Pour se livrer à leurs activités de distributions, de productions ou de services, les professionnels du monde des affaires disposent de biens meubles ou immeubles, dont le législateur OHADA consacre l’existence et qui peuvent être utilisés par toute personne physique ou morale. Mais ils disposent aussi des biens spécifiques que le droit commercial et la pratique ont forgés spécialement pour eux. Au sein de ces biens figurent le fonds de commerce. Historiquement, le fonds de commerce a été inventé par la pratique française qui s’était aperçue que celui-ci représentait une valeur économique susceptible de faire l’objet de divers contrats.
La notion de fonds de commerce s’est dégagée au XIXe siècle sous une double nécessitée :
D’une part, avec l’émergence du capitalisme, les commerçants souhaitaient d’abord pouvoir protéger leur clientèle contre les attaques des concurrents. Ensuite, ils souhaitaient donner la plus grande stabilité et protéger les investissements intellectuels et financiers réalisés lors de la création de leurs entreprises.
D’autre part, la reconnaissance du fonds de commerce était souhaitée par les créanciers des commerçants qui méritaient d’être protégés contre la dissipation d’un élément souvent important du patrimoine de ces derniers ou la dissipation du prix de cession du fonds de commerce. En instaurant le fonds de commerce, le contrôle des opérations effectuées par le commerçant devenait plus commode en particulier par la mise en place de règles de publicité.
Cette institution, très connue dans le monde des affaires, ne cesse de poser des préoccupations à notre époque marquée par la mondialisation, les échanges, les avancées technologiques et la modification de l’activité humaine et industrielle . En effet, l’on assiste plus que jamais à un accroissement assez remarquable des biens d’une nature tout à fait particulière caractérisée par une absence de substance physique et dotés tout de même d’une valeur économique dont fait partie le fonds de commerce. Mener une réflexion sur le fait de savoir, si l’on doit répenser ou pas le fonds de commerce dans l’espace OHADA revient à s’interroger sur l’avenir du fonds de commerce en droit OHADA.
En effet, les éléments composant le fonds de commerce ne font que varier, amenant certains auteurs à se demander, si la liste des biens composant le fonds de commerce doit rester figée comme un préréquis obligatoire . Cette réflexion est une analyse sur le fonds de commerce en droit OHADA qui mérite d’être adapté aux nouvelles réalités de notre siècle présent. Dans les lignes qui vont suivre nous serons aménés sans prétention aucune à montrer que le fonds de commerce dans l’espace OHADA à un l’avenir discutable d’une part (I) et d’autre part que l’avenir du fonds de commerce dans l’espace OHADA est induscutable en tant que concept (II).
I- L’avenir discutable du fonds de commerce dans l’espace OHADA.
Le fonds de commerce dans l’espace OHADA est discuté aussi bien dans sa réalité (A) que dans sa constitution qui ne peut pas échapper à l’ère du numérique (B).
A- L’avenir discutable du fonds de commerce dans sa réalité.
Un commerçant peut exploiter plusieurs fonds de commerce, s’il dessert des clientèles distinctes en des lieux différents. Cette faculté reconnue à tous commerçants d’étendre son ou ses activités en vue de conquérir plus le marché et d’asseoir sa notoriété ou son bussiness dans un autre espace ou une autre aire géographique se manifeste dans la pratique par la mise en place de succursales. Cette dernière est un établissement commercial ou indstriel ou de prestations de services appartenant à une personne physique et doté d’une certaine autonomie de gestion mais n’ayant pas de personnalité juridique autonome distincte de celle de la société ou de la personne physique propriétaire.
La succursale n’est pas à proprement parlé un fonds de commerce autonome car le but est d’exploiter souvent la même clientèle que le siège. Elle peut cependant avoir une branche d’activité qui ne modifie pas la physionomie du fonds de commerce originel.
La pratique a révélé qu’en cours d’existence, le commerçant peut être confronté à certains impératifs dans l’exploitation de son fonds de commerce. En effet, le fonds de commerce, ne se conçoit pas en terme statique. Il est par contre dynamique et dépend de la conjoncture économique dominée par des modifications constantes, des ressources du commerçant et les besoins de l’exploitation de sons fonds . Les contingences de crises, de croissance ou de développement auxquelles sont confrontées les commerçants dans l’espace OHADA les conduit très souvent à recourir à des modalités de restructuration dont la plus pratiquée est l’apport partiel d’actif. Cette opération de restructuration propre aux sociétés n’est pas une opération ignorée des commerçants, personne physique qui décident de créer une société unipersonnelle. Par cette opération désormais, le commerçant détenteur d’un fonds de commerce peut apporter une branche autonome d’activité à une société préexistante ou créer sans que le fonds disparaisse du fait de cet apport .
