L’apprentissage est la plus ancienne des formations en alternance ; elle a existé bien avant la Révolution. A cette époque les apprentis étaient pris en charge par les corporations.
Lorsque le système des corporations a été aboli par la loi « Le Chapellier » en 1791, il faudra attendre 1851 pour que paraisse une première loi sur l’apprentissage, qui sera ultérieurement complétée par la loi Astier du 4 juillet 1919.
En 1937, la loi donne compétence aux chambres des métiers aux fins d’organiser l’apprentissage mais ce n’est qu’en 1966 que seront créés les centres de formation des apprentis.
Diverse lois vont réglementer les contrats d’apprentissages, jusqu’à aboutir aux lois dites Delors en 1971 qui posent les règles de bases en matière d’apprentissage moderne mais qui a fait l’objet de bien des réformes depuis, la dernière étant celle de la loi n°2014-288 du 5 mars 2014.
Le contrat d’apprentissage est aujourd’hui réglementé par les articles L.6221-1 et suivants du Code du travail.
L’article L.6221-1 du Code du travail pose le principe de base de ce contrat :
« Le contrat d’apprentissage est un contrat de travail de type particulier conclu entre un apprenti ou son représentant légal et un employeur.
L’employeur s’engage, outre le versement d’un salaire, à assurer à l’apprenti une formation professionnelle complète, dispensée pour partie en entreprise et pour partie en centre de formation d’apprentis ou section d’apprentissage.
L’apprenti s’oblige, en retour, en vue de sa formation, à travailler pour cet employeur, pendant la durée du contrat, et à suivre cette formation. »
Et l’article L6222-7 du code de travail apporte certaines précisions sur sa durée :
« Le contrat d’apprentissage peut être conclu pour une durée limitée ou pour une durée indéterminée.
Lorsqu’il est conclu pour une durée indéterminée, le contrat débute par la période d’apprentissage, pendant laquelle il est régi par le présent titre. A l’issue de cette période, la relation contractuelle est régie par les titres II et III du livre II de la première partie, à l’exception de l’article L. 1221-19. »
Il convient d’ores et déjà de souligner que dès lors que le Code du travail parle de contrat particulier, cela sous-entend qu’il ne relève pas du droit commun ni des contrats à durée déterminée, ni des contrats à durée indéterminée ; il suit ses propres règles mais est complété par le droit commun du contrat du travail le cas échéant.
Aussi la rupture du contrat d’apprentissage échappe-t-elle bien entendu au droit commun du licenciement.
Il convient tout d’abord d’évoquer rapidement le refus d’enregistrement du contrat d’apprentissage, qui s’il n’est pas un mode de rupture du contrat d’apprentissage, y met néanmoins, du moins dans la pratique, fin.
Le refus d’enregistrement du contrat d’apprentissage
Il résulte des dispositions de l’article L. 6224-1 du Code du travail, que le contrat d’apprentissage revêtu de la signature de l’employeur, de l’apprenti et, s’il est incapable, de son représentant légal, est adressé pour enregistrement à la chambre consulaire dont relève l’entreprise. Sous réserve des dispositions de l’article L. 6224-7 de ce code, le refus d’enregistrement du contrat d’apprentissage fait obstacle, en application de l’article L. 6224-3 du même code, à ce que le contrat reçoive ou continue de recevoir application. Tel est le principe dont font application les juges du fond parisiens, dans un arrêt du 4 décembre 2008 Cour d’Appel de Paris, 18ème chambre 4 décembre 2008, n° 07-01.291.
« En l’espèce, si la société verse aux débats un contrat d’apprentissage signé entre les parties, force est, toutefois, de constater que, s’il porte le tampon de la Chambre des métiers de Paris, il ne porte aucune trace d’un quelconque enregistrement. Il s’ensuit que ce contrat d’apprentissage était, en tant que tel nul, et ne pouvait ni recevoir exécution, ni être requalifié. Dans une telle hypothèse, le jeune travailleur peut prétendre au paiement des salaires de la période travaillée sur la base du SMIC ou du salaire minimum conventionnel, ainsi qu’à l’indemnisation du préjudice résultant de la rupture des relations de travail »
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En d’autres termes il convient de faire preuve de prudence et de bien vérifier que le contrat d’apprentissage a bien été enregistré, dès lors que les conséquences peuvent financièrement être désastreuses.
