Le régime de coordination des pensions d’invalidité, tel que prévu par l’article L172-1 du Code de la Sécurité sociale, pose des principes stricts quant à l’harmonisation des droits des assurés ayant cotisé à plusieurs régimes, qu’ils soient salariés ou non-salariés. Ce dispositif de coordination, institué par la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010, s’applique aux personnes ayant relevé successivement ou alternativement de différents régimes, garantissant ainsi une continuité de droits. Toutefois, certaines exceptions subsistent, notamment concernant le régime des agents généraux d’assurance. Cette exclusion spécifique soulève des questions sur la compatibilité de ce régime avec les principes de coordination.
Principe de coordination des régimes d’invalidité.
L’article L172-1 du Code de la Sécurité sociale prévoit une coordination entre les régimes d’assurance invalidité pour les personnes ayant cotisé à plusieurs régimes.
Cette coordination a pour but d’assurer une harmonisation des conditions d’ouverture et de calcul des droits à pension d’invalidité. Selon ce texte, la pension servie doit être calculée en fonction des cotisations versées au cours des dix années civiles les plus avantageuses. Ce mécanisme vise à protéger les assurés ayant une carrière professionnelle marquée par des transitions entre plusieurs régimes, en assurant que leurs droits à pension sont équitablement pris en compte, quelle que soit leur situation professionnelle passée.
Cependant, la Cour de cassation, dans un arrêt du 5 septembre 2024 [2], rappelle que ce principe de coordination ne s’applique pas de manière universelle. En effet, le régime des agents généraux d’assurance est expressément exclu du champ de la coordination pour le calcul des droits à pension d’invalidité.
Exclusion des agents généraux d’assurance du champ de la coordination.
Le régime des agents généraux d’assurance, géré par la Caisse d’Allocation Vieillesse des Agents Généraux d’Assurance et des Mandataires non salariés d’Assurance et de Capitalisation (CAVAMAC), ne permet pas à ses adhérents de bénéficier de la coordination prévue par l’article L172-1 du Code de la Sécurité sociale. Cette exclusion s’explique par le mode de calcul des pensions d’invalidité dans ce régime, qui diffère des autres régimes couverts par la coordination.
En effet, selon l’article 12 du statut du régime des agents généraux d’assurance, la pension d’invalidité est calculée sur la base des commissions et rémunérations brutes des trois dernières années d’activité, ou de la dernière année, si cette base est plus avantageuse. Contrairement aux autres régimes, cette pension ne représente pas une fraction des cotisations versées au cours des dix années civiles d’assurance les plus avantageuses. Dès lors, la nature même du régime des agents généraux d’assurance justifie son exclusion du champ de la coordination.
La Cour de cassation, dans l’arrêt précité, a rejeté la demande d’un assuré, ancien agent général d’assurance, qui contestait le montant de sa pension d’invalidité au motif qu’elle n’intégrait pas les périodes où il avait cotisé au régime de la CAVAMAC.
La cour a considéré que, compte tenu des spécificités du régime des agents généraux, il ne pouvait bénéficier de la coordination prévue par l’article L172-1.
Implications pour les assurés ayant cotisé à plusieurs régimes.
Cette décision souligne les limites de la coordination des régimes de pensions d’invalidité en France. Si la coordination vise à garantir une continuité de droits pour les travailleurs ayant cotisé à plusieurs régimes, certaines catégories professionnelles, telles que les agents généraux d’assurance, se retrouvent exclues de ce dispositif. Il en résulte une inégalité de traitement entre les différents assurés, qui pourrait sembler contraire aux principes d’équité défendus par le droit de la Sécurité sociale.
L’arrêt de la Cour de cassation illustre la complexité du système français de protection sociale, notamment pour les travailleurs non salariés qui, en raison de la pluralité des régimes existants, peuvent voir leurs droits à pension fragmentés. Les agents généraux d’assurance se retrouvent ainsi dans une position particulière, où leur pension d’invalidité est calculée selon des règles spécifiques, distinctes de celles des autres travailleurs.
Conclusion.
La coordination des régimes d’invalidité, bien qu’établie pour assurer une meilleure protection des assurés ayant eu une carrière hétérogène, connaît des exceptions notables, comme celle des agents généraux d’assurance. L’arrêt du 5 septembre 2024 vient rappeler ces exclusions et les justifications sous-jacentes. Pour ces professionnels, il est donc essentiel d’être bien informé des particularités de leur régime afin d’éviter toute mauvaise surprise quant au montant de leur pension d’invalidité.