L’acte uniforme fait référence à la notion de branche autonome d’activité sans aucune précision sur son contenu. Cette notion qui est d’inspiration fiscale désigne un ensemble de droits et d’obligations qui peuvent constituer une exploitation autonome . C’est en clair, un ensemble d’éléments d’actifs et de passif d’une société qui constituent une exploitation autonome du point de vue de l’organisation, c’est à dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens . Par exemple, une succursale d’un fonds de boulangerie peut être considérée comme une branche d’activité, si elle dispose de moyens matériels et humains suffisants pour concourir à la réalisation d’une activité déterminée.
Il convient de préciser qu’un apport en société d’un fonds de commerce ne constitue pas toujours un apport de branche autonome d’activité. Ainsi l’autonomie d’un fonds étant liée à l’existence d’une clientèle, il convient de ne pas exclure dans le traité d’apport l’un des éléments essentiels à l’existence de la clientèle.
L’admission par la doctrine de l’idée selon laquelle l’apport partiel d’actif opère transmission à titre universelle englobant à la fois les meubles, les immeubles, l’actif et même le passif à la société bénéficiaire en contrepartie de parts sociales à la société apporteuse compromet quelques fois la conception traditionnelle que l’on a du fonds de commerce. En effet, la jurisprudence a toujours rappelé que les créances, les dettes, les immeubles etc. ne peuvent être cédés au bénéficiaire d’un fonds de commerce sauf convention contraire.
Tandis qu’en droit OHADA, l’apport partiel d’actifs du fonds de commerce porte sur une branche autonome d’activité, en France généralement, dans un apport partiel d’actifs du fonds de commerce, on trouve les actifs comme les marques nécessaires à l’activité de la branche apportée. Elles doivent être transférées en pleine propriété à la société bénéficiaire des apports. Cependant, l’administration permet à ce que l’apporteur conserve la propriété des marques sous lesquelles sont commercialisés les produits de la branche apportée à condition que la société apporteuse concède la marque à la société bénéficiaire des apports sur une durée d’au moins 10 ans.
De plus, il faut reconnaitre que le simple apport en nature d’un fonds de commerce, qui ne porte pas sur une branche autonome d’activité est soumis au régime des cessions de fonds de commerce organisé par les articles 147 et suivants de l’AUDCG et aux articles 45 et 619 et s. de l’AUDSCGIE et n’est généralement pas susceptible d’être soumis aux régimes de faveur des APA en matière d’impôt sur les sociétés et droit d’enregistrement, ce qui le rend le plus souvent onéreux.
Par ailleurs, le fonds de commerce tel que réglémenté en droit OHADA se retrouve aujourd’hui concurrencer par la notion d’entreprise. De nos jours les doctrines qui ont servi à déterminer la nature juridique du fonds de commerce, s’applique à l’entreprise, à tel point que les partisans de l’entreprise ont dû transiger et reconnaissent leur origine identique qui repose sur la force de travail du commerçant ou de l’entrepreneur, en attribuant au fonds de commerce, les éléments statiques de l’entreprise et à l’entreprise les éléments dynamiques du fonds de commerce . La confusion de l’entreprise d’avec le fonds de commerce se manifeste en doctrine et en jurisprudence. La première parlant indistinctement la cession de fonds de commerce pour désigner la cession d’entreprise et la seconde, se demandant si la cession d’entreprise portant seulement sur le fonds de commerce peut être considérée comme une cession d’entreprise. Si pour la Cour d’appel de Paris, une telle opération peut être considérée comme une cession d’entreprise. Il nous faut reconnaitre avec la position de la doctrine dominante que la cession de fonds, si elle s’accompagne de la cession des contrats de travail, il y a bien cession d’entreprise. En revanche, une cession de fonds de commerce effectuée sans cession de contrat de travail ne saurait être qualifiée de cession d’entreprise.
