Je ne vois plus mes petits-enfants ! Ai-je des droits ?

Par Salomé Mabilon, Avocate.

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Explorer : # droits des grands-parents # intérêt de l'enfant # médiation familiale # procédure judiciaire

Vos enfants vous empêchent de voir vos petits-enfants : grands-parents, vous avez des droits !
Par principe, en tant que grands-parents, vous avez droit à avoir des relations personnelles avec vos petits-enfants.

-

C’est l’article 371-4 du Code civil qui le prévoit : « L’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit ».

Et la jurisprudence considère que : « Pour faire obstacle à l’exercice du droit d’un enfant à entretenir des relations personnelles avec ses ascendants, seul l’intérêt de l’enfant doit être pris en considération » (Cass. civ. 1ère, 14 janvier 2009, n° 08-11.035).

Il existe d’ailleurs une présomption selon laquelle il est dans l’intérêt des enfants de préserver des relations personnelles avec leurs grands-parents.

En ce sens : Cass. 1ère civ. 1er décembre 1982, n° 81-14.627 :

« Mais attendu, d’une part, que l’article 371-4 du Code civil présume qu’il est de l’intérêt des enfants d’entretenir des relations personnelles avec leurs grands-parents, à moins qu’il ne soit justifié de motifs graves, de nature à y faire obstacle ;
qu’en l’espèce, la cour d’appel, après avoir d’ailleurs énoncé qu’il était conforme à l’intérêt des enfants de maintenir des relations régulières avec leurs grands-parents maternels, constate qu’aucun grief sérieux n’est avance par M. Dominique D à l’encontre de la demande
 ».

Aussi, la Cour Européenne des Droits de l’Homme considère que la préservation du lien familial entre les grands-parents et leurs petits-enfants relève du droit des intéressés au respect de leur vie familiale, garanti par l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH, 20 janvier 2015, n° 107/10, Manuello et Nevi c/ Italie).

Si vos enfants refusent de vous permettre de rencontrer vos petits-enfants, une action en justice est envisageable devant le Juge aux affaires familiales pour obtenir des droits réguliers :

  • Les droits de visite permettent de visiter ou recevoir vos petits-enfants en journée.
  • Les droits d’hébergement permettent d’accueillir vos petits-enfants, la nuit et donc plusieurs jours consécutifs.
  • Le droit de correspondance vous permet de maintenir un lien avec ces derniers (appels téléphoniques, appels en visioconférence, courriers postaux etc…).

Pour obtenir des droits, il convient de saisir le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire compétent, c’est à dire du lieu de vie de vos petits-enfants. L’avocat est obligatoire pour cette procédure écrite !

Avant d’engager un procès, privilégier le dialogue : une solution négociée a beaucoup plus de chance d’être respectée par parents/grands-parents, plutôt qu’une décision imposée par le juge ! Il existe des médiateurs familiaux dans le ressort de chaque tribunal judiciaire, pouvant vous aider à parvenir à un accord amiable.

A défaut d’accord conclu, le juge pourra tenir compte plusieurs critères fondés sur l’intérêt de l’enfant pour décider de vous accorder des droits :

  • Y a-t-il eu une tentative d’accord amiable ?
  • Quel est votre lieu de vie ? Votre disponibilité ?
  • Quel rythme de visites/hébergements/appels proposez-vous ? Est-il adapté à l’âge de l’enfant ?
  • Existe-il un conflit tel entre les parties (parents/grands-parents) qu’il rendrait impossible l’application des droits ?
  • Existe-il des motifs graves, de nature à faire obstacle à la mise en place de droits réguliers ?
  • Enfin et surtout, est-ce dans l’intérêt de l’enfant d’entretenir des relations avec sa grand-mère/son grand père ?

Si l’exercice de vos droits est conforme à l’intérêt de vos petits-enfants, le juge pourra vous permettre de les accueillir régulièrement.

Que peut décider le juge concrètement ?

S’il vous accorde des droits, le juge définira dans quelle cadre et à quelle fréquence vous pouvez voir vos petits-enfants.

Il peut décider de vous donner la possibilité d’héberger votre petit-fils un week-end par mois ou durant chaque vacance scolaire ou à la journée le mercredi par exemple.

Il peut prévoir la possibilité pour vous de lui rendre visite ou de faire avec lui des activités, de lui parler au téléphone, etc.

Le magistrat peut décider que ces visites se feront en présence d’un tiers (parents, proches) ou non.

Le juge peut également décider que vous verrez vos petits-enfants dans un espace-rencontre (présent dans chaque grande ville) à des jours et heures déterminés, car il considérera que ce mode de visite est le plus adapté.

La procédure est écrite et fera l’objet de renvois successifs à des dates d’audiences électroniques, afin que chaque partie puisse fair valoir ses arguments par la production de conclusions d’avocat, jusqu’à une audience de plaidoirie.

Chaque situation particulière sera examinée par le juge qui déterminera in concreto ce qui va de l’intérêt de l’enfant.

La procédure dure en moyenne entre quelques mois et un an selon le comportement procédural de chaque partie. Il est à noter que la partie « perdante » en première instance dispose d’un droit de faire appel de la décision rendue devant la Cour d’appel compétente, jusqu’à l’obtention d’une décision définitive.

Le jugement rendu par le juge vous permettra de retrouver ou maintenir un lien régulier avec vos petits-enfants. La décision pourra s’appliquer jusqu’à ce qu’ils soient majeurs.

A 18 ans, vos petits-enfants seront libres de décider par eux-mêmes !

Salomé Mabilon, Avocate au Barreau de Carpentras
www.mabilonavocat.com
salome.mabilon chez gmail.com

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