Comment obtenir la nationalité française par le mariage ? Par Mourad Medjnah, Avocat.

Comment obtenir la nationalité française par le mariage ?

Par Mourad Medjnah, Avocat.

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Explorer : # naturalisation par mariage # conditions de nationalité # démarches administratives # connaissance de la langue française

La célébration d’un mariage avec un(e) Français(e) ne confère pas un droit acquis ou automatique à la nationalité française. L’administration française considère seulement que le conjoint étranger, à travers son mariage avec un ressortissant français, dispose d’attaches familiales en France. Il peut, à ce titre, déposer une demande de naturalisation auprès de la préfecture pour devenir lui-même Français.

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Des conditions draconiennes sont néanmoins imposées au demandeur.

Tout l’enjeu est de savoir quelles sont ces conditions ainsi que les modalités d’acquisition de la nationalité française par le mariage.

I.- Les conditions à remplir.

A. La situation du conjoint français.

Le conjoint doit être français à la date du mariage, soit de naissance, soit par naturalisation.

Le conjoint français devra alors apporter la preuve de son identité française.

B. Le lieu et la durée du mariage.

Si la célébration du mariage a lieu en France (dans le pays de résidence du conjoint français), le mariage devra être enregistré à l’état civil de la mairie de la commune choisie pour la cérémonie.

Si la célébration du mariage a lieu à l’étranger (dans le pays de résidence du demandeur), le mariage doit faire l’objet d’une transcription sur les registres de l’état civil du consulat de France pour être valide et opposable en France. Il est ici préférable de prendre contact, de préférence plusieurs mois avant la célébration du mariage, pour obtenir tous les renseignements utiles concernant les formalités obligatoires telles que la publication des bans, par exemple. Il s’agit d’un document administratif obligatoire pour le mariage d’un ressortissant français à l’étranger, annonçant officiellement la célébration prochaine du mariage avec l’avis affiché à la porte de la mairie.

D’autres justificatifs seront réclamés par l’ambassade ou le consulat de France, à titre d’exemples non exhaustifs :
- les fiches de renseignement remises par l’autorité consulaire, dûment remplies ;
- le certificat de capacité à mariage ;
- l’acte de naissance de chacun des conjoints, datant de moins de trois mois ;
- le justificatif de la nationalité française du conjoint (CNI ou passeport français) ;
- le justificatif de domicile ou de résidence.

Par ailleurs, l’agent diplomatique ou consulaire peut procéder à l’audition des deux conjoints, soit avant la publication des bans, soit lors de la demande de transcription de l’acte de mariage par le ressortissant français.

La transcription de l’acte de mariage dans les registres consulaires s’accompagne de la délivrance d’un livret de famille.

Enfin, concernant la durée du mariage, le demandeur ne peut demander la naturalisation française qu’après un délai de quatre ans à compter du mariage (délai de carence) s’il justifie d’une résidence régulière et continue en France et d’une communauté de vie durant cette période. Ce délai de carence est porté à cinq ans si l’étranger n’est pas en mesure de démontrer que son conjoint français a été inscrit pendant la durée de communauté de vie à l’étranger au Registre des Français établis hors de France.

C. La communauté de vie.

La communauté de vie entre l’étranger et son conjoint français doit être effective à la date de la demande de naturalisation française par mariage.

L’autorité préfectorale ou consulaire n’hésitera pas à mener une enquête de proximité pour vérifier que la communauté de vie affective et matérielle est bien réelle. En cas d’absence, d’interruption ou de cessation de la communauté de vie, cette enquête visera à apporter les preuves matérielles.

D. La connaissance de la langue française.

Le demandeur doit maîtriser suffisamment la langue français, tant à l’écrit qu’à l’oral.

Il doit justifier a minima d’un niveau B1, à savoir :
- comprendre les points essentiels d’une discussion quand un langage clair et standard est utilisé et s’il s’agit de choses familières au travail, à l’école, aux loisirs, etc… ;
- être autonome dans la plupart des situations rencontrées en voyage dans une région où la langue cible est parlée ;
- pouvoir produire un discours simple et cohérent sur des sujets familiers et dans ses domaines d’intérêt ;
- savoir raconter un événement, une expérience ou un rêve, décrire un espoir ou un but et exposer brièvement des raisons ou explications pour un projet ou une idée.