Une vision dynamique de l’entreprise conduit à mettre en exergue un autre élément du fonds de commerce qui se trouve à l’origine de sa valeur. Cet élément essentiel est la capacité d’organisation de l’entrepreneur. C’est à dire le choix de sa politique commerciale, la sélection de son personnel, la gestion des compétences, les techniques d’approches de la clientèle ou encore l’agencement des points de vente déterminent l’attractivité du commerce exploité.
En plus de cela, le fonds de commerce est concurrencé aujourd’hui par la notion de société à responsabilité unipersonnelle considérée comme l’une des sociétés les plus répandue dans l’espace OHADA . En effet, la création de la SARL U bien qu’elle soit une innovation compromet la perception classsique que l’on a du patrimoine, puisque le fonds de commerce en droit OHADA ne saurait s’appréhender comme une universalité de droit, C’est à dire une masse de biens unis par une affectation commune avec un actif et un passif. Le commerçant suivant cette théorie aurait deux patrimoines (civil et commercial) dont le patrimoine commercial est représenté par le fonds de commerce. En instituant la SARL U, cela sous-entend que la responsabilité du commerçant, serait limitée à ses apports et donc à la valeur du fonds de commerce qu’il aurait fait à ladite SARL U. Ainsi, les créanciers des commerçants ne peuvent pas avoir d’action sur tous les biens du commerçant. Créanciers civils et créanciers commerciaux ne serait donc plus sur le même pied d’égalité.
La SARL U bouleverse grandement la vision traditionnelle que l’on a toujours du patrimoine en droit OHADA. En effet, notre droit consacre le principe de l’unicité du patrimoine et ne reconnait pas de patrimoine d’affectation, l’admission de la SARL U vient donc remettre en cause l’idée du patrimoine d’affectation que l’on a toujours réjété puisque les créanciers du débiteur ne pourront poursuivre qu’a concurrence de l’apport du commerçant. En conséquence, cette forme d’exploitation sociétaire permet une véritable distinction de patrimoines, ce qui met le patrimoine personnel en dehors des risques de l’activité professionnelle. L’exploitation individuelle sous laquelle l’on a toujours aperçu le fonds de commerce ne permet pas l’accueil de partenaires financiers apporteurs de fonds propres en vertu de l’indissociabilité du patrimoine de l’entreprise et du commerçant personne physique. La seule solution qui permet le financement propre d’une entreprise par des partenaires financiers, c’est de lui donner la forme de la société puisque cette dernière dispose d’un capital social susceptible d’être ouvert aux dits partenaires. L’avenir discutable du fonds de commerce se manifeste aussi dans sa constitution (B).
B- Le fonds de commerce, un avenir discutable dans sa constitution.
Le fonds de commerce a pris aujourd’hui une tournure différente de celle que nous la connaissons en droit OHADA. En effet, la révolution de l’internet a conduit au dévéloppement croissant des sites internet commercialisant des biens ou de services, et parfois au détriment des présences physiques et matérielles des locaux commerciaux remplacés par des pages virtuelles. Plusieurs auteurs s’accordent à admettre aujourd’hui le fonds de commerce électronique. Selon un rapport de la plate forme des données statistiques, le commerce électronique a généré des revenus de 16,5 milliards de dollars en 2017 sur le continent africian contribuant ainsi à l’économie des pays Africians. D’ici 2022, les revenus produit par le secteur du E- commerce devrait atteindre 29 milliards de dollars et 75 milliards de dollars d’ici 2025.
Aujourd’hui il est indéniable que amazon, cdiscount, ruedecommerce… pour ne citer que les plus grands constituent des fonds de commerce. Le critère de la clientèle considéré comme l’élément primordial du fonds de commerce traditionnelle se retrouve aussi dans le fonds de commerce en ligne étant donné que les cyberclients se rendent sur les sites pour procéder à l’acquisition d’un bien ou service, comme le font des clients classiques en franchissant la porte des boutiques.
Toutefois compte tenu de la spécificité du fonds de commerce virtuel tenant au contrat d’hébergement et au nom de domaine et les nombreux avantages que peu offrir le fonds de commerce électronique . Le législateur OHADA doit reconnaitre d’une part l’existence du fonds de commerce électronique en l’intégrant dans le champ d’application du fonds de commerce traditionnel et en créant un régime spécifique au fonds de commerce virtuel, puisque l’on ne peut contester au commerçant de l’univers électronique, l’ensemble des éléments conditionnant l’attribution de la propriété d’un fonds de commerce .
