Le nom de domaine ou le territoire virtuel en droit marocain.

Par Ahmed Benattou.

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Explorer : # noms de domaine # droit marocain # protection juridique # cybercriminalité

Ce que vous allez lire ici :

Le nom de domaine est un territoire virtuel dont la nature juridique reste floue au Maroc. Il existe deux types de noms de domaine : génériques et territoriaux. La protection des noms de domaine au Maroc est confiée à l'Agence Nationale Réglementation des Télécommunications. Cependant, les noms de domaine peuvent être utilisés de manière abusive, ce qui pose des risques en matière de cybercriminalité.
Description rédigée par l'IA du Village

Initialement conçus pour permettre la connexion via Internet, les noms de domaine se sont convertis en des signes distinctifs utilisés par les entreprises, à l’instar du nom commercial et de l’enseigne, à des fins promotionnelles et publicitaires. Le nom de domaine est l’un des éléments indispensables qu’un cybercommerçant doit penser pour son site Web, pour pouvoir présenter sa boutique virtuelle. De la même manière qu’un nom permet à une personne d’être identifiée, le nom de domaine est important et déterminant pour l’identification de la boutique, permettant ainsi aux internautes de la reconnaitre sur Internet.

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La nature juridique du nom de domaine.

Sur le plan technique, le nom de domaine a pu rendre transparentes les frontières des espaces géographiques des Etats. Toutefois, ces frontières refont surface sous forme virtuelle par le biais des noms de domaine. La loi marocaine n’en donnant pas de définition, on peut emprunter la définition de la Cour d’appel de Paris comme

« un nom spécifique adopté par une entreprise pour désigner le service et le différencier d’autres services concurrents et permettre à la clientèle de l’identifier comme un signe distinctif ».

Les types de nom de domaine.

Il existe deux types de nom de domaine : le nom de domaine générique et le nom de domaine territorial.

Le premier se rapporte à un nom de domaine libre et sans restrictions géographiques tels que « point com » pour une entreprise, « point org » pour une association ou une organisation, ou encore « point net » pour un opérateur de services internet.

Le nom de domaine territorial, quant à lui, requiert que son titulaire soit établi sur le territoire ou pays concerné tels que « point fr » pour la France, « point de » pour l’Allemagne, « point uk » pour le Royaume-Uni, « point jp » pour le Japon ou encore « point ma » pour le Maroc.

En effet, chaque État possède un nom de domaine correspondant à son territoire et à ses limites géographiques. Il est, par ailleurs, important de noter que les ressortissants européens ont eu, depuis 2006, la possibilité de créer le nom de domaine « point eu » pour réitérer leur appartenance à l’Union Européenne, ce qui n’est pas- du moins pas encore - le cas de la communauté arabe.

Le domaine ".ma" constitue un domaine Internet de premier niveau spécifique à l’espace en ligne réservé au Royaume du Maroc. Sa protection repose sur des règles définies, visant principalement à encadrer l’enregistrement et l’utilisation des noms de domaine ".ma". Ces règles ont pour objectif de garantir la protection des droits des tiers dans cet environnement en ligne spécifique.

Interdiction du nom patronymique.

Au Maroc, il n’existe actuellement aucun texte de loi interdisant l’adoption du nom de famille d’une autre personne en tant que nom de domaine. Un nom de domaine ne doit, toutefois, pas porter atteinte à une marque déposée, en particulier lorsqu’elle jouit d’une notoriété, comme il ne doit pas porter atteinte à un nom patronymique ou à une dénomination sociale.

L’interdiction de l’enregistrement d’un nom patronymique dans ce cas sert à protéger tout nom patronymique, abstraction faite de la nationalité ou du domicile de son propriétaire. L’enregistrement d’un patronyme d’une personne célèbre peut engager la responsabilité civile du fautif.

Cependant, dans une affaire opposant la société Croizet, détentrice d’une marque française verbale baptisée "Croizet" déposée en 1987 et régulièrement renouvelée, à Monsieur Léopold Croizet issu d’une famille qui commercialise des alcools sous la désignation "Pierre Croizet", la justice française avait eu un avis différent.

