Les procédures d’expropriation impactées par la loi de programmation pour la justice.

Par Christophe Degache.

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Explorer : # expropriation # réforme judiciaire # procédure d'urgence # participation publique

L’expropriation pour cause d’utilité publique est une prérogative exceptionnelle de la puissance publique qui permet de porter atteinte à un droit individuel constitutionnellement protégé celui de la propriété. Ce moyen de maîtrise foncière a été impacté par la Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

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La Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a été promulguée le 23 mars 2019, et publiée au Journal Officiel le 24 mars 2019.

Le texte s’articule autour de six axes :
- simplification de la procédure civile.
- allégement de la charge administrative des juridictions.
- simplification et renforcement de l’efficacité de la procédure pénale.
- efficacité et sens de la peine.
- diversification du mode de prise en charge des mineurs délinquants et renforcement de l’efficacité de l’organisation judiciaire.
- adaptation du fonctionnement des juridictions.

Cette réforme de la justice concerne à la marge les procédures d’expropriation.

L’article 90 de la Loi visant à faciliter la construction de prisons nouvelles modifie sur deux points le déroulement actuel des procédures d’expropriation pour cause d’utilité publique.

1°) L’allégement de l’enquête publique.

Toute procédure d’expropriation pour cause d’utilité publique suppose la prise au préalable d’une déclaration d’utilité publique. Cette décision prise au nom de l’Etat et par ses représentants est le fruit d’un processus long qui comprend une ou des enquêtes publiques dont la finalité est d’associer les citoyens à la réalisation du projet d’intérêt général avec la volonté non explicite de recueillir leur consentement.

Avec les dispositions introduites par l’article 90, il sera possible de substituer à l’enquête publique classique la procédure de participation du public par voie électronique prévue par le code de l’environnement.

Cette procédure sera beaucoup plus souple, étant moins encadrée que la précédente, le législateur veut en fait éliminer les moyens juridiques d’opposants éventuels au projet permettant de remettre en cause sa réalisation via l’annulation de la déclaration d’utilité publique (DUP) qui est la pierre angulaire indispensable de tout projet.

2°) L’utilisation des procédures d’urgence.

L’article L 521-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dispose : « Lorsque l’extrême urgence rend nécessaire l’exécution immédiate de travaux intéressant la défense nationale dont l’utilité publique a été ou est régulièrement déclarée... »

Celles-ci se rencontrent dans d’autres domaines que la défense nationale, ceux-ci sont visés aux articles L 522-1 et 522-4 du code de l’expropriation. Il existe entre les deux une différence sémantique liée à la présence du vocable « extrême », qui ne se retrouve pas concrètement dans la pratique.

L’intérêt principal de ces procédures d’urgence est que la prise de possession des terrains concernés par les travaux peut avoir lieu dès que la DUP a été prise à la condition d’avoir été autorisée par Décret. L’autorité expropriante verse alors une indemnité provisionnelle à l’exproprié qui est dépossédé de son terrain.

Le législateur prévoit une extension du champ d’utilisation des procédures d’urgence.

L’article 90 de la Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice prévoit que la mobilisation de terrains pourra nécessiter des expropriations, même si les acquisitions amiables seront privilégiées. Il pourra être recouru à la procédure d’expropriation d’extrême urgence en cas d’apparition de difficultés susceptibles de retarder le projet.

En outre pour faciliter la construction d’une prison sur leur territoire, les collectivités territoriales pourront céder un terrain à l’Etat gratuitement ou avec décote.

In fine, il apparait cocasse de constater que la procédure d’expropriation destinée à protéger des citoyens va permettre d’enfermer d’autres citoyens.

Christophe Degache
Avocat au Barreau de la Haute-Loire
DEA Droit public
christophe.degache chez bbox.fr

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