Dans l’espace OHADA, il devient de plus en plus fréquent qu’un commerçant exploite son commerce tantôt de manière entièrement virtuelle tantôt de manière mixte, c’est à dire qu’il peut arriver que le commerçant commence à exploiter son activité dans le monde présentiel pour ensuite lancer son activité dans le monde virtuel ou encore il peut arriver que le commerçant ait lancer une activité dans le monde virtuel pour ensuite lancer son activité dans le monde présentiel. Dans l’un ou dans l’autre cas, l’on peut s’interroger sur le fait de savoir si la boutique par exemple virtuelle ouverte postérieurement à la mise en gage ou encore au nantissement d’une boutique présentielle constitue une extension de la sûreté grévée sur le fonds de commerce initial ? Cette question qui n’a pas encore attirée la conscience des institutions de crédit sur l’assiette d’un gage ou d’un nantissement de fonds de commerce qui peut être électronique traduit bien l’urgence qu’il ya pour le législateur OHADA de se pencher plus sur le commerce électronique qui se fait de plus en plus présent dans le droit commercial touchant presque tous les domaines du droit des affaires dont le droit des sûretés.
Si le fonds de commerce peut être discuté aussi bien dans sa réalité que dans sa constitution avec la montée du commerce électronique, celui-ci demeure un concept indiscutable (II).
II- Le fonds de commerce, un concept indiscutable.
Parler du fonds de commerce comme un concept indiscutable revient à reconnaître que quoique l’on fasse, le fonds de commerce demeure un bien hétéroclite c’est à dire un groupement de biens de divers nature et variable avec le temps (A) et sert de base à certains autres concepts dans le monde des affaires (B).
A- Le fonds de commerce, un regroupement de biens divers et variables avec le temps.
Reprenant le professeur Decoq, l’on doit reconnaitre que « le fonds de commerce fait partie intégrante des notions dont il est difficile, voire impossible de proposer une définition certaine ».
Pendant très longtemps et même aujourd’hui encore les législateurs des pays hors de l’espace OHADA, la doctrine, la jurisprudence sont toujours confrontés à la question de la définition même du fonds de commerce. Parmi les définitions proposées, le législateur OHADA a tenté de combler cette lacune depuis 1997 à travers l’acte uniforme portant droit commercial général (AUDCG) en adoptant une définition essentialiste pour cerner la notion.
La révision de cet acte uniforme intervenue le 14 décembre 2010 a confirmé la définition du fonds de commerce en dépit de quelques réajustements qui y ont été effectués.
Aux termes de l’article 135 AUDCG « le fonds de commerce est constitué par un ensemble de moyens qui permettent aux commerçants d’attirer et de conserver une clientèle ».
Le législateur OHADA tente de donner une définition au fonds de commerce à partir de ses éléménts constitutifs et de sa finalité.
L’article 136 du même acte uniforme est encore plus précis lorsqu’il dispose que « le fonds de commerce comprends nécessairement la clientèle et l’enseigne ou la clientèle et le nom commercial sans préjudice du cumul de la clientèle avec l’enseigne et le nom commercial ».
A l’article 137 AUDCG, le législateur montre les différents éléments composant le fonds de commerce. Ces éléments peuvent être des éléments mobiliers corporels (aménagements ; matériel ; mobilier etc.) ou des éléments mobiliers incorporels (droit au bail ; droits de propriété littéraires et industriels etc.). Tous ces éléments sus-évoqués témoignent que le fonds de commerce demeure un groupement de biens affectés à la recherche et la conservation de la clientèle.
Ces éléments composant le fonds de commerce, diffère d’un fonds de commerce à un autre et le commerçant étant le seul à déterminer les biens utiles à son fonds, une certaine liberté d’affectation lui est reconnue en droit OHADA en lui permettant d’intégrer ou non des biens qui ne figurent pas dans les mentions prévues par l’article 137 AUDCG sans vider le fonds de éléments nécéssaire à son existence. C’est ce qui explique l’énumération non exhaustive faite par le législateur à l’article 137. En donnant cette possibilité aux commerçants en droit OHADA de mettre les biens nécessaires au développement de son activité, nous comprenons mal l’exclusion de certains biens comme les immeubles et même certains contrats qui peuvent s’avérer très utiles pour certains fonds de commerce.