La résiliation du contrat d’apprentissage pendant les deux premiers mois.
L’article L6222-18, du Code du travail, en vigueur depuis le 1er juillet 2014 dispose que
« Durant les deux premiers mois de l’apprentissage, considérés comme période d’essai, le contrat peut être rompu par l’employeur ou par l’apprenti. La résiliation pendant les deux premiers mois de son exécution doit être constatée par écrit et notifiée.
Durant les deux premiers mois d’apprentissage, la résiliation du contrat d’apprentissage peut intervenir à l’initiative de l’une ou l’autre des parties. »
Bien entendu lorsqu’une telle rupture a lieu, il n’y a pas lieu à indemnités.
« La rupture pendant les deux premiers mois d’apprentissage ne peut donner lieu à indemnité à moins d’une stipulation contraire dans le contrat. »
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Il faut cependant souligner que le délai de deux mois prévu par l’article L. 6222-18 du Code du travail est suspendu pendant les périodes d’absence pour maladie de l’apprenti.
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Par contre, lorsque pour une raison ou une autre, l’apprentissage doit se poursuivre avec un nouvel employeur, ce dernier ne peut se prévaloir de la période de deux mois pour résilier le contrat d’apprentissage.
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Par contre, la rupture unilatérale par l’employeur du contrat d’apprentissage, dans les deux premiers mois, doit, pour être valable, être portée par écrit à la connaissance de l’apprenti.
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Bien que la rupture puisse se faire de façon unilatérale par chaque partie, elle peut néanmoins être jugée comme fautive.
Les juges ont condamné un employeur qui avait exercé des violences sur un apprenti, à le dédommager, la rupture du contrat lui étant imputable.
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La rupture du contrat d’apprentissage au-delà des deux premiers mois.
Il faut avant tout relever que la loi n°2014-288 du 5 mars 2014 apporte une réforme importante en matière de résiliation du contrat d’apprentissage, en ce qu’il permet d’obtenir rapidement une décision en matière de rupture du contrat d’apprentissage, dès lors que la loi donne compétence au Conseil des Prud’hommes mais en statuant en la forme des référés.
Au-delà de la période d’essai de deux mois, le contrat d’apprentissage se poursuit, sauf dans de rares cas, jusqu’à son terme.
En somme, selon l’article L.6222-18 du Code du travail, passé ce délai, la rupture du contrat, pendant le cycle de formation, ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties. A défaut, la rupture du contrat conclu pour une durée limitée ou, pendant la période d’apprentissage, du contrat conclu pour une durée indéterminée, ne peut être prononcée que par le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, en cas de faute grave ou de manquements répétés de l’une des parties à ses obligations ou en raison de l’inaptitude de l’apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer.
L’article L6222-18 du code du travail et l’article L641-10 du code de commerce prévoient pour leur part qu’en cas de liquidation judiciaire sans maintien de l’activité ou lorsqu’il est mis fin au maintien de l’activité en application du dernier alinéa de l’article L. 641-10 du Code de commerce et qu’il doit être mis fin au contrat d’apprentissage, le liquidateur notifie la rupture du contrat à l’apprenti. Cette rupture ouvre droit pour l’apprenti à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat.
La démission.
L’apprenti ne peut démissionner pendant la durée de son apprentissage.
La démission d’un apprenti ne saurait être assimilée à l’accord exprès bilatéral. L’acceptation de la démission par l’employeur n’enlève rien au caractère unilatéral de la démission. L’apprenti peut obtenir réparation du préjudice résultant de la rupture.
