Rappel à la Loi et affaires familiales, attention danger ! Par Brigitte Bogucki, Avocat.

Rappel à la Loi et affaires familiales, attention danger !

Par Brigitte Bogucki, Avocat.

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Explorer : # rappel à la loi # affaires familiales # reconnaissance de culpabilité # conséquences juridiques

Le rappel à la Loi est une alternative aux poursuites pénales qui peut apparaître dans d’autres situations comme une solution simple, rapide et de peu de conséquences est au contraire dans les affaires familiales très dangereux.

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L’article 41-1 du code de procédure pénale prévoit le rappel à la Loi, solution alternative aux poursuites pénales, présentée comme favorable au contrevenant et permettant de lui donner une chance de ne pas réitérer l’infraction ainsi la circulaire du 16 mars 2004 relative à la politique pénale en matière de réponses alternatives aux poursuites précise qu’il consiste "dans le cadre d’un entretien solennel, à signifier à l’auteur la règle de droit, la peine prévue et les risques de sanction encourus en cas de réitération des faits. Il doit favoriser une prise de conscience chez l’auteur des conséquences de son acte, pour la société, la victime et pour lui-même sans se réduire à de simples considérations morales"

Légalement la conséquence du rappel à la Loi est le classement sans suite de la plainte, sans aucune inscription au casier judiciaire.

Il ne peut avoir lieu que s’il est accepté par la personne poursuivie.

Le rappel à la loi est une reconnaissance des faits, qui ne peut faire l’objet d’aucune contestation ultérieure ni d’aucun recours.

C’est le Procureur ou son délégué, et souvent un officier de police judiciaire au sein même du commissariat ou de la gendarmerie (sur ordre du Procureur) qui propose ce rappel à la Loi.

Par principe le rappel à la Loi prévoit que sont rappelés à l’auteur des faits à la fois l’infraction et les conséquences pénales que la Loi y attache donc les risques potentiels en cas de procédure devant le tribunal correctionnel.

En pratique, ce sont souvent des primo-délinquants, qui n’ont absolument pas l’habitude de commettre des infractions et qui, souvent dans les affaires familiales nient les faits qui leurs sont reprochés.

Cette mesure a les faveurs des Procureurs car elle désengorge les tribunaux de très nombreuses "petites" infractions. De ce fait, la pression morale mise sur le justiciable pour qu’il accepte de signer le rappel à la Loi est forte et l’explication qui lui en est donnée est pour le moins parcellaire car il n’en saisit pas toujours les implications.

Il est en effet fréquent que la proposition soit faite ex-abrupto, sans que la personne concernée ait pu se concerter avec son avocat.

Selon ce que me racontent mes clients de façon récurrente, la chose est souvent présentée de façon simpliste en indiquant que les faits semblent établis, que si l’affaire va devant le tribunal il va y avoir condamnation donc casier judiciaire et risque de telle et telle peine, que c’est un gros risque alors qu’en signant le rappel à la Loi, tout est terminé et l’affaire sera classée...

Face à une telle présentation, le justiciable peu habitué a tendance à accepter de signer pour éviter tout risque... mal lui en prend car en droit de la famille tout particulièrement les conséquences peuvent être très lourdes.

En effet le rappel à la Loi est une reconnaissance de culpabilité. Autrement dit, en signant ce document l’auteur présumé devient auteur des faits et ce définitivement.

Prenons un cas malheureusement classique de violences conjugales dans une période de séparation du couple ou les relations sont particulièrement tendues. Les conjoints se disputent, le ton monte, une bousculade s’ensuit. L’un des deux file au commissariat, porte plainte, fait faire un certificat médical. L’autre non, ce qui est très courant. La police le convoque, il reconnait les faits mais explique que c’était réciproque. Peu importe, les faits étant reconnus, on lui propose un rappel à la Loi. Il accepte trouvant cela assez logique.

Sauf que...

En faisant cela il reconnaît avoir été un conjoint violent, l’autre s’en empare et toutes les procédures concernant la résidence, le divorce (s’ils sont mariés) et les enfants, va tourner autour de cette violence reconnue. Notre conjoint pourra toujours pleurer que c’était réciproque, il n’aura aucune preuve et ne sera pas entendu.
Cela peut aller très loin, il peut dans le cadre d’une ordonnance de protection être obligé de quitter son logement, son lien aux enfants peut être limité, un divorce aux torts peut être prononcé... et pendant des années cela peut le suivre...
Malheureusement lorsqu’il a signé le rappel à la Loi notre conjoint n’était absolument pas conscient de cela et il ne peut plus rien faire...

Voilà pourquoi il convient d’être particulièrement attentif avant d’accepter un quelconque rappel à la Loi et qu’il est préférable de demander à consulter son avocat avant de donner une réponse.

Me Brigitte BOGUCKI, spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, Professionnel collaboratif
Avocat à Paris et Lille http://www.adr-avocats.com

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Discussions en cours :

  • par Kroukopf , Le 13 avril 2023 à 01:06

    Merci pour vos précisions et attentions, toutoutefois dans mon cas, j ai dû payer 400eus + 31eus pour quitter le tribunal .
    Mon questionnement est donc le suivant :
    Etait il déjà normal de me garder après signature de ma fin de garde à vue au dessein de me déférer près du tribunal où ma plaidoirie personnelle s est vue troquée par ce reglement ?
    Dans l espoir que vous ayiez le temps de me répondre, encore merci pour la présence de votre site ,cordialement Dory

  • Dernière réponse : 7 janvier 2020 à 01:34
    par Mohammed , Le 24 octobre 2019 à 11:52

    Je suis tombé sur le même piège, en effet j’ai signé un rappel à la loi, et mon ex épouse aussi, suite à une dispute conjugal en 2016, et par conséquence ; je me suis vu ajournée ma demande de naturalisation de 2 ans, 4 ans après les faits (2019).

