Les symptômes du retentissement post-traumatique ?
De manière simplifiée, l’agression ou l’accident relèvent souvent d’un rapport à la mort, propre à chaque victime en fonction de son bâti psychique, entrant parfois en résonance avec des traumatismes antérieurs, oubliés ou non.
Il peut au demeurant n’y avoir aucun rapport entre l’intensité du « fait générateur » (agression ou accident) et la réponse psychique de la victime.
Les symptômes « traditionnels » peuvent également apparaître plus ou moins tardivement : reviviscences (la victime revit les faits en boucle), évitement (peur de la voiture, de revoir le lieu de l’accident ou de l’agression), troubles du sommeil et de l’alimentation, cauchemars, angoisses, irritabilité, retrait social, inhibition, apathie (perte d’intérêt pour les activités quotidiennes), asthénie chronique (fatigue permanente), anxio-dépression, troubles de la concentration et/ou de la mémoire, anhédonie (incapacité au plaisir), phobies, troubles graves du comportement (alimentaires ou non), décompensation (rupture de l’équilibre psychologique), état de sidération.
Dans tous les cas, une thérapie avec un praticien (psychologue, neuropsychologue, psychiatre, neuropsychiatre) s’impose chez la victime directe (parfois dans le déni) même en l’absence de symptômes immédiats ou apparents, lui permettant ainsi de « verbaliser » son traumatisme (évocation verbale des émotions ressenties).
Comment l’établir de manière médico-légale ?
Il n’existe pas de radio ou de scanner de l’âme humaine, et les éléments de preuve sont nécessairement indirects : prescriptions cumulatives d’anti-dépresseurs et de somnifères, thérapie au long terme avec rédaction de « bilans situationnels » par le praticien, comptes-rendus d’évaluation (tests cognitifs et mnésiques, vitesse de traitement de l’information, de l’attention auditive et visuelle, notamment).
Ces éléments d’information sont produits à l’occasion de l’expertise médico-légale amiable ou judiciaire, examinés puis quantifiés si besoin est.
Dans certaines hypothèses, et au regard d’une complexité qui dépasse la compétence de l’expert judiciaire ou des médecins-conseils, une expertise dite de « sapitation » confiée à un expert psychiatre (ou psychologue) est alors ordonnée.
Il revient au « sapiteur » (seul ou en présence de sapiteurs-conseils désignés par les parties) de diagnostiquer les symptômes post-traumatiques, de les rattacher au fait générateur, puis de les quantifier au moyen d’un « rapport de sapitation » annexé à celui de l’expert judiciaire, ou des médecins-conseils.
Comment le quantifier juridiquement ?
L’atteinte psychique traumatique est établie par expertise et/ou sapitation sur la base de la nomenclature Dinthilac, avec une quantification séparée qui vient en addition avec celle établie pour la seule atteinte corporelle (dite somatique : viscères, ensemble neurologique, musculaire, ostéotendineux, etc.).
Cette quantification intègre d’abord les postes de préjudices personnels temporaires, rappelant qu’il n’existe pas de déficit psychologique/psychiatrique temporaire :
Besoins en tierce personne (en heure par jour ou par semaine),
Déficit fonctionnel temporaire (en périodes de temps),
Souffrances psychiques endurées (sur une échelle de 7).
S’agissant des préjudices personnels permanents, et en complément des éventuels besoins en tierce personne viagère, la quantification du déficit fonctionnel permanent psychiatrique (DFP psy) est exprimée en pourcentage, lequel s’additionne au DFP somatique dans le calcul final.
Ce poste intègre les souffrances psychiques endurées postérieurement à la consolidation (état traumatique stable, non susceptible d’aggravation immédiate).
Dans certaines hypothèses, les besoins financiers en thérapie sont indemnisés au moyen du poste dit de « dépenses de santé futures » avec capitalisation du résiduel à charge.
Enfin, les troubles du comportement, de l’intelligence ou de la mémoire, peuvent gravement impacter l’activité professionnelle.
Ces conséquences, intégrées dans le poste dit d’incidence professionnelle, sont également identifiées puis relevées par l’expert et/ou le sapiteur dans le rapport final commun ou judiciaire : adaptation thérapeutique du poste de travail, inaptitude partielle ou totale avec ou sans reconversion professionnelle.
Il revient alors au Conseil de la victime de convertir les quantifications et chiffrages en sommes indemnitaires, en intégrant parfois les pertes sur droits à la retraite ainsi que le « préjudice de carrière ».
Et les proches ?
Les proches souffrent toujours, et moralement, de l’accident ou de l’agression subis par les victimes directes. En une telle hypothèse, le poste dit de « préjudice d’affection en cas de survie de la victime directe » peut-être revendiqué, puis chiffré.
Par ailleurs, la modification notoire du comportement psychique de la victime directe peut impacter de manière substantielle l’équilibre familial quotidien.
Ainsi, en complément du préjudice d’affection et tel que le juge aujourd’hui la Cour d’Appel de Paris, le(la) conjoint(e) est alors en mesure de revendiquer le préjudice de « troubles dans les conditions d’existence » moins soumis à la difficile démonstration du préjudice permanent exceptionnel.
A retenir.
Le retentissement post-traumatique n’est pas un aveu de faiblesse, mais une réaction normale qui ne doit pas être ignorée. La thérapie répond ainsi à un double besoin, personnel et indemnitaire.
Par ailleurs, si le conseil d’une thérapie post-traumatique s’impose pour les victimes directes, il en est de même pour les proches, dont l’équilibre psychologique peut être tout aussi affecté.