Droit de l'internet en Turquie. Par Ozgur Asik, Avocat.

Extrait de : Droit européen et international

Droit de l’internet en Turquie.

Par Ozgur Asik, Avocat.

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Explorer : # censure internet # liberté d'expression # vie privée # réglementation internet

La Turquie fait mauvaise presse en matière de libertés d’accès à la toile. YouTube et Twitter ont été interdits pendant des mois en 2014, pour des motifs farfelus. De nouveaux amendements à la loi réglementant les publications sur internet ont été adoptés par le législateur turc. Rien de très encourageants.

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Le 6 février 2014, l’Assemblée Nationale en Turquie a adopté de nouveaux amendements à la loi n° 5651 réglementant les publications sur internet et luttant contre les crimes commis dans ce cadre. Ces amendements ont été approuvés par le président Abdullah Gul et publiés au Journal officiel turc du 19 février 2014.

La loi turque contient des dispositions générales et spécifiques sur réglementation de la radiodiffusion par Internet et organise les missions de la présidence des télécommunications et de la communication (TIB). Cette présidence supervise notamment les publications sur Internet et prend des mesures contre les violations de la loi commises par dans le cadre de ces publications. Parmi les amendements les plus importants, on trouve un nouvel article 6/A. Ce dernier impose que les fournisseurs de services Internet adhèrent à l’association des fournisseurs d’accès. Les fournisseurs qui ne seront pas membres de cette association n’auront pas la possibilité de fournir des services d’accès en Turquie.

Les amendements prévus à l’article 5 exigent des fournisseurs d’hébergement qu’ils stockent toutes les données relatives à leurs activités d’hébergement de moins de deux ans et qu’ils les rendent accessibles à la TIB sur demande. Les fournisseurs d’hébergement sont également tenus de prendre toutes les mesures nécessaires demandées par la TIB.

En vertu des modifications incluses dans un nouvel article 9/A, la TIB a le pouvoir de bloquer l’accès au contenu sans contrôle judiciaire préalable, et cela en cas de plainte selon laquelle une publication viole le droit à la vie privée d’un individu. Ainsi, selon cette nouvelle disposition, les particuliers et les personnes morales peuvent s’adresser directement à la TIB pour bloquer l’accès à certains contenus Internet, en soutenant que leurs droits à la vie privée ont été violés. Dès réception d’une telle demande, la TIB informera rapidement l’association précitée de sa décision de blocage. Les fournisseurs de services Internet devront alors prendre les mesures nécessaires pour bloquer ce contenu particulier dans les quatre heures suivant la réception de la notification.

L’article 9/A permet à la TIB de rendre une ordonnance de blocage d’office. La TIB peut bloquer le contenu immédiatement si un éventuel retard peut avoir des conséquences négatives pour la protection du droit à la vie privée. Dans de tels cas, les objections à l’ordre de blocage peuvent être faites directement à la cour.

Il s’agit tout simplement de pouvoir stopper immédiatement, sans procédure ou décision, un contenu qui déplairait au pouvoir politique actuel en Turquie.

Ces modifications ont soulevé de nombreuses critiques depuis l’étranger. Le Conseil de l’Europe a annoncé que ces nouvelles restrictions sur l’utilisation d’Internet sont en cours d’examen par des experts. Les responsables de l’Union européenne ont également étudié la question des amendements proposés par le Parlement turc, indiquant que ces nouveaux amendements introduisent plusieurs restrictions à la liberté d’expression. Le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies a exprimé sa préoccupation au sujet des modifications qui permettent le blocage des sites web sans la nécessité d’obtenir une ordonnance du tribunal et qui punit les fournisseurs d’accès s’ils ne coopèrent pas.

A la date de rédaction de cet article, YouTube et Twitter sont accessibles. Mais à la première occasion, le pouvoir politique dispose de moyens juridiques pour couper l’accès, en toute légalité.

Ozgur Asik, Avocat aux barreaux de Paris et Istanbul
Spécialiste de l’arbitre International

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