Association : l’intérêt à agir devant le juge administratif.

Par Rémy Dandan, Avocat.

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L'intérêt à agir d'une association devant le juge administratif est déterminé par plusieurs facteurs, pour les personnes physiques, ou pour les personnes morales.Toutefois, il existe des exceptions à ce principe lorsque la décision soulève des questions touchant les libertés publiques.
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Vous êtes libre de créer, de gérer, de dissoudre ou d’adhérer à une association. Une association est une personne morale, elle a donc une personnalité juridique et la question qui se pose est donc la suivante : une association peut-elle avoir intérêt à agir devant le juge administratif ?

-

I) Définitions de l’intérêt à agir devant le juge administratif.

L’association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices [1].

Pour déterminer si une association peut ou ne peut pas saisir le juge administratif, il convient de rappeler brièvement les conditions de saisine de ce dernier.

Pour saisir le juge administratif, le requérant doit répondre à plusieurs conditions, que sont :

  • La capacité à agir
  • La bonne représentation en justice, qui peut imposer par exemple le ministère d’avocat
  • Et l’intérêt à agir.

En effet, tout requérant devant le juge administratif doit démontrer l’existence d’un intérêt à agir, c’est-à-dire d’un intérêt qui lui confère qualité pour agir.

A noter toutefois que le défaut d’intérêt à agir est régularisable devant le juge administratif, à l’expiration du délai de recours contentieux (généralement jusqu’au commencement de l’instruction).

L’intérêt à agir devant le juge administratif sera plus ou moins facile à démontrer en fonction de si le requérant est une personne physique ou morale.

II) L’intérêt à agir devant le juge administratif des personnes physiques.


L’intérêt à agir s’apprécie à la date d’introduction de la demande en justice, il doit donc comporter un caractère présent et actuel [2].

L’intérêt est également apprécié en fonction de la qualité [3] du requérant et en fonction de l’objet de sa demande.

L’intérêt doit également être certain [4], légitime et direct [5].

L’intérêt peut être matériel comme moral [6].

III) L’intérêt à agir devant le juge administratif des personnes morales.

Pour les personnes morales, c’est à peu près le même principe, adapté à la nature de la personne qui est morale.

L’intérêt collectif des groupements a été reconnu par un arrêt du 28 décembre 1906 (Syndicat des patrons coiffeurs de Limoges).

Plus précisément, l’intérêt à agir des associations est régi par le principe de la concordance de l’objet de l’association avec l’objet de l’acte et en particulier le ressort territorial de la décision attaquée.

Ainsi, l’intérêt à agir devant le juge administratif d’une association contre un acte administratif est apprécié tant au regard de la nature des intérêts qu’elle défend, que de son champ d’action géographique.

La prise en compte de la nature des intérêts défendus par l’association pour apprécier l’intérêt à agir devant le juge administratif.

D’une part, le critère de la spécialité de l’objet statutaire est retenu par le juge administratif pour qualifier l’intérêt pour agir.

Le juge vérifiera que la décision que l’association conteste affecte véritablement les intérêts qu’elle a pour mission de défendre.

Il est en résulte que pour contester un acte administratif devant le juge administratif, l’objet social de l’association ne doit être ni trop large ni trop restreint.

Par exemple, le recours d’une association de défense de l’environnement ayant un objet social trop vaste au regard de l’importance du projet qu’elle conteste est irrecevable [7].

Inversement, la définition d’un objet statutaire trop circonscrit ne permet pas à l’Association requérante de contester un schéma régional [8].

Depuis une décision du 20 octobre 2017 le Conseil d’Etat a précisé qu’une association, dont l’objet statutaire est seulement d’assurer la sauvegarde du cadre de vie des habitants d’un quartier, est recevable à introduire un recours contre une autorisation de construire, en se prévalant des désagréments qui peuvent découler d’un projet immobilier sur la qualité de vie d’un quartier.

IV) La prise en compte champ d’action géographique de l’association pour apprécier son intérêt à agir devant le juge administratif.


Le deuxième élément qui sera pris en considération par le juge administratif pour apprécier l’intérêt à agir d’une association, c’est son champ d’action territorial.

L’intérêt pour agir d’une association est admis lorsque son périmètre d’action géographique est défini de façon suffisamment précise [9].

Et évidemment, ce champ d’action territorial de l’association devra concorder avec le ressort géographique de l’acte administratif contesté.

Problème : quid des situations où l’objet social de l’association ne précise pas le ressort géographique de son action ?

Le juge administratif a considéré qu’en l’absence d’indication permettant de définir un champ d’intervention localement délimité, l’association sera regardée comme ayant un champ d’intervention national trop vaste pour contester des projets locaux [10].

Concrètement, lorsque le juge administratif constate qu’une association s’est donnée un ressort d’action plus large que celui de l’acte attaqué, national, régional ou départemental, l’intérêt à agir n’est en principe pas admis.

Mais tout principe a ses exceptions.

Le Conseil d’Etat a apporté une exception notable [11].

Le Conseil d’Etat a d’abord rappelé dans un premier temps sa jurisprudence traditionnelle, considérant que si, en principe, le fait qu’une décision administrative ait un champ d’application territorial fait obstacle à ce qu’une association ayant un ressort national justifie d’un intérêt lui donnant qualité pour en demander l’annulation […].

Puis, le Conseil d’Etat a poursuivi en posant une exception à ce principe, en considérant qu’il peut en aller autrement lorsque la décision soulève, en raison de ses implications, notamment dans le domaine des libertés publiques, des questions qui, par leur nature et leur objet, excèdent les seules circonstances locales.

Il en résulte donc, un principe et une exception concernant l’appréciation du ressort géographique de l’association puisque en principe, l’absence de définition précise de ce ressort géographique conduit à une irrecevabilité, le JA considérant qu’il y a défaut d’intérêt à agir.

Mais lorsque la décision attaquée soulève des questions de libertés publiques, le JA admettra l’intérêt à agir d’une association dont le ressort géographique n’est pas précisément défini.

Rémy Dandan
Avocat au Barreau de Lyon
Enseignant en droit de l’urbanisme
Enseignant en protection des libertés et des droits fondamentaux

https://www.rdavocats.com/

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[1Art. 1 loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.

[2CE, 16 avril 2010, Bourgeon.

[3CE, 29 mars 1901, Casanova.

[4CE, 14 février 1958, Abisset.

[5CE, 28 mai 1971, Damasio.

[6CE, 13 mai 1949, Bourgouin.

[7CE, 27 mai 1991, n° 113203 ; CE, 29 janvier 2003, n° 199692.

[8CAA Lyon, 3 mai 2016, n°14LY00473.

[9CE, 20 mars 1974, n° 90212 ; CE, 31 décembre 1976, n° 03164.

[10CE 23 février 2004, n° 250482 ; CE, 5 novembre 2004, n° 264819.

[11CE, SSR., 4 novembre 2015, Ligue française pour la défense des droits de l’homme et du citoyen, requête n°375178, publié au recueil.

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