En ce qui concerne l’exclusion des immeubles, surtout lorsque le commerçant est propriétaire de son fonds la jurisprudence a toujours maintenu sa position qu’ils sont exclus du fonds de commerce.
L’argument le plus avancé réside dans la nécessité d’une publicité foncière. La cession du fonds de commerce étant une vente mobilière, elle serait incompatible avec les règles de publicité en vigueur pour les immeubles. Rattaché traditionnellement au droit civil, l’immeuble est nécessaire pour l’exercice de certaines activités commerciales, son inclusion permettrait au commerçant d’avoir un bon capital lors de son départ en retraite, car en vendant son fonds en y incluant l’immeuble, cela générerait un capital conséquent pour le commerçant cédant. L’inclusion de l’immeuble serait une possibilité accorder au commerçant qui voudrait renforcer la valeur de son fonds étant donné que les immeubles apportent une plus value dont le commerçant se sert pour survivre et étendre son activité.
L’inclusion de l’immeuble dans la composition du fonds de commerce, n’est pas une idée dépourvue de sens, bien au contraire, elle permettrait de donner plus de cohérence à la notion même de fonds de commerce, car dans la conception actuelle, lorsque le commerçant est locataire des murs, le droit temporaire d’occupation de l’immeuble (bail commercial) dont il bénéficie est transmis avec le fonds, alors que lorsqu’il est propriétaire de l’immeuble, le droit d’usage des lieux est exclu du fonds, or dans ce second cas, le commerçant a consenti un investissement plus « lourd » au service de son activité.
Le législateur OHADA pourrait donner la possibilité au commerçant d’inclure l’immeuble dans la composition de son fonds, comme il en est en droit Italien.
Pour ce qui est de l’exclusion des contrats à l’exception de certains comme le contrat d’assurance qui suivent le fonds de commerce lors de sa transmission, on peut constater qu’il est indispensable d’imaginer certains fonds sans certains contrats comme il en est des contrats de distribution assortis d’une clause d’exclusivité. La pratique a bien compris cela et organise conventionnellement la transmission de tels contrats afin qu’ils suivent le fonds de commerce à l’exception des contrats conclus intuitu personae, car dans ces contrats, l’accord du cocontractant est nécessaire à leur transmission.
Présentement, les dettes n’entrent pas dans la composition du fonds compte tenu de l’impossibilité de les céder directement. Or dans le mécanisme de la location gérance, lorsque le contrat de location-gérance n’a pas fait l’objet de publicité le locataire gérant et le bailleur sont tenus solidairement des dettes nées de l’exploitation du fonds . En admettant cela, le législateur devrait permettre que les dettes contractées pour les besoins de l’exploitation soient transmises en même temps que le fonds.
Il ne s’agirait pas de créer un patrimoine d’affectation au profit du commerçant mais plutôt de justifier les illustrations imparfaites du patrimoine d’affection, puisqu’un seul commerçant peut créer une société dotée de la personnalité morale et donc d’un patrimoine distinct du sien.
Il faut reconnaître au regard de ce qui a été dit plus haut que le commerçant détenteur du fonds de commerce peut en fonction de son activité et de l’allure qu’il veut donner à celle-ci affecter les biens qui lui sied. Le fonds de commerce dans l’espace OHADA pourrait au regard du droit comparé inspirer d’autres concepts qui mérite d’être admis dans notre espace (B).
B- Le fonds de commerce, une inspiration pour d’autres concepts.