Pour justifier avoir le niveau B1 oral et écrit, le demandeur doit fournir un diplôme français ou une attestation de réussite à un test de connaissance du français (TCF).

E. L’absence de condamnation pénale.

Le demandeur ne peut obtenir la nationalité française s’il a fait l’objet auparavant d’un arrêté d’expulsion, d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), ou de toute autre condamnation pénale pour crime ou délit sur le territoire français ou dans son pays d’origine.

Le Code civil précise que « nul ne peut être naturalisé s’il n’est pas de bonnes vie et mœurs » (art.21-23 Code civil).

En effet, l’administration considère souvent que les faits délictueux compromettent la condition de bonne vie et mœurs, dès lors qu’ils présentent un caractère de gravité suffisante.

II.- Les démarches à effectuer.

A. Quelles sont les pièces à fournir ?

Les pièces à fournir pour une demande de naturalisation par mariage sont les suivantes :
- le formulaire de déclaration par mariage, à éditer en deux exemplaires, dater et signer (Cerfa n° 15277*04) ;
- le paiement de 55 euros de timbres fiscaux ;
- la photo d’identité récente du demandeur ;
- la photocopie d’une pièce d’identité du demandeur (passeport ou carte d’identité du pays d’origine) ;
- l’acte de naissance (moins de trois mois) du demandeur ;
- le justificatif de domicile (moins de trois mois) du demandeur :
A noter que si le demandeur est hébergé :
- une attestation d’hébergement sur l’honneur dûment datée et signée par l’hébergeant ;
- la photocopie de son titre d’identité ;
- un justificatif de domicile de moins de trois mois à son nom.
A noter que si le demandeur réside en France depuis moins de cinq mois :
- un justificatif de résidence en France (ex : contrats de travail, attestations de l’employeur, attestations de paiement CAF, attestations Pôle Emploi, factures de téléphone/gaz/électricité, etc…).
A noter que si le demandeur réside à l’étranger durant le mariage :
- l’extrait de casier judiciaire étranger ;
- le certificat d’inscription de l’époux français au Registre des Français résidant hors de France (document nécessaire en cas de mariage depuis moins de cinq ans).
A noter que si le demandeur ou le conjoint français a déjà été marié et/ou a des enfants :
- l’acte de mariage ;
- le jugement de divorce ou la convention de divorce amiable ;
- l’acte de naissance (moins de trois mois) des enfants.
- le diplôme ou attestation justifiant du niveau B1 en langue française ;
- la pièce d’identité (passeport ou carte d’identité) des parents du demandeur ;
- l’acte de naissance (moins de trois mois) des parents du demandeur ;
- l’acte de décès du parent du demandeur (en cas de décès) ;
- l’acte de mariage moins de trois mois. En cas de mariage à l’étranger, l’original de la transcription de l’acte de mariage sur les registres consulaires français ;
- tous les justificatifs prouvant que la communauté de vie n’a pas cessé, c’est-à-dire tous documents portant le nom des deux conjoints (ex : avis d’imposition, contrat de location, quittance de loyers, relevé du compte bancaire commun, RIB, titre de propriété en cas d’achat en indivision d’un bien immobilier, etc...) ;
- la carte nationale d’identité ou le passeport du conjoint français ;
- l’acte de naissance (moins de trois mois) du conjoint français ;
- si le conjoint français a obtenu sa nationalité française par naturalisation, la copie du décret de naturalisation à demander auprès de la Direction de l’information légale et administrative (Dila) ;
- les trois derniers bulletins de salaire du demandeur et ceux du conjoint français.

Dans l’attente de l’instruction du dossier, le demandeur recevra un récépissé de dépôt de sa demande.

B. A qui s’adresser pour déposer sa demande ?

La demande de naturalisation doit être déposée auprès de la plateforme de naturalisation qui dépend du lieu de résidence.

Le dossier peut être déposé directement au guichet de la préfecture compétente ou être envoyé par courrier recommandé avec accusé de réception. Le demandeur recevra un récépissé de dépôt de la demande.

Par souci de pédagogie et d’accompagnement, l’administration met à disposition des demandeurs deux liens Internet :

- permettant de vérifier que les conditions règlementaires sont remplies et d’accéder à la liste des pièces à fournir pour la constitution du dossier [1],
- renvoyant vers la carte interactive des plateformes d’accès à la nationalité française [2].

