Des salariés non soumis à la durée légale du travail : les cadres-dirigeants.

Par Agathe David, Avocat.

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Explorer : # cadres-dirigeants # durée du travail # autonomie de décision

Un certain type de salariés ne sont pas soumis à la durée du travail : les cadres dirigeants.

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En effet, les articles du Code du travail sur la durée du travail ne s’appliquent pas à cette catégorie particulière de salariés, ni les dispositions relatives au repos quotidien et hebdomadaire.

En revanche, ils bénéficient des congés payés, des congés légaux et du compte épargne-temps.

S’il peut être tentant pour les entreprises de proposer ce statut à leurs cadres ayant les postes les plus importants afin de contourner le forfait-jours, attention ce type de contrats ne peut être proposé qu’à un certain type de cadres, la loi ayant souhaité circonscrire l’application de ce statut.

L’article L. 3111-2 du Code du travail définit les cadres-dirigeants comme suit : « les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ».

Il en ressort que trois conditions cumulatives doivent être réunies :
- avoir des responsabilités importantes impliquant une large indépendance dans l’organisation de son temps de travail ;
- être habilité à prendre des décisions de manière largement autonome ;
- percevoir l’une des rémunérations les plus élevées de l’établissement.

La jurisprudence a ajouté une quatrième condition découlant en réalité des trois précédentes : le cadre doit participer effectivement à la direction de l’entreprise. [1]

Afin de savoir ce qu’il faut entendre par dirigeant, il convient de se référer aux travaux parlementaires précédant l’adoption de la loi « Aubry II », ce qu’a d’ailleurs fait la Cour de cassation.

En effet, le rapport présenté à l’Assemblée Nationale précisait que les cadres-dirigeants devaient constituer le premier cercle autour du chef d’entreprise. [2]

Il convient de préciser que la taille de l’entreprise importe peu et que toutes les entreprises peuvent avoir un cadre-dirigeant, à condition bien évidemment que les critères soient remplis.

Souvent les cadres dirigeants seront membres de comités de direction (Codir), comités exécutifs (Comex), etc.

En cas de contentieux, le juge appliquera donc la méthode du faisceau d’indices et se réfèrera aux conditions réelles d’emploi, il vérifiera la réalité de l’indépendance d’organisation, de l’autonomie de décision et du haut niveau de rémunération.

- A titre d’exemple, la jurisprudence ne retient pas la qualité de cadre-dirigeant lorsque celui-ci doit rendre des comptes et n’a pas de réelle autonomie tel, le directeur des ressources humaines d’une association qui tout en étant autonome ne pouvait signer ni les convocations à entretien préalable, ni les lettres de licenciement, devant en référer en amont au directeur général [3].

- Le statut est également incompatible avec la conclusion d’une convention de forfait-jours [4].

En revanche, la qualité de cadre-dirigeant a été reconnue à :
- un directeur des ressources humaines d’une entreprise comprenant 2.500 salariés et membre du comité de direction [5].
- un chargé d’affaires dans une petite entreprise du bâtiment (moins de 20 salariés) [6].

Le risque en cas d’application illicite du statut de cadre dirigeant, c’est-à-dire si les quatre conditions évoquées plus avant ne sont pas remplies, est pour l’employeur, est le paiement des heures effectuées chaque semaine au-delà des 35 heures sur trois ans en arrière avec majoration pour heures supplémentaires…

Il en ressort que les condamnations peuvent rapidement être très élevées.

Il convient donc d’appliquer ce statut avec précaution après avoir pris conseil auprès d’un avocat en droit du travail.

Agathe David, Avocat au Barreau de Paris

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Notes de l'article:

[1Cass.soc., 22 oct. 2015, n°14-22.535 ; Cass.soc., 25 nov.2015, n°14-10.529

[2Rapport AN n°1826

[3Cass.soc., 15 mars 2023, n°21-21.632

[4Cass.soc.7 sept. 2017, n°15-24.725

[5Cass.soc., 3 juin 2009, n°07-44.293

[6Cass.soc.31 janvier 2012, n°10-23.828

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