Quelle justice pour les atrocités commises en RDC de 1996 à 2003 ?

Par Willy Tshibombi.

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Explorer : # impunité # crimes de guerre # justice pénale internationale # droits de l'homme

Ce que vous allez lire ici :

Les atrocités commises en République démocratique du Congo (RDC) de 1996 à 2003 n'ont pas été jugées et les auteurs n'ont pas été sanctionnés, privant ainsi les victimes de justice et de réparation. La faiblesse du système judiciaire congolais, le manque de fonctionnement de la commission vérité et réconciliation et les limites de la Cour pénale internationale (CPI) sont les principales causes de cette impunité.
Description rédigée par l'IA du Village

Les guerres successives qui ont ravagé la RDC de 1996 à 2003 ont donné lieu à une grande brutalité sans mesure.
Les atrocités commises sont finalement définies en 2003 par le Statut de Rome de la Cour Pénale Internationale (CPI), mais elles sont restées impunies à cause de son incompétence temporelle et des insuffisances du système judiciaire national congolais.

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Par ailleurs, depuis sa création, l’ONU s’est engagée à assurer la promotion des droits de l’homme dans sa mission de maintien de la paix et de la sécurité internationale. La RDC étant membre de l’ONU, cet engagement de politique international devrait l’interpeller pour prendre le relais et rendre justice.

Malheureusement, il n’existe aucun mécanisme de sanction efficace pour répondre au besoin de rendre justice aux victimes de ces atrocités durant la période considérée.

En même temps, nous devons reconnaître que le droit pénal international est un régime juridique crucial dans la lutte contre l’impunité des auteurs de violations graves et de crimes internationaux.

Cette analyse a donc pour objectif d’apporter une contribution à la lutte contre l’impunité au regard des récentes évolutions de la doctrine pénale internationale. Elle s’inscrit ainsi dans le courant de pensée qui prône l’institution d’un mécanisme permanent de justice pénale internationale.

1. La représentation géographique de la RD Congo.

Située au centre de l’Afrique, la République Démocratique du Congo constitue presque un sous-continent, avec ses 2.345.000 kilomètres carrés et une population estimée à 62 millions en 2007. Actuellement, en 2023, elle est estimée à 102 millions d’habitants.

L’article 2 de sa Constitution stipule :

« La République Démocratique du Congo est composée de la ville de Kinshasa et de 25 provinces dotées de la personnalité juridique ».

Les 11 provinces de l’époque font donc place à 26 “provincettes” autonomes. Il y a donc un président et des représentants librement élus aux niveaux nationaux, provincial et local. Ce découpage est effectif depuis 2015.

2. Brève historique de la crise politique congolaise : de 1996 à 2003.

En 1994, lors du génocide rwandais, de nombreux tutsis ainsi que hutus viennent se réfugier dans l’est de la RDC en aggravant la situation sociopolitique et socioéconomique de la région.

En 1996, une opposition politico-militaire née à l’est du pays, l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL), dirigé par Laurent Désiré Kabila et appuyée par l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi et l’Angola renverse le Maréchal Mobutu et prend le pouvoir.

Pour mener ses opérations, Laurent Désiré Kabila était accompagné de son fils Joseph Kabila, officier militaire à l’époque et par d’autres hommes de troupe. Aussitôt, une série des groupes rebelles se forment et prennent le contrôle de différentes régions du pays, notamment à l’Est.

Il s’agit du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), composé de refugiés tutsis et de soldats congolais démobilisés, soutenu militairement par le Rwanda et l’Ouganda, ensuite du Mouvement de Libération du Congo (MLC) dirigé par monsieur Jean Pierre Bemba et soutenu par l’Ouganda.

En 1999, les belligérants signent à Lusaka un accord de cessez le feu qui conduit les forces étrangères sur le territoire de la RDC à s’engager à retirer leurs troupes.

Dans le but de maintenir une liaison sur le terrain avec toutes les parties, le Conseil de Sécurité de l’ONU a créé la MONUC en novembre 1999. Sa mission consistait à accompagner la RDC dans cette transition pour la conduire aux élections.

Le mandat de la MONUC est placé sous le Chapitre VII de la Charte de l’ONU. Il l’autorise à utiliser tous les moyens nécessaires, dans la limite de ses moyens.

En janvier 2001, le Président Laurent Désiré Kabila est assassiné et son fils Joseph Kabila lui succède.