En 2000, Croizet avait enregistré le nom de domaine "croizet.com" et avait par la suite créé la société Croizet Vins Spiritueux Cognac, rebaptisée Maison Pierre Croizet en 2011, puis La Maison des Pierres en 2017 après avoir reçu des mises en demeure de la part de la société Croizet. Parallèlement, Croizet avait déposé une demande de marque française "Pierre Croizet Cognac", qui avait été rejetée en raison d’une opposition formulée par la société Croizet.

En l’espèce, la société Croizet avait intenté une action en justice contre M. Léopold Croizet et la société La Maison des Pierres, notamment pour contrefaçon de marque et transfert de nom de domaine, devant le Tribunal de grande instance de Paris, avant que la Cour d’appel de Paris puis la Cour de cassation ne soient également saisies du litige.

Il a été par la suite établi par la Cour d’appel de Paris, que M. Léopold Croizet utilisait son nom de famille de manière légitime, en raison de l’ajout spontané du prénom "Pierre" à son nom de famille litigieux, et de l’incorporation fréquente d’un élément figuratif spécifique, éliminant ainsi tout risque de confusion avec la marque antérieure, et par conséquent avait rejeté l’action en contrefaçon du fait de l’usage du nom de domaine intentée par la société Croizet.

En outre, l’exception d’homonymie englobe, conformément à la directive européenne n° 2015/2436, tout usage du nom de famille par une personne physique "dans la vie des affaires" et "conformément aux usages loyaux du commerce", et ne se limite plus exclusivement à l’utilisation du signe en tant que dénomination sociale, nom commercial ou enseigne.

Quelle est l’autorité chargée de gérer les noms de domaine au Maroc ?

Tout comme la marque ou tout autre élément distinctif, le nom de domaine a désormais une valeur commerciale manifeste, et son utilisation peut constituer, dans certaines situations, un enjeu stratégique crucial.

Au Maroc, les domaines nationaux sont administrés par des organes publics ou privés désignés par l’Etat et habilités à gérer les noms de domaine. Conformément à la loi 29-06 modifiant et complétant la loi 24-96, l’Agence Nationale de Réglementation des Télécommunications (ANRT) est exclusivement habilitée à assurer l’administration et la gestion des noms de domaine « point ma ».

En vertu de l’article 7 de la décision ANRT/DG/ n° 12.14 du 21 novembre 2014 relative aux modalités de gestion administrative, technique et commerciale des noms de domaine internet « .ma », cette compétence exclusive lui permet d’attribuer les noms de domaine « ma » dans des conditions transparentes et non discriminatoires, et de représenter les titulaires de ces adresses auprès des instances internationales en charge de la gestion internationale des noms de domaine.

Enregistrement du nom de domaine au Maroc.

Toute personne détenant une marque protégée au Maroc a la possibilité de procéder à l’enregistrement de son nom de domaine en utilisant l’extension « .ma » avec des lettres accentuées (par exemple : instruction.ma). Cette démarche assure une protection au nom de domaine, conférant ainsi une identité distincte et authentique au site web associé.

Pour faire la demande, le nom de domaine souhaité doit correspondre à la marque protégée et être étayé par un certificat d’enregistrement ou un extrait du registre national des marques au Maroc, délivré par l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale (OMPIC).

En vertu de l’article 23 de la décision susmentionnée n° 12.14, le nom de domaine enregistré procure à son titulaire, pendant sa durée de validité, l’usage exclusif et personnel. Autrement dit, si une deuxième personne se présente et tente de réserver le même nom, sa demande, même légitime, serait initialement rejetée.

Le nom de domaine n’est toutefois pas à l’abri de risques puisqu’à travers lui, un utilisateur de mauvaise foi peut procéder à des pratiques illégales entrant dans le cadre de la cybercriminalité.

Ahmed Benattou
Cadre administratif au Ministère Marocain de l’enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de l’innovation
ahmedbenattou166 chez gmail.com

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