C. Quel est le délai d’attente pour obtenir une réponse ?

Après dépôt du dossier, l’autorité préfectorale mènera une enquête de proximité au cours de l’instruction et convoquera les conjoints à un entretien d’assimilation pour vérifier qu’aucune incompatibilité ou défaut d’assimilation ne s’oppose à l’octroi de la nationalité française.

Une fois l’entretien terminé à la préfecture, le ministre de l’intérieur dispose d’un délai d’un an pour rendre sa décision finale.

Cela revient donc à attendre au moins 18 mois.

III.- Le recours contentieux en cas de refus.

Lorsque toutes les conditions susmentionnées sont remplies, le préfet accordera la nationalité française au ressortissant étranger et transmettra à son supérieur hiérarchique, à savoir le ministre de l’intérieur, chargé des naturalisations, le dossier de l’intéressé pour qu’il statue in fine sur la demande.

Trois options s’ouvrent alors au ministre. Il peut :
- soit confirmer la décision favorable du préfet, auquel cas il rendra une décision favorable ;
- soit considérer que le demandeur ne satisfait pas aux conditions posées par la loi pour accorder la naturalisation (il prendra alors une décision d’irrecevabilité) ;
- soit considérer que la demande de naturalisation n’est pas opportune (il prendra alors une décision de rejet ou d’ajournement).

Dans les deux derniers cas, il appartiendra alors au demandeur de contester la décision ministérielle dans un délai de six mois à compter de sa notification par le bais d’un recours contentieux devant le tribunal administratif de Nantes, dans les conditions fixées par la loi [3].

Il est à noter que ce délai est prorogé de deux mois supplémentaires lorsque le requérant a effectué, pendant le délai de recours contentieux, un recours gracieux auprès de l’autorité administrative ayant pris la décision. L’administration a un délai de deux mois pour répondre à compter à compter de la date de réception du recours gracieux.

A l’expiration de ce délai, l’absence de réponse de l’administration vaut décision implicite de rejet.

Le recours contentieux pourra alors être formé auprès du tribunal administratif de Nantes dans le délai de deux mois suivant le rejet explicite ou implicite du recours gracieux.

Maître Mourad MEDJNAH
Cabinet MEDJNAH
13, rue de la Jonquière 75017 PARIS
Avocat Visa & Naturalisation
Avocat Immobilier & Ventes aux Enchères
Avocat Affaires & Concurrence

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Notes de l'article:

[3Art. R411-1 et suivants du Code de justice administrative.

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Discussions en cours :

  • Bonjour, suite à une séparation en 2018 déclarée uniquement à la Caf puis reprise de la vie commune en 2020, est-ce qu’on peut toujours demander la nationalité française par mariage ou cela n’est plus possible ? Merci

    • par Maître Mourad MEDJNAH , Le 23 avril 2024 à 12:10

      Un(e) ressortissant(e) étranger(e) peut acquérir la nationalité française par mariage avec un(e) ressortissant(e) français(e) au moyen d’une demande de naturalisation par déclaration, si et seulement si les deux conditions suivantes sont cumulativement respectées :

      1) Le couple doit vivre une vie commune au moins deux années avant le dépôt de la demande de naturalisation par déclaration ;

      2) Le couple ne doit pas être divorcé à la date de la déclaration, sachant qu’une séparation de corps n’est pas un divorce.

      Dans votre cas, vous avez été séparé courant de l’année 2019, il y a donc presque cinq années. Mais, depuis, vous êtes à nouveau ensemble.

      Dans ce cas, votre séparation ne devrait pas avoir d’impact sur votre demande de naturalisation par mariage.

      Maître Mourad MEDJNAH
      Avocat Visa & Naturalisation

  • Dernière réponse : 10 janvier 2024 à 12:47
    par Natalie , Le 10 janvier 2024 à 08:50

    Bonjour j’ai une question non triviale : si l’acte de mariage est annulé dans le pays de délivrance mais que l’équivalent français (atteste par le service consulaire) est toujours valable, puis-je demander la nationalité française après 10 ans de mariage, mais vivant à l’étranger (à part mon mari français car il travaille dans différents pays) ? Merci

    • Bonjour,

      Vous avez contracté un mariage dans votre pays d’origine.