Ensuite, l’accord de Lusaka est complété par l’Accord Global Inclusif (AGI) à Sun city (Afrique du Sud) en 2003, pour mettre en place un Gouvernement de Transition et organiser les élections.

3. Les conséquences du conflit.

Ce conflit qui a duré presque 10 ans a fait quasiment quatre millions de morts. 10.000 femmes et fillettes auraient été violées par les combattants, tous les groupes ont recruté des enfants pour le service militaire, certains d’entre eux n’ayant pas plus de 7 ans et les ont exposés aux risques et traumatismes des opérations militaires.

De 1999 à 2004, le District de l’Ituri, a connu une « guerre tribale » opposant Lendu et Hema, avec l’appui et l’interférence de forces étrangères plus ou moins visibles (le Rwanda et l’Ouganda). Ressemblant plus à un « système de guerres », ce conflit a fait environ 50 000 morts, soit deux fois le nombre de déplacés et occasionné l’incendie de cases des villages entiers de part et d’autre.

4. L’état de lieu des droits de l’homme.

Dans ce contexte de guerres successives, des villages entiers ont été incendiés, poussant la population civile à se réfugier dans la foret sans moyens de subsistance.
Les groupes armés ont eu recours au travail forcé et ont procédé à des exécutions extrajudiciaires. Certains états (Rwanda et Ouganda) voisins au Congo ont déployé et maintenu leurs forces armées en territoire congolais durant plusieurs années sans le consentement du gouvernement central. Cet acte a été considéré par le Conseil de sécurité de l’ONU comme une violation de souveraineté de la RDC et infraction manifeste de droit international.

Dans ces conflits, tous les groupes armés se sont servis de VIOL comme arme de guerre pour générer la terreur. Ces violences ont pris de formes multiples, dont l’esclavage sexuel, les mutilations génitales, et le viol collectif. Les recettes générées dans l’exploitation illégale de ressources naturelles n’ont pas servi à la population.

Tous les mouvements rebelles ont obligé les enfants à servir dans leurs milices d’autodéfense censés patrouiller dans des villages, pour ensuite les envoyer au front.

À ces drames s’ajoutent le trafic d’armes auquel se sont adonnées toutes les branches armées appartenant aux troupes régulières et aux milices privées.

Tels que définis par différents instruments juridiques, tous ces actes constituent des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis à l’égard des victimes.

S’agissant de l’exploitation des ressources naturelles, dans la résolution 626, les éléments du principe se clarifient : « le droit des peuples d’utiliser et d’exploiter librement leurs richesses et leurs ressources naturelles est inhérent à leur souveraineté et conforme aux buts et principes de la Charte des Nations Unies ». Un aspect important de cette résolution réside dans la recommandation « à tous les États membres de s’abstenir de tout acte, direct ou indirect, destiné à empêcher un État quelconque d’exercer sa souveraineté sur ses ressources naturelles ».

5. Les structure judiciaires et mécanismes de sanction.

La Constitution de la RDC prescrit que les traités internationaux ont dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois (art 215), et que les cours et tribunaux, civils et militaires, appliquent les traités internationaux dûment ratifiés (art 153).

Pour se conformer à cette exigence, la RDC a ratifié les principaux traités internationaux relatifs aux droits de l’homme.

Pour le fonctionnement de ses institutions, il existe une structure des cours et tribunaux nationaux organisés en pouvoir judiciaire par la Constitution et toutes les conventions internationales en matières de droit de l’homme tels que ratifiées par la RDC.

Comme les tribunaux ordinaires, les juridictions militaires font partie de l’ordre de juridictions de l’ordre judiciaire et sont régies par les même principe de l’indépendance du pouvoir judiciaire.

Dans le cadre du consensus convenu au dialogue inter congolais, il a été préconisé la commission vérité et réconciliation (CVR) au modèle du système sud-africain.

Son objectif premier était d’établir la responsabilité des crimes les plus saillants qui ont marqué l’histoire de la RDC, non pas dans la perspective de châtier les coupables, mais que ces derniers demandent pardon aux victimes et à leurs proches. Mais, malheureusement cet organe n’a jamais fonctionné comme prévu par le texte.