    Au fait, je n’ai pas été capable de prouvé que mon ex-épouse aussi à eu un rappel à la loi, pour prouver que c’était une dispute (pas vraiment violente) isolé et non pas une violence conjugal gratuite de ma part.

    Je vous remercie pour votre article, ça aidera beaucoup de gens à ne pas faire la même erreur que moi.

    • par Gabriel , Le 7 janvier 2020 à 01:34

      Bonjour Mohammed,
      Je suis convoqué pour signer demain devant un délégué du procureur suite à une plainte de ma femme.
      Je ne sais pas s’il faudrait que je signe.
      Surtout que j’ai un dossier de naturalisation à déposer aussi après
      Merci pour le conseil.
      Gabriel

  • par Philippe Maurin , Le 27 novembre 2019 à 14:27

    Excellent article merci Maître.
    Me concernant cela a encore été plus expéditif : sans même me demander si je reconnaissais l’infraction (violences conjugales "plus que moins que" légères et en tout cas réciproques) après 15 minutes de pseudo audition, on m’a fait signer une mesure de composition pénale sinon c’était le tribunal direct me menaçait-on...
    Comme un imbécile j’ai signé et suis devenu de facto un mari violent pour la justice sans jamais avoir été écouté avec de plus zéro jours d’ITT alloué à la "victime" et retrait de la plainte de la "victime’ non prise en compte. C’est cela la justice ? -
    En tout cas pas le temps de voir un avocat en 15 minutes d’audition sans même mesure de garde à vue alors que les flics étaient tout fiers d’avoir résolu un beau délit ! Quelle honte !

  • Dernière réponse : 27 octobre 2019 à 10:59
    par Bernard , Le 21 juin 2019 à 21:40

    En lisant votre article, on comprend que la personne qui fait l’objet d’un rappel à la loi reconnaît au moins implicitement sa culpabilité.
    Ce n’est pas le cas. La cour de cassation l’a rappelé dans un arrêt de la Chambre criminelle du 6 décembre 2011 (N°pourvoi : 11-80419). Voici l’attendu de principe : "c’est à tort que la chambre de l’instruction a énoncé que le rappel à la loi impliquait la constitution d’un délit, alors que cette mesure prise par une autorité de poursuite, n’établit pas la culpabilité de la personne suspectée ou poursuivie".
    Depuis, la Cour de cassation a toujours confirmé cet arrêt (ex : arrêt de la 2ème chambre civile de la cour de cassation en date du 20/09/2018 - n°pourvoi:17-11322).
    Pour reprendre l’exemple que vous prenez des violences conjugales, si un Juge aux affaires familiales estime que ces violences sont caractérisées par l’existence d’un rappel à la loi ordonné par le Procureur, il faut contester ce jugement car c’est juridiquement faux.
    Le rappel à la loi est une mesure décidée par le Procureur qui n’équivaut pas à une reconnaissance de culpabilité.

    • par Me BOGUCKI , Le 22 juin 2019 à 12:14

      Cher Monsieur,

      La décision de la Cour de Cassation que vous citez m’est parfaitement connue (je me permets de vous rappeler que je suis ... avocate et spécialiste de ma matière et c’est une jurisprudence que je joins régulièrement à mes dossiers...) mais il n’en demeure pas moins que si un tel document ne saurait fonder une condamnation pénale, il y a dans les termes du rappel à la loi une reconnaissance sous-jacente des faits qui a dans la réalité un effet dévastateur non seulement sur le Juge mais sur les parties qui en usent et abusent au quotidien.
      En outre, il est bien "facile" de dire qu’il faut dans ce cas contester le jugement, vous semblez ignorer le coût et la durée des procédures d’appel et de cassation qui se comptent en années... Or en droit de la famille, l’exécution provisoire est la règle...
      Je maintiens donc qu’il est déraisonnable de l’accepter lorsque l’on conteste les faits.

    • par stephane , Le 27 octobre 2019 à 10:59

      Bonjour la semaine dernière, j ’ai refusé de signer un rappel a la loi car je conteste les faits pour de soi disant appels malveillants du nombre de 5.
      Le procureur a été alerté et cela fait 2 fois que la police me relance pour signer ce document.

      Quand j’évoque le fait de prendre un avocat on me met la pression pour signer vite sinon c’est le tribunal me dit on, qui va s’occuper de moi.

      De plus les faits reprochés sont supérieur à 3 mois.

      Avait on le droit de m auditionner ?

      C’est affligeant.

      Que dois je faire ?

      Comment accepter de signer des choses non commises.
      Il n y aura pas de preuves car les choses que le m on reproches n ’existent pas .

      Merci de vos réponses.

  • le tres dangeureux "rappel a la loi" qui n’argue pas de l’autorité de la chose jugée pourtant !

    • par Merah , Le 22 octobre 2019 à 16:11

      Je témoigne car lorsque le procureur m a demandé de signer le rappel à la loi cela vous lait juste dire que je serais de prison. Le procureur le breton de Bobigny ne m’a jamais dit qu’il s’agissait d’une reconnaissance des faits .! D’ailleurs je devais voir un avocat et je n’ai pas vu un avocat ! J’ai pourtant présente 2 preuves au procureur qui contredis sait les faits mais elle n’en a pas tenu compte et elle n’a rien voulu savoir . Un état psychatrique sur ma fragilité émotionnellea bien ete établie . Ma question
      Un procureur a t il le droit de présenter un document sans explication à une personne qui présente une fragilité en l absence de son avocat ?

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