L’Office européen des brevets (OEB) a pour objectif d’améliorer la qualité des brevets délivrés et de refuser la délivrance aux brevets dont l’intérêt, l’apport aux connaissances techniques et le caractère inventif sont limités. Pour ce faire, l’OEB compte entre autres sur la rigueur accrue des examinateurs quant à l’appréciation de l’évidence ou de la non-évidence d’une invention aux yeux de l’homme du métier (critère d’activité inventive).
Ce critère est apprécié lors de l’examen de la demande de brevet européen, avant la délivrance du titre, par l’approche problème/solution. Dans cette approche, la définition du problème technique objectif a ses limites comme illustré par la décision de la Chambre de recours technique de l’OEB n° T711/06, où le problème technique objectif retenu a été celui exposé par le demandeur dans sa demande (augmentation de la puissance de coloration), et non celui qui ressortait des antériorités citées (produit moins toxique). Ce choix a déterminé le caractère inventif de l’invention.
En France, ce critère n’est pas étudié aussi pleinement qu’à l’OEB au cours de l’examen par l’INPI, mais le sera sérieusement dans le cadre d’une éventuelle action en nullité du brevet devant les tribunaux. L’approche problème/solution n’est pas forcément utilisée dans cette appréciation. Ainsi, dans la décision de la Cour d’appel de Paris du 12 décembre 2008, l’appréciation du critère d’activité inventive a été basée sur le fait de savoir si l’association « de ses seules compétences professionnelles et des enseignements apportés par les antériorités » permettait à l’homme du métier d’« appréhender l’avantage » que procure une caractéristique ou une combinaison de caractéristiques nouvelles.
Pour l’OEB, les capacités de l’homme du métier ont un rôle primordial dans l’appréciation de l’activité inventive. Aussi l’OEB va-t-elle intégrer dans ses prochaines Directives d’examen en 2010, la définition de l’homme du métier élaborée via la jurisprudence, notamment quant à la pluridisciplinarité et les connaissances générales de celui-ci. Cette intégration permettra à l’examinateur de justifier la prise en compte de ses propres connaissances générales dans la démonstration de l’évidence de l’invention.
Les tribunaux français suivront-ils ce durcissement de l’appréciation du critère d’activité inventive dans le cadre d’actions en nullité de brevets ?
Karine VILOTTA, Ingénieur Brevets
Cabinet WAGRET, Conseils en Propriété Industrielle
Sources :
OEB, T1711/06, 29 juil. 2009 ; CA Paris, 4ème ch., sect. B, 12 déc. 2008
Conférence ASPI, CBE2000, M. Spigarelli, 11 février 2009