Pour sa matérialisation, la loi no /04/018 du 30 juillet 2004 portant organisation, attribution et fonctionnement de la Commission Vérité et Réconciliation a été adoptée, dont les dispositions suivantes :

« Article 6 : La compétence de la Commission Vérité et Réconciliation s’exerce à l’égard de tous les Congolais, y compris l’État congolais, les militaires, les policiers, les agents de sécurité ainsi que les personnes jouissant des immunités de poursuite ou des privilèges de juridiction.
Les crimes politiques et les violations des droits de l’homme commis en dehors du territoire national mais en relation avec les conflits politiques de la République Démocratique du Congo relèvent aussi de la Commission Vérité et Réconciliation.
La Commission Vérité et Réconciliation connaît des événements survenus ainsi que des crimes et violations des droits de l’homme perpétrés au cours de la période allant du 30 juin 1960 jusqu’à la fin de la transition.
Cette période est subdivisée en deux :
a) La première allant de 1960 à 1992, à l’examen de laquelle elle actualise et complète les dossiers de la Conférence Nationale Congolaise et se laisse saisir de toute requête individuelle ou collective des victimes ;
b) La seconde allant de 1963 à la fin de la transition pour laquelle elle se saisit ou est saisie
 ».

6. Le rapport et constat des travaux.

Suivant les rapports de différents organismes voués à la défense de droits de l’homme, les graves crimes commis en RDC pendant une décennie de guerre, qui aurait causé près de 4 millions de morts entre 1993 et 2003 n’ont pas été jugés.

Certains responsables de services publics nommés au sein du gouvernement ont été accusés d’implication dans des graves atteintes aux droits humains.

Justice n’a pas été rendue pour les victimes qui n’ont pas pu connaître la vérité, n’ont pas pu voir leurs bourreaux sanctionnés et n’ont pas reçu de réparation.

S’agissant de crimes graves et à grande échelle, la société ne peut pas consolider la paix dans la période qui suit la fin d’un conflit et la préserver durablement en construisant une démocratie sur des bases solides si les responsables ne sont pas poursuivis et sanctionnés.

Dans ces conditions, il était toutes fois primordial qu’au moins ceux qui portent les plus lourdes responsabilités, pour avoir planifié, dirigé et ordonné ces crimes, soient sanctionnés.

Il ya donc lieu de connaître les raisons qui ont été à la base de cette inaction qui se traduit en forme d’impunité.

7. Les causes de l’impunité.

Au niveau national.

Le système judiciaire congolais était confronté à plusieurs obstacles qui réduisent sa capacité à poursuivre les auteurs des graves violations des droits de l’ homme.

Après l’indépendance le Congo n’avait aucun juriste.

  • Jusqu’en 1998, la RDC avait 1 500 magistrats dont 70% s étaient concentrés dans de grandes villes pour une population de plus de 65 millions d’habitants.
  • Au delà du nombre minime des magistrats, il y a quelques années, l’état n’allouait à ce secteur que 02% de son budget.
    Les tribunaux manquaient de tout : fournitures de bureau, salles d’audience,...les magistrats sont mal rémunérés et ne touchent pas régulièrement leurs salaires.
  • Du reste, le principe de la séparation de pouvoirs bien que reconnu par la constitution, n’avait jamais été appliqué étant donné que le Président de la République avait un pouvoir sur le Conseil Supérieur de la Magistrature, et il profitait de ce pouvoir pour évincer les magistrats qui étaient hostiles au gouvernement.
    Cela pose un grave problème de l’indépendance de la magistrature et cela conforte l’idée selon laquelle le système judiciaire congolais était essentiellement au service de l’exécutif.
  • L’un des obstacles rencontrés est l’adoption de la loi d’amnistie prise en 2005 pour des faits de guerre et infractions politiques et infractions d’opinion. Cette loi définit en son article 02 que les faits de guerre sont des actes inhérents aux opérations militaires autorisées par les lois et coutumes de guerre qui, à l’occasion de la guerre ont causé un dommage à autrui.

Suite à une mauvaise interprétation de cette loi, un auteur de crimes de guerre a été acquitté par la justice congolaise, tel le cas de Yves Mandro Kawa qui a condamné successivement par le Tribunal de Grande Instance de Bunia, le Tribunal militaire de Garnison de Bunia, mais acquitté par la Cour d’Appel de Kisangani en soutenant que toutes les infractions mises à sa charge étaient couvertes par la loi d’amnistie de Décembre 2005 pour faits de guerre commis entre août 1996 et juin 2003.

Son mouvement « parti pour l’unité et la sauvegarde de l’intégrité du Congo » est créé en février 2003 et appuyé par Thomas Lubanga déjà poursuivi devant la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Ce mouvement a été responsable de la déstabilisation du district de l’Ituri, Nord-Kivu qu’il contrôlait en 2003.

