[Infographies] Comment lire et comprendre une convention collective ? Par Lou Coat.

Un sujet proposé par la Rédaction du Village de la Justice

[Infographies] Comment lire et comprendre une convention collective ?

Par Lou Coat.

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Explorer : # convention collective # droit du travail # relations professionnelles # conditions de travail

Une convention collective encadre les conditions de travail et les droits des salariés au sein d’un même secteur d’activité ou d’une même branche professionnelle. Savoir la lire et l’interpréter permet de mieux comprendre ses avantages, ses obligations et son articulation, notamment avec le Code du travail. Aussi, interpréter les clauses essentielles, connaître leur portée juridique et savoir où la trouver, sont autant de clés pour l’utiliser au mieux.

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Qu’est-ce qu’une convention collective ?

Une convention collective est un accord conclu entre les organisations syndicales et les organisations patronales représentatives, dont l’objet est de définir les conditions d’emploi et les garanties sociales applicables à un secteur d’activité ou une branche professionnelle. Ces accords peuvent être négociés au niveau national, régional, départemental ou local.

Concrètement, elle fixe les dispositions relatives à la relation de travail : de l’embauche à la rupture du contrat de travail, en passant par l’organisation du temps de travail, la rémunération, la formation, les congés, etc.

Par exemple, la convention collective nationale (CCN) des hôtels, cafés et restaurants du 30 avril 1997 (HCR - IDCC 1979) prévoit des dispositions spécifiques concernant la classification des emplois et la rémunération minimale, adaptées aux particularités du secteur.

Infographie de Lou Coat
pour www.village-justice.com

Il existe trois types de conventions en fonction de leur champ d’application et de leur force obligatoire : ordinaire, étendue ou élargie.

Comme indiqué précédemment, la convention collective ordinaire est un accord conclu entre les syndicats de salariés et les organisations d’employeurs représentatifs au sein d’une branche ou d’un secteur. Elle s’applique uniquement aux entreprises qui sont adhérentes à l’une des organisations signataires et à l’ensemble de ses collaborateurs. Autrement dit, si une entreprise n’est pas affiliée à l’organisation patronale signataire, elle n’est pas tenue d’appliquer cette convention, sauf si elle en prend l’initiative.

L’extension est une procédure par laquelle le ministère du Travail donne à une convention un caractère obligatoire pour toutes les entreprises du secteur concerné, même celles qui ne sont pas membres de l’organisation patronale signataire. L’objectif est d’harmoniser les conditions de travail et les garanties sociales d’un même secteur. Une fois étendue par arrêté ministériel publié au Journal officiel, toutes les entreprises relevant du champ professionnel et géographique de la convention doivent l’appliquer.

L’élargissement est une étape encore plus étendue que l’extension. Il permet d’appliquer une convention collective (ou certaines de ses dispositions) à un secteur d’activité ou à une zone géographique qui n’étaient pas initialement concernés. Cette procédure est utilisée lorsque le gouvernement souhaite harmoniser les conditions de travail dans des secteurs proches ou dans des territoires spécifiques.

Comment identifier la convention collective applicable ?

Selon le ministère du Travail, il existe 706 conventions collectives en vigueur en février 2025. Elles sont identifiables grâce à un numéro IDCC (Identifiant De Convention Collective).

La convention applicable à une entreprise est déterminée en fonction de son activité principale, qui est référencée par le code APE (Activité Principale Exercée) ou le code NAF (Nomenclature des Activités Françaises). Ce code est attribué par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) lors de la création de l’entreprise et permet de la rattacher à une branche professionnelle spécifique.

Bon à savoir : L’employeur doit informer les salariés des conventions et accords collectifs applicables à l’entreprise conformément à l’article L2262-5 du Code du travail.

Lors de l’embauche, il remet une note d’information sur les textes applicables. Il doit également rendre accessible la convention collective aux représentants du personnel et aux salariés, mentionner son intitulé sur le bulletin de paie (art. R3243-1) ainsi que dans le contrat de travail, et afficher une note précisant les modalités de consultation dans les locaux de l’entreprise (art. R2262-3). Lorsque l’entreprise dispose d’un intranet, elle doit y publier un exemplaire à jour.

