiliaires de justice et rédigeons des avis (environ 560 dossiers par an).
Ces commissions représentent une charge de travail considérable, à laquelle s’ajoutent les visas.
En effet, il est d’usage que les membres du Conseil de l’Ordre en première année soient affectés aux visas. Rappelons que tout acte visant un auxiliaire de justice doit être soumis au visa du bâtonnier.
En moyenne, une quinzaine d’actes parviennent chaque jour au service des visas que chaque membre du Conseil de l’Ordre doit traiter dans l’après-midi même de leur réception, après en avoir pris connaissance. Une fois par mois un binôme se répartit une semaine de demandes de visas et trois heures minimum sont nécessaires à chaque fois pour traiter l’ensemble des demandes reçues sur une journée.
Nous assurons également une permanence déontologique, répondant aux questions des confrères nécessitant une analyse rapide, à raison d’une demi-journée par mois.
S’ajoutent à cela les sollicitations en tant que membre du Conseil de l’Ordre référent et la participation aux commissions ordinales professionnelles
Enfin, j’ai également été désignée instructeur dans des procédures visant des confrères ayant commis des manquements déontologiques graves. La procédure se déroule à l’identique des instructions classiques (audition, rapport d’instruction).
Ces différentes missions, ainsi que le Conseil de l’Ordre prennent au minimum une journée et demie par semaine.
Mais cet investissement en temps, qui va en augmentant chaque année, peut être doublé voire davantage, lorsque vous organisez un évènement ou que vous produisez un rapport.
L’organisation de la Journée de la Femme le 7 mars 2014 a exigé un temps de préparation de près d’une semaine à temps complet.
La rédaction du rapport La Parentalité chez les avocats m’a nécessité une vingtaine d’heures.
L’investissement est donc colossal car naturellement le temps passé pour les missions de l’Ordre n’est pas consacré à une activité lucrative.
Cet engagement est d’autant plus conséquent qu’il est bénévole et ne génère aucun dossier, contrairement à certaines idées reçues.
Cependant, l’intérêt de ce mandat est à la hauteur de l’investissement : passionnant, gratifiant, instructif et riche en rencontres humaines.
C’est pourquoi j’ai souhaité poursuivre mon engagement au Conseil National des Barreaux (CNB), également bénévole, pour un nouveau mandat de trois ans.
Le CNB est composé de 80 membres élus pour trois ans (48 pour la circonscription nationale, 32 pour Paris) et de deux vice-présidents de droit : le bâtonnier de Paris et le président de la Conférence des bâtonniers.
Le travail s’effectue principalement en commissions, en plus de l’assemblée générale mensuelle.
Certains préfèrent leur mandat dans cet organe national, d’autres au Conseil de l’Ordre.
Pour ma part, je me range dans la seconde catégorie, préférant l’environnement plus restreint et convivial du Conseil de l’Ordre, où les liens se tissent dès la campagne.
Que reste-t-il après le mandat ?
Comme pour le mandat, c’est ce que vous décidez d’en faire.
Poursuivre l’engagement dans les commissions ouvertes aux anciens membres, au disciplinaire ou à la formation.
Les anciens membres du Conseil de l’Ordre peuvent participer aux formations disciplinaires pendant une période maximale de huit ans après la fin de leur mandat. Passé ce délai, ils ne peuvent plus être membres de ces formations.
Ou se retirer de l’organigramme, car selon le règlement intérieur du Barreau de Paris, un ancien membre du Conseil de l’Ordre doit s’abstenir d’assister un confrère devant une commission ordinale ou disciplinaire pendant une période de trois ans après la fin de son mandat, afin d’éviter les conflits d’intérêts.
Dix ans après, je peux vous confirmer qu’aucun de mes deux mandats ne m’a apporté le moindre dossier ni le moindre centime de rétribution. Au contraire même, certains de mes anciens collègues ont vu leur activité professionnelle décliner. D’autres encore y ont laissé leur couple.
Cependant, je garde un souvenir vif du plaisir de servir la profession et les confrères, ainsi que des rencontres exceptionnelles.
Discussions en cours :
Enrichissant article, mais, pour un confrère étranger ( algérien) des détails manquent.
confraternellement : aouasabdelkader chez yahoo.fr
Merci de votre commentaire mais il est vrai que, comme l’indique le titre, mon article ne vise que le Conseil de l’Ordre de Paris et les actions que nous y menons.
Il n’a pas l’ambition d’être exhaustif, en particulier pour la campagne qui fera l’objet d’un guide dédié.