Cette décision de la cour constitue une malheureuse jurisprudence dans le fonctionnement de la justice congolaise et entretient par conséquent l’impunité à l’égard des auteurs des crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Cela s’explique :

  • Le droit pénal congolais ne reconnait pas les crimes de guerre, le crime de génocide ou crimes contre l’humanité.
  • Le Code pénal militaire, quant à lui, contient des définitions de ces infractions,mais qui ne correspond pas à celle prévue par le Statut de Rome.

Cependant, même quand le droit interne congolais sera conforme aux engagements découlant de la ratification du Statut de Rome, la Cour Pénale Internationale (CPI) ne sera pas compétent pour juger les auteurs de crimes commis avant l’entée en vigueur du statut de Rome, soit en juillet 2002. Or, comme la plupart des crimes de guerre commis en RDC l’ont été avant cette date, qui correspond à la phase finale des pourparlers qui ont mené à l’adoption de l’AG, la saisine de la CPI n’a pu étancher que partiellement la soif de justice du peuple congolais.

Selon les statistiques obtenues par la Division des Droits de l’Homme de la MONUC, en RDC, les violations graves de droits de l’homme sont, dans 86%, commises par des policiers et militaires des forces armées de la RDC (FARDC) et jugées par la justice militaire.

Il s’agit d’une violation des normes internationales pertinentes qui requièrent que les violations graves de droits de l’homme commises par les militaires soient jugées par des tribunaux ordinaires et non militaires, car la justice militaire ne fournit pas de garanties nécessaires, notamment en matière d’indépendance et de compétence.

La grande majorité de violations des droits de l’homme étant commises par les forces armées et la police, leur jugement est du ressort des tribunaux militaires.

Cependant, conformément aux normes internationales en matière de droits de l’homme, les violations de droits de l’homme commises par les militaires, ainsi que le jugement des civils, doivent être du ressort de la justice civile et non militaire. Ceci est d’autant plus important que le manque d’indépendance affecte tout particulièrement la justice militaire, soumise aux pressions et ingérences de la hiérarchie militaire qui se traduisent souvent par le refus des commandants d’amener leurs hommes devant les juges militaires, ainsi que par des blocages de procès et de transferts de magistrats dans des procès sensibles.

En raison de la dimension transnationale du conflit congolais, de l’ampleur des atrocités commises, des difficultés logistiques que suppose aussi l’enquête dans un territoire aussi immense, et de la possibilité que certains accusés ne soient pas des ressortissants de la RDC, on imagine mal les seuls congolais capables de prendre en main une tache aussi colossale dans cet état de choses.

D’après certaines réflexions, il a déjà été proposé la création d’un modèle de tribunal pénal international comme celui du Rwanda (TPIR) basé à Arusha.

Les promoteurs de la formule soulignent qu’un organe de cette nature offre de nombreux avantages : il fait disparaître l’impression d’une justice des vainqueurs, favorise l’équité et impartialité de procès.

Pour d’autres penseurs, cette formule semble exclure toute participation congolaise, sans tenir compte de réalité nationale.

En tout état de cause, le Gouvernement de Transition Congolais avait à des nombreuses reprises aux Nations Unies de l’aider à mettre sur pied un Tribunal International, mais qui n’a jamais été installé.

Au niveau international.

Au niveau de la sous-région (Afrique), il existe : la Cour africaine des droits de l’homme.

Le protocole portant création de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) devrait entrer en vigueur le 25 janvier 2004.

Le 26 décembre 2003, le seuil des 15 ratifications nécessaires à l’entrée en vigueur de la cour a été atteint avec la ratification du Protocole additionnel relatif à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples par l’Union des Comores. Les quatorze autres Etats africains qui ont ratifié le Protocole sont : l’Afrique du sud, l’Algérie, le Burkina Faso, le Burundi, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Lesotho, la Libye, le Mali, l’Ile Maurice, l’Ouganda le Rwanda, le Sénégal et le Togo.

Cette instance, dont le siège sera à Arusha, Tanzanie, composée de 16 juges, sera chargée à travers ses deux sections de connaître à la fois des différends portant sur l’application de l’Acte constitutif et autres traités de l’UA, des actes, décisions, règlements et directives des organes de l’UA, de toute question juridique, mais aussi de toute affaire concernant la violation par un Etat partie des droits garantis par la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples, la Charte africaine du bien-être et des droits de l’enfant, le Protocole sur les droits des femmes en Afrique et de tous les droits garantis par tous les autres instruments de protection des droits de l’Homme.