Et, chaque année, les représentants du personnel doivent être informés des modifications des accords collectifs (art. L2262-6). Pour certains travailleurs spécifiques, tels que les employés de maison ou les gardiens d’immeuble, la remise d’une note peut remplacer l’affichage.

Si l’employeur ne respecte pas ces obligations, il ne peut imposer au salarié les dispositions de la convention collective, sauf s’il prouve que celui-ci en a eu connaissance autrement (Cass. soc., 23 avril 1997, no 94-42.525). Notons que l’absence d’information cause nécessairement un préjudice au salarié, justifiant le paiement de dommages et intérêts (Cass. soc., 19 mai 2004, no 02-44.671).

Comment décrypter une convention collective ?

Une convention collective est composée de plusieurs parties importantes qui régissent les relations entre employeurs et salariés :

- Le texte de base : il rassemble les dispositions générales applicables aux salariés et aux employeurs de la branche concernée. Il encadre notamment :

  • L’embauche et la période d’essai : conditions de recrutement et durées maximales de la période d’essai.
  • La classification des emplois et les grilles des salaires : détermination des niveaux hiérarchiques et des minima conventionnels correspondants.

Attention : les conventions collectives fixent des rémunérations qui ne peuvent être inférieurs au salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic). En cas de revalorisation, l’employeur doit s’assurer que le salaire perçu par le salarié n’est pas inférieur au Smic en vigueur. Par ailleurs, si leurs minima se trouvent en dessous du Smic, les branches concernées devront engager de nouvelles négociations dans le délai imparti.

  • Les primes spécifiques : certaines conventions collectives prévoient des primes comme :
    • La prime de salissure ;
    • La prime pour temps d’habillage ;
    • Les primes pour travaux insalubres ;
    • Les primes pour travail de nuit ;
    • Le 13ᵉ mois ;
    • Enfin la prime de vacances.
  • L’organisation du temps de travail : temps partiel, répartition des horaires, heures supplémentaires, astreintes.
  • Les congés payés et les absences : conditions d’acquisition, congés supplémentaires éventuels, événements familiaux, maladie, arrêt de travail ou maladie professionnelle.
  • Les régimes de santé complémentaires : mutuelle et prévoyance pour les salariés et leur famille.
  • Les dispositions relatives à la formation des travailleurs et des instances représentatives : accès à la formation professionnelle, financement des dispositifs de formation.
  • Les règles en matière d’hygiène et de sécurité : mesures de prévention des risques professionnels, équipements de protection individuelle, obligations de l’employeur et des salariés en matière de sécurité au travail.
  • Les conditions de rupture du contrat de travail : indemnités de licenciement, préavis et droits spécifiques des salariés.

- Les textes attachés : ils regroupent les annexes et avenants négociés après la signature du texte de base. Ces documents permettent d’adapter les dispositions aux évolutions législatives ou aux spécificités de chaque secteur.

Les entreprises du BTP, par exemple, appliquent la CCN des Cadres du Bâtiment du 1ᵉʳ juin 2004 (IDCC 2420), qui détermine les classifications et rémunérations spécifiques aux cadres du secteur. En revanche, dans le secteur des transports routiers, c’est la CCN du 21 décembre 1950 (IDCC 16) qui encadre la durée du travail, les indemnités et les règles de sécurité pour les conducteurs.

La hiérarchie des normes.

La hiérarchie des normes est un principe qui établit l’ordre de primauté entre les différentes normes juridiques selon leur importance et leur portée. En droit du travail, elle détermine la primauté des dispositions d’ordre public du Code du travail sur les accords collectifs (branche et entreprise). Ainsi, une norme de niveau inférieur ne peut déroger à une norme supérieure que si elle est plus favorable aux salariés, sauf exceptions prévues par la loi. Cela permet de garantir des droits fondamentaux aux salariés et d’assurer une protection minimale obligatoire.