      Dès lors que le mariage a été annulé par les autorités locales en cours d’instruction de votre demande d’acquisition de la nationalité française, vous êtes dans l’obligation d’en avertir les autorités consulaires françaises de ce changement de situation pour que l’administration en tienne compte. Le consulat annulera alors sa précédente attestation et la remplacera par une autre attestation conforme à votre nouvelle situation.

      Dans ces conditions, vous ne pouvez pas continuer à vous prévaloir de l’ancienne attestation.

      J’attire votre attention sur le fait que si vous ne portez pas à la connaissance de l’administration française de l’annulation de votre mariage en cours de traitement de votre dossier, vous courrez le risque de voir votre demande refusée pour déclaration erronée, dans la mesure où les autorités françaises mènent systématiquement des enquêtes auprès des autorités de votre pays d’origine afin de vérifier l’exactitude des informations contenues dans votre dossier de demande d’acquisition de la nationalité française.

      Votre bien dévoué.

      Maître Mourad MEDJNAH
      Avocat Visa & Naturalisation
      Cabinet MEDJNAH
      13, rue de la Jonquière 75017 PARIS

  • Bonjour,

    Vous parlez de pieces qui ne figurent pas oas dans la notice tel que :
    - les copies de fiches de paie
    - l’acte de naissance (moins de trois mois) des parents du demandeur ;
    - l’acte de décès du parent du demandeur (en cas de décès) ;

    D’autre part quel est le recours lorsqu’il nous est impissibke d’obtenir un rendez vous par internet ?

    Merci pour votre aide

    • par Medjnah Mourad , Le 14 février 2022 à 13:28

      Madame, Monsieur,

      Si vous ne parvenez pas à obtenir un rendez-vous sur la plage horaire du site internet de la préfecture pour déposer votre dossier de demande d’acquisition de la nationalité française, vous pouvez, avec l’aide d’un avocat, saisir le juge des référés du tribunal administratif dans le cadre d’une procédure d’urgence dite "référé mesure utile".

      Attention : Avant d’engager cette procédure en référé, il est vivement conseillé de rassembler le plus de preuves possibles, telles que par exemple :
      - captures d’écran à chaque prise de rendez-vous,
      - correspondances et courriers de réclamation, y compris ceux de votre conseil ou de votre mandataire,
      - échanges avec la préfecture (courriers, mails, ...), etc...

      L’objectif est de convaincre le juge des référés, sans le moindre doute, qu’il y a urgence à ce qu’il enjoigne au préfet de vous adresser un rendez-vous dans les meilleurs délais, au mieux dès la notification du jugement à intervenir.

      A l’inverse, en cas de doute légitime et sérieux sur le bien-fondé de la demande, le juge des référés peut rejeter le recours contentieux ou se déclarer incompétent au vu des difficultés rencontrées, invitant ainsi les parties à saisir le juge du fond qui se chargera de trancher le litige. Cette issue n’est pas grave en soi, puisqu’elle vous laissera le temps de collecter d’autres preuves à soumettre devant le juge du fond.

      En tout état de cause, par expérience, j’ai pu constater dans de nombreux dossiers gérés par mon cabinet que la préfecture adresse un rendez-vous en cours de procédure de peur de se voir condamnée par la justice. En effet, l’action en justice exerce une grande pression, par effet comminatoire, sur l’administration qui prend le plus souvent des décisions discrétionnaires.

      Votre bien dévoué.

      Me Mourad Medjnah
      Avocat à la Cour
      Tél : 06 62 23 21 48

    • par Bayoko , Le 3 juin 2022 à 00:11

      Je voudrais savoir si le demandeur de la nationalité par déclaration ( mariage) doit obligatoirement avoir un emploi ?

    • par Medjnah Mourad , Le 3 juin 2022 à 12:48

      Madame, Monsieur,

      L’exercice d’un travail est un critère d’appréciation parmi d’autres dans le cadre de votre instruction de votre demande de naturalisation, soumis à l’appréciation large et discrétionnaire de l’autorité préfectorale.
      En effet, l’une des obligations qui découlent du mariage est la contribution aux charges du ménage.

      Par conséquent, si vous disposez d’un travail, au mieux dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet, cela est positif.

      Votre bien dévoué.

      Me Mourad Medjnah
      Avocat à la Cour
      Cabinet d’avocats Medjnah
      13, rue de la Jonquière
      75017 Paris

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