« L’adoption de cet instrument semble être une étape essentielle pour la lutte contre l’impunité sur le continent africain, un pas important vers la prévention et la répression des violations des droits de l’Homme en Afrique ».

Cependant, le Statut de la nouvelle Cour africaine de justice et des droits de l’Homme, n’autorise les ONG et les individus à saisir directement la cour que moyennant autorisation préalable des Etats. Cette condition restreint considérablement la portée de la protection accordée et empêche de lutter efficacement contre l’impunité sur le continent africain.

Sous cette condition il est regrettable et prévisible que cette cour ait une compétence limitée et que son indépendance ne soit pas assurée.

La mise en place de la nouvelle cour, dont le Statut entrera en vigueur après le dépôt du quinzième instrument de ratification par un Etat, la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples sera compétente pour connaître des violations des droits de l’Homme commises par un Etat partie. Celle-ci n’est pourtant toujours pas opérationnelle, principalement du fait de l’absence de budget adéquat pour son fonctionnement.

La Commission africaine des droits de l’homme.

Créée en 1981 par l’Organisation de l’Unité Africaine et installée en novembre 1987 à Adis Abeba (Éthiopie), cette commission est un organe de promotion et de protection des droits exprimés dans la Charte africaine des droits de l’homme. Elle est chargée de veiller au respect des droits et normes prévues dans la charte africaine de droits de l’homme.

Le mandat de la Commission.

Outre l’exécution de toutes autres tâches qui peuvent lui être confiées par la Conférence des Chefs d’État et de gouvernement, la Commission est officiellement chargée des trois principales missions ci-après :
1. La protection des droits de l’homme et des peuples
2. La promotion des droits de l’homme et des peuples
3. L’interprétation de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Dans le cadre de sa mission de promotion, la Commission exerce, entre autres, les fonctions suivantes :

  • Collecter des documents, entreprendre des études et des recherches sur les problèmes africains dans le domaine des droits de l’homme et des peuples, organiser des séminaires, des colloques et des conférences, diffuser des informations, encourager les institutions nationales et locales concernées par les droits de l’homme et des peuples et, en cas de besoin, donner son point de vue et faire des recommandations aux gouvernements ;
  • Formuler et définir des règles et principes visant à résoudre les problèmes juridiques relatifs aux droits de l’homme et des peuples et aux libertés fondamentales sur lesquels les gouvernements africains peuvent fonder leur législation ;
  • Coopérer avec d’autres institutions africaines ou internationales concernées par la promotion et la protection des droits de l’homme et des peuples ;
  • Examiner les rapports périodiques des États sur les mesures législatives ou autres adoptées pour donner effet aux droits et libertés reconnus et garantis dans la Charte africaine.

Dans le cadre de sa mission de protection, la Commission est chargée de garantir la protection des droits de l’homme et des peuples selon les conditions définies par la Charte et conformément aux articles du Règlement intérieur de la Commission.

Dans le cadre de son rôle d’interprétation de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la Commission est chargée d’interpréter toutes les dispositions de la présente Charte, à la demande d’un État partie, d’une institution de l’Organisation de l’Unité africaine ou d’une organisation africaine reconnue par l’Organisation de l’Unité africaine devenue Union africaine.

Suivant analyse, bien qu’elle soit spécialisée en matière de droits de l’homme, cet organe est dépourvu des sanctions tant à l’égard des états que des personnes physiques violateurs de droits humains. Elle constitue juste un groupe de pression à l’égard des États.

Au niveau de l’Organisation des Nations Unies (l’ONU).

Parmi ses organes, la responsabilité principale du Conseil de Sécurité est d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationale.

Le chapitre VII de la Charte des Nations Unies confère au Conseil de Sécurité un pouvoir de décision.

Dans ses différentes résolutions, après enquête le Conseil de Sécurité de l’ONU s’est limité seulement à dresser la liste des personnes et entités visées par l’embargo sur le trafic d’armes, mais sans aucune mesure de contrainte, ni réparation pour les victimes des violences.

Cette inaction découle du fait que les sanctions prévues au niveau du Conseil de Sécurité sont de nature diplomatique et paraissent être symboliques.

Toutefois, il faut reconnaître que les sanctions en droit international sont moins efficaces que dans les systèmes nationaux dans la mesure où il n’existe pas de police internationale. Le respect et la mise en application des règles du droit international reflètent souvent la dure réalité de l’inégalité de pouvoir entre les Etats. Suivant certains analystes, plusieurs raisons semblent à la base de cette inefficacité :

L’interférence du politique dans la prise de décision.