L’idée selon laquelle le fonds de commerce en tant que concept a inspiré un bon nombre de concept trouve sa principale manifestation en droit comparé plus précisément en droit français. En effet, le législateur français a mis en place depuis 1996 la notion de fonds artisanal qui désigne un ensemble d’éléments corporels ( matériels, outillages, marchandises…) et incorporels ( clientèle, droit au bail, marque, enseigne etc.) qui permettent l’exploitation d’une activité artisanale, c’est à dire une activité indépendante de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services qui nécessite un travail personnel et le plus souvent manuel de la part du professionnel . Tout comme le fonds de commerce, le fonds artisanal peut faire l’objet d’un nantissement, d’une cession, d’un apport en société. Concernant cette dernière opération, il est admis en droit français que l’artisan peut même faire acheter son fonds artisanal par la nouvelle société. Ce qui lui permet de percevoir de l’argent. Dans la loi de 1996 qui réglémente le fonds artisanal en France, il est admis que le fonds artisanal, n’obéit pas aux mêmes règles que le fonds de commerce. En effet, les formalités de publicités au journal d’annonces légales et au BODACC ne sont pas obligatoire et les fomalités de déclaration de créances ne sont pas réquises.
Le fonds de commerce a aussi inspiré la mise en place du fonds agricole en France. Ce fonds s’entend comme un ensemble de biens matériels, immatériels qu’un exploitant agricole affecte à l’exercice de son activité agricole. Créer par la loi du 5 Janvier 2006, le fonds agricole, peut faire l’objet des mêmes opérations que l’on reconnait au fonds de commerce.
Le fonds de commerce aussi inspiré la consécration du fonds libéral. Il s’agit de l’entreprise du professionnel libéral, c’est à dire le prestataire de services intellectuels (médecins, avocats etc.). Jusqu’au milieu du XX -ème siècle, on considérait que le libéral n’échangeait pas son travail contre l’argent. L’on se disait qu’on reçoit don de ses services. C’est ce qui explique que ces professions ne voulaient pas d’un fonds. Mais aujourd’hui, la logique économique à gagné ces activités libérales. En effet, la jurisprudence civile française dans une décision du 7 novembre 2000 reconnait que les professions libérales possèdent, à travers leur clientèle, droit au bail, équipements et est par conséquent cessible.
Le législateur OHADA, dans le but de faciliter la création d’entreprise individuelle et d’inciter les entreprises individuelles du secteur informel à un minimum de formalisation a instauré le statut de l’entreprenant. Ce nouvel acteur du monde des affaires est défini comme « un entrepreneur individuel, personne physique qui sur simple déclaration exerce une activité professionnelle civile, commercial, artisanal, ou agricole ».
L’élargissement des activités pouvant être exercées par l’entreprenant et qui déborde le cadre des actes de commerce tels que définis aux articles 3 et 4 AUDCG, nous amène à nous poser une question, celle de savoir sur quelle dénomination peut-on ranger les biens détenus par l’entreprenant dans le cadre de son activité. N’étant pas commerçant, ces biens ne peuvent aucunement être appelé fonds de commerce qui est réservé essentiellement aux commerçants. N’étant pas artisan, les biens ne peuvent pas être qualifié de fonds artisanal puisque ce dernier n’est pas réglémenté par le législateur OHADA.
Le fait de rechercher la dénomination des biens regroupés par l’entreprenant en fonction de la nature de son activité aura pour avantage de connaitre le régime juridique applicable à ses biens, pour une meilleure adaptation des règles du fonds de commerce aux activités artisanales et agricoles très pratiquées en droit OHADA. Car c’est avec beaucoup de dommage que l’on constate qu’aujourd’hui que bon nombre d’artisans voient leurs fonds qualifiés de fonds de commerce. Le cas du boulanger est un exemple patent, car, l’on sait pertinemment que par la nature de son activité, sa qualification liée à des connaissances et un savoir faire, par la vision qu’on ses clients le boulanger est un artisan alors que malheureusement son fonds est traité comme un fonds de commerce.
Conclusion
A l’issue de cette réflexion, force est de constater que le fonds de commerce n’a pas échappé aux mutations d’ordre technologiques et législatives. Ces mutations que rencontre cette institution si noble inventée par la pratique française depuis le XIX ème siècle se manifestent dans les pays occidentaux où la tendance actuelle tend à l’admission d’un principe de libre affectation des biens au fonds de commerce et les nouveaux concepts qui ne cessent de s’inspirer du modèle du fonds de commerce. Notre réflexion a pu montrer que le droit OHADA qui reste fortement attaché aux dispositions traditionnelles du fonds de commerce, doit prendre l’exemple sur les autres Etats dont la France pour essayer de dépasser la conception traditionnelle du fonds de commerce et adapter celui-ci à l’évolution du Monde pour conserver son caractère dynamique que nous lui reconnaissons.