Infographie de Lou Coat
pour www.village-justice.com

Bon à savoir : Les ordonnances Macron de 2017 ont redéfini l’articulation entre les conventions collectives et les accords d’entreprise en distinguant trois blocs de compétences (cf. infographie) :

- Bloc 1 : il comprend 13 thématiques où la convention collective de branche prévaut sur l’accord d’entreprise, hormis si celui-ci offre des garanties au moins équivalentes.

- Bloc 2 : il regroupe 4 thématiques dans lesquelles la branche peut, en insérant une clause de verrouillage, interdire aux accords d’entreprise conclus postérieurement de déroger à ses dispositions, sauf si ces accords assurent des garanties au moins équivalentes.

- Bloc 3 : il englobe tous les autres sujets où l’accord d’entreprise prévaut sur la CCN, qu’elle soit conclue avant ou après celui-ci.

Les clauses de verrouillage, qui existaient avant la réforme de 2017, devaient être confirmées par un avenant avant le 1ᵉʳ janvier 2019 pour conserver leur validité. À défaut, ces clauses ont perdu leur effet à compter de cette date.

Infographie de Lou Coat
pour www.village-justice.com

Dans le cadre du contrat de travail, les dispositions d’une convention collective nationale plus favorables prévalent sur celles du contrat. Toute clause moins avantageuse est réputée non écrite ; autrement dit, elle est nulle et ne peut produire aucun effet.

Notons que les obligations prévues par la convention collective s’imposent au salarié, même si elles ne figurent pas dans son contrat de travail, à condition que la convention soit en vigueur au moment de son embauche et qu’il en ait été informé.

Comment interpréter une convention collective ?

Lorsqu’une disposition d’une convention collective est équivoque, plusieurs méthodes d’interprétation juridique peuvent être appliquées. Nous avons la méthode littérale. Elle consiste à analyser le sens strict des termes utilisés dans la convention, en tenant compte du sens courant ou juridique des mots employés. Nous avons aussi la méthode systématique qui implique, quant à elle, de replacer la clause dans le contexte global de la convention, afin d’en comprendre la portée dans l’ensemble du dispositif concerné. Enfin, la méthode téléologique recherche l’intention des négociateurs en se référant à l’objectif poursuivi par la convention collective. Dans cette perspective, il peut être utile de consulter les travaux préparatoires ou les usages professionnels pour éclairer l’interprétation d’une clause ambiguë.

Il est également important de prendre en compte les sources complémentaires susceptibles d’aider à son interprétation. La jurisprudence, notamment les arrêts de la Cour de cassation, et la doctrine constituent des références essentielles en cas de difficulté d’interprétation. Les guides publiés par certaines branches professionnelles sont aussi des outils utiles pour mieux comprendre et appliquer une disposition conventionnelle peu claire.

Où consulter une convention collective ?

Différents outils permettent aux employeurs et aux salariés de consulter la convention collective dont ils dépendent, comme :

- Le site officiel Legifrance (www.legifrance.gouv.fr) : il offre un accès gratuit aux textes législatifs, réglementaires et aux conventions collectives à jour.

- Le site du ministère du Travail (www.travail-emploi.gouv.fr) : ce dernier est dédié aux politiques publiques dans le champ du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et notamment du dialogue social.

- Le site du Centre national droit du travail (Convention Collective - Centre national droit du travail) : il permet une recherche par numéro IDCC ou par code APE/NAF.

- La plateforme de la Direction de l’Information Légale et Administrative (Des recherches simplifiées avec les tutoriels Légifrance - DILA) : elle fournit des informations sur la législation du travail et sur les conventions collectives.

Les syndicats et les représentants du personnel disposent aussi d’outils d’information et de la documentation susceptibles d’aider les salariés dans l’interprétation de leur CCN.

Enfin, il est essentiel d’assurer une veille juridique régulière et de s’appuyer sur les ressources et outils en ligne, afin de rester informés des évolutions législatives, réglementaires et conventionnelles, pour en garantir une bonne application.

Lou Coat, Rédactrice en droit social

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