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La Cour de cassation abonde dans ce sens, bien que dans une espèce un peu différente, en décidant qu’une démission de l’apprenti intervenue après les deux premiers mois d’apprentissage ne met pas fin au contrat. Il incombe aux juges du fonds de se prononcer sur la demande de résiliation judiciaire formulée par le mandataire liquidateur.
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La prise d’acte de rupture.
L’apprenti ne peut faire une prise d’acte de rupture dès lors que les modes de rupture du contrat d’apprentissage sont expressément prévus par la loi.
L’accord écrit signé des deux parties.
L’article L6222-18 du code du travail prévoit que la rupture du contrat d’apprentissage au-delà des deux premiers mois peut se faire par accord bilatéral.
L’accord des parties pour rompre le contrat de travail doit être bilatéral et doit être signé par les deux parties. La seule signature de l’employeur sur le document constatant la rupture ne suffit pas quand bien même le salarié aurait manifesté sa volonté de rompre.
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Il arrive parfois que l’apprenti estime qu’il n’a pas donné valablement son accord et estime avoir fait l’objet de pressions.
En pareil cas, il appartient au salarié d’apporter la preuve que son consentement a été vicié pour revenir sur l’accord écrit de rupture du contrat d’apprentissage qu’il a signé.
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La rupture du contrat d’apprentissage est nulle dès lors que le consentement de l’apprenti a été obtenu par le dol. L’employeur ne peut pas invoquer un motif économique pour éluder l’application de l’article L122-12 Al 2 du Code du travail.
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La résiliation pour faute grave ou manquements répétés de l’une des parties à ses obligations.
Il convient de rappeler que ce type de résiliation ne peut se faire qu’en présence d’une décision de justice conforme.
L’employeur ne peut de lui-même rompre un contrat d’apprentissage, même en cas de faute grave de l’apprenti. Il a cependant la possibilité, si la gravité des fautes commises le justifie, de prononcer une mise à pied en attendant une décision judiciaire.
[12]
L’employeur commet une faute légitimant la rupture du contrat d’apprentissage lorsqu’il emploie l’apprenti à des tâches qui excèdent celles qu’il aurait dû accomplir.
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L’inexécution du contrat d’apprentissage du fait des absences répétées et injustifiées est constitutive d’une faute grave devant entraîner la résiliation judiciaire du contrat de travail.
[14]
Le fait pour l’apprenti de refuser les instructions de l’employeur à plusieurs reprises, de cesser le travail et d’abandonner ses cours justifie la rupture du contrat d’apprentissage.
[15]
Le fait pour l’apprenti d’échouer à son examen de première année alors qu’il n’est pas autorisé à redoubler justifie la rupture du contrat d’apprentissage.
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L’incapacité de l’apprenti à exercer le métier ne caractérise pas une faute grave ou des manquements répétés à ses obligations dès lors que l’apprenti effectue chez l’employeur un stage de huit mois avant la conclusion du contrat d’apprentissage.
[17]
Le fait d’enfermer volontairement un apprenti dans un réfrigérateur, même dégivré, et pour un bref laps de temps, constitue une voie de fait rendant la rupture du contrat d’apprentissage imputable à l’employeur.
[18]
La démission de l’apprenti doit être requalifiée en rupture imputable à l’employeur dès lors que ce dernier a commis des manquements tels qu’ils ont compromis la formation de l’apprenti.
[19]
L’apprenti ne peut invoquer une modification de son contrat alors que le changement d’affectation se situe dans la même sphère géographique et qu’il n’établit pas qu’il lui est impossible de se rendre sur son nouveau lieu de travail.
[20]
Le juge qui prononce la résiliation du contrat d’apprentissage aux torts de l’employeur doit le condamner à payer une indemnité réparant le préjudice subi par l’apprenti du fait de la rupture anticipée du contrat.
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Enfin, il convient de souligner que lorsque le contrat d’apprentissage est nul, il ne saurait être ni exécuté ni requalifié
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Discussion en cours :
Y-a-t’il un préavis pour une rupture de contrat d’apprentissage par accord des dex parties ?