L’inefficacité du pouvoir de sanction du Conseil de Sécurité est en grande partie déterminée en amont, au stade de la prise de décision. Il est donc intéressant tout d’abord de se pencher sur le processus subjectif de la décision au sein du Conseil, pour ensuite étudier l’échec des réformes envisagées pour y remédier.

La décision de sanctionner au sein du Conseil de Sécurité : un processus politisé.

La responsabilité principale du Conseil de Sécurité est d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationale. Il assure donc une fonction essentielle de l’Organisation des Nations Unies exprimée à l’Article 1§1 de la Charte relatif aux objectifs à poursuivre. Le chapitre VII de la Charte des Nations Unies confère au Conseil de Sécurité un pouvoir de décision obligatoire et exécutoire. Mais avant de pouvoir prononcer ces sanctions, l’article 39 de la Charte prévoit que le CS doit qualifier la situation c’est-à-dire qu’il lui faut évaluer s’il y a menace à la paix, rupture de la paix ou agression. Cette qualification revêt un caractère politique fort dans la mesure où il n’y pas de critère fixe. La pratique atteste de cette subjectivité du Conseil de Sécurité, notamment en ce qui concerne la menace à la paix.

Il s’agit d’une application de la sanction livrée à la bonne volonté des Etats.

Cela a entre autres causes :

  • L’absence d’une « police internationale » pour forcer un Etat à exécuter la sanction.
  • Le manque de crédit qui caractérise les sanctions et la réticence des Etats.

Le manque de crédibilité de l’ONU lié à la politisation du processus de sanction, ajouté à une absence de police internationale conduit souvent à un irrespect des sanctions par les Etats. Bien que ces sanctions soient obligatoires et exécutoires, il existe de nombreux exemples de violations de sanctions du Conseil. Le manque de volonté politique est flagrant. En effet, souvent, la critique est faite par les Etats de se voir imposer des sanctions par les superpuissances selon leurs propres intérêts, selon leurs propres idéaux. La justification de l’absence de respect trouve son origine dans le processus de décision. C’est une fois de plus ce veto des cinq membres qui remet en cause toute l’efficacité du système de sanction.

Au niveau de la Cour Pénale Internationale (CPI).

L’implication de la CPI n’a pu se faire sentir qu’après ratification du statut de Rome par la RDC le 11avril 2002.

Sa compétence est limitée dans le temps et cela ne permet pas de poursuivre les auteurs des crimes de guerre commis avant la mise en œuvre du Statut de Rome, ce en vertu de l’article 11 qui stipule :

« la cour n’a compétence qu’à l’égard des crimes relevant de sa compétence commis après l’entrée en vigueur du présent statut ».

Par ailleurs, même dans sa forme actuelle, pour engager des poursuites, le Procureur près la Cour Pénale Internationale opère de façon sélective quand bien même les auteurs des crimes de guerre sont connus. Les poursuites déclenchées par rapport aux crimes commis sont très moindres.

Conclusion.

La plupart des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis en RDC de 1996 à 2003 n’ont pas été jugés et leurs auteurs n’ont pas été sanctionnés, de façon à réparer le préjudice à l’endroit des victimes de ces actes.

Cet état de choses s’est justifié par :

  • La faiblesse de la justice congolaise due aux moyens maigres que lui accorde le pouvoir exécutif pour son fonctionnement et qui entraîne le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire,
  • Le manque de fonctionnement de la commission vérité et réconciliation suivant la mission qui lui était assignée,
  • L’incompétence de la CPI pour les crimes de guerre commis avant l’adoption du Statut de Rome qui la crée,
  • L’absence d’une structure judiciaire au niveau international, qui soit capable de juger toutes parties (étrangères )intervenues dans ces conflits,
    -* En raison du caractère transnational de ces conflits dans lesquels sont intervenues des troupes étrangères, le gouvernement de transition congolais avait à des nombreuses reprises demandé aux Nations Unies de l’aider à mettre sur pied un tribunal international, mais qui n’a jamais été installé.

Devant cette réalité triste, une question se pose : quel est le sort des victimes des violations des droits humains et crimes de guerre commis de 1996 à 2003, comme le veut la Déclaration Universelle des droits de l’homme ?

En guise de réponse, il n’existe aucun mécanisme efficace et permanent pour répondre au besoin de rendre justice aux victimes de ces atrocités durant la période considérée.

Willy Tshibombi
Consultant international

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