Agent commercial : un contrat intuitu personae.

Par Jean-Baptiste Rozès, Avocat.

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Explorer : # contrat intuitu personae # agent commercial # substitution # rupture de contrat

Le contrat d’agent commercial est conclu intuitu personae. Seul un accord exprès du mandant peut permettre à l’agent commercial d’être substitué par une société commerciale ou de procéder à la cession de sa carte.

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1) Sur l’éventuelle substitution d’une société commerciale

L’activité d’agent commercial pouvant être exécutée par une personne physique ou une personne morale en application de l’article L. 134-1 al. 1 du Code de commerce, un agent peut avoir intérêt à poursuivre son activité sous la forme d’une société. Il doit toutefois vérifier si cette faculté lui est ouverte contractuellement ou s’assurer de l’accord exprès du mandant.

En effet, si en application de l’article L.134-1 du Code de commerce l’agent commercial dispose d’une liberté totale d’organisation sans être tenu d’informer son mandant de ses choix, cette liberté, qui autorise l’agent à s’assurer la collaboration d’autres personnes physiques ou morales, ne lui permet pas de se substituer, sans autorisation du mandant, une société commerciale, même si celle-ci a été constituée à son initiative.

Le contrat d’agent commercial est, en effet, un mandat conclu intuitu personae qui, sauf stipulation contractuelle contraire, n’autorise aucune substitution de l’agent sans l’accord exprès du mandant.

De même, le contrat d’agence commerciale, conclu en considération de la personne du cocontractant, ne peut être transmis, même par cession partielle d’actif, qu’avec l’accord du cessionnaire et de l’agent commercial.

Ainsi, dans un cas où, bénéficiaire de l’apport d’une branche autonome d’activité dont les produits étaient commercialisés par l’intermédiaire d’un agent commercial, une société avait informé celui-ci de sa volonté de les commercialiser directement, la Cour de cassation a jugé qu’une Cour d’appel avait légalement justifié sa décision de rejeter la demande en paiement formée à son encontre par l’agent commercial au titre de la rupture de son contrat dès lors qu’elle a retenu l’absence d’accord entre les parties quant à la continuation du contrat et la démonstration, par les courriers échangés, du désaccord persistant sur l’étendue et les modalités du nouveau contrat [1].

2) Sur la vente de carte

Le contrat d’agent commercial conclu en considération de la personne du contractant ne peut être transmis, même par cession partielle d’actif, qu’avec l’accord exprès du mandant.

La Cour de cassation a ainsi jugé que c’est souverainement que Cour d’appel a retenu que la cession du contrat d’agent commercial, faite par le mandataire sans l’agrément du mandant, constitue un motif suffisant pour justifier la rupture du contrat [2].

Les faits de l’espèce étaient les suivants : en 1980, la société Hubert est devenue l’agent commercial de la société Borie-Manoux. La société Hubert ayant cédé sa carte d’agent commercial à la société MRC le 31 décembre 1987, avec effet au 1er janvier 1988, sans l’agrément de la société Borie-Manoux, cette dernière a résilié, le 15 janvier 1988, avec effet au 1er janvier 1988, le contrat d’agent commercial la liant à la société Hubert, en se fondant sur cette cession non agréée par elle.

La société Hubert a assigné la société Borie-Manoux pour rupture abusive du contrat, en faisant valoir que la cession litigieuse avait été annulée dès le 20 janvier 1988, avec effet au 31 décembre 1987.

La Cour d’appel a jugé que la cession par la société Hubert de sa carte d’agent commercial était un motif légitime de résiliation unilatérale du mandat d’intérêt commun sans indemnité.

Dans son arrêt du 14 janvier 1997, la Cour de cassation a jugé que la Cour d’appel avait retenu souverainement que la cession du contrat d’agent commercial, faite par le mandataire, sans agrément du mandant, constituait un motif suffisant pour justifier la rupture du contrat.

Il est ici à noter que le refus par le mandant de son agrément du cessionnaire doit être motivé par des motifs professionnels sérieux.

Jean-Baptiste Rozès

Avocat Associé

OCEAN AVOCATS

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Notes de l'article:

[1Cass. com. 29 octobre 2002, n° 01-03987

[2Cass.com., 14 janvier 1997, n° 94.21795

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