100 €, 500 €, 2.000 €… les frais de gardiennage constituent souvent une surprise désagréable pour les clients qui souhaitent récupérer leur véhicule chez un professionnel de l’automobile.
Certains clients n’hésitent d’ailleurs pas à en contester le principe, s’ils prétendent n’avoir signé aucun document les visant expressément, ou remettre en cause leur montant, s’ils estiment que le prix est trop élevé.
En toutes hypothèses, les frais de gardiennage naissent souvent à la suite d’une situation de blocage entre le garagiste et son client.
Sur ce point, les exemples de paralysie sont nombreux : le véhicule a été déposé dans un garage mais le client n’est pas d’accord sur les réparations à réaliser ; le garagiste facture des réparations non-prévues contractuellement ; le client ne donne plus signe de vie après avoir été informé que les réparations ont été terminées…
Cependant, ils peuvent aussi trouver leur origine dans des situations beaucoup plus paisibles : le véhicule tombé en panne a été entreposé temporairement dans un garage avant d’être transféré dans un autre ; le véhicule a été entreposé dans un garage aux fins d’expertise…
Dans tous les cas, la facturation des frais de gardiennage suppose de réunir des conditions de fait et de droit précises.
Pour bien comprendre leur application, il convient de revoir les textes juridiques en matière de dépôt de véhicule et analyser ces derniers au regard de la jurisprudence.
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En matière de dépôt de véhicule, le principe de base est celui qui figure à l’article 1917 du Code civil :
« Le dépôt proprement dit est un contrat essentiellement gratuit ».
En combinant cette règle avec celle de l’article 1353 du Code civil (« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ») il ressort que le dépôt est considéré fait à titre gratuit, sauf si le garagiste en démontre le caractère onéreux.
Sur ce point et pour information, les garagistes se prévalaient habituellement des tarifs affichés dans leurs établissements – affichage rendu obligatoire selon l’article 13 de l’arrêt du 3 décembre 1987 - pour prouver que le dépôt de véhicule était bien effectué à titre onéreux.
Cependant, cette charge de la preuve a été renversée par la Première Chambre Civile de la Cour de cassation dans une décision du 05 avril 2005, n°02-16.926 :
« Attendu que le contrat de dépôt d’un véhicule auprès d’un garagiste, accessoire à un contrat d’entreprise, est présumé fait à titre onéreux ;
Attendu que pour rejeter la demande de paiement de frais de gardiennage formée par un garagiste, qui a assumé la garde d’un véhicule après réparation, l’arrêt attaqué retient que le garagiste devait démontrer le caractère rémunéré d’un tel dépôt ;
Attendu qu’en statuant ainsi, alors qu’il appartenait au propriétaire du véhicule de rapporter la preuve du caractère gratuit du contrat, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
En résumé, le contrat de dépôt d’un véhicule auprès d’un garagiste est désormais présumé fait à titre onéreux, sauf si le client en démontre le caractère gratuit.
Au regard de cette décision, on pouvait penser que le client allait être contraint de régler systématiquement les frais de gardiennage émis par son garagiste car la preuve d’un dépôt à titre gratuit n’allait pas être évidente à rapporter.
En effet, on imagine mal un garagiste faire signer à son client un document de dispense de frais de gardiennage alors que ces frais constituent justement un bon moyen de pression économique pour éviter des abandons de véhicule dans ses locaux.
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Néanmoins, la Première Chambre civile de la Cour de cassation a apporté une précision de taille dans une décision du 26 novembre 2014, n°13-26760 afin de rééquilibrer la relation garagiste-client :
« Attendu, selon le jugement attaqué, qu’à la suite d’un accident de la circulation, le véhicule automobile de M. X... a été transporté, pour expertise, à la demande de son assureur, dans les locaux de M. Y..., garagiste ; que M. X... n’ayant pas repris son véhicule à l’issue de cette mesure, M. Y... lui a fait délivrer une ordonnance d’injonction de payer une certaine somme au titre des frais de gardiennage, à laquelle M. X... a formé opposition ;
Attendu que pour le condamner à payer à M. Y... la somme de 1.080 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2011, le jugement retient que le contrat de dépôt d’un véhicule auprès d’un garagiste, accessoire au contrat d’entreprise, est présumé fait à titre onéreux, et que M. X... ne fournit aucun élément susceptible d’inverser cette présomption ;
Qu’en statuant ainsi, sans constater qu’un contrat d’entreprise avait été conclu entre les parties, la juridiction de proximité a violé les textes susvisés »
En résumé, la Cour de cassation a pris en compte un critère supplémentaire pour que des frais de gardiennage soient applicables à un contrat de dépôt ; ce dernier doit être l’accessoire d’un contrat d’entreprise.
Pour rappel, le contrat d’entreprise est défini comme une convention par laquelle une personne charge une autre moyennant rémunération d’exécuter un travail en toute indépendance et sans la représenter, ce qui, en matière d’automobile, s’apparente à un accord sur les réparations à effectuer.
Dès lors, s’il n’existe qu’un contrat de dépôt sans contrat d’entreprise, le garagiste ne sera pas en droit de facturer des frais de gardiennage à l’encontre de son client.
Cette solution devrait donc plaire aux propriétaires qui déposent leur véhicule dans un garage aux seules fins d’expertise par un expert privé ou judiciaire, ou qui apportent temporairement leur véhicule dans un garage avant d’être remorqué dans un autre, car faute de contrat d’entreprise, aucun frais de gardiennage ne pourront leur être facturés.
Discussions en cours :
Bonjour,
Est-ce que un garagiste a droit d’appliquer des frais de gardiennage si la voiture n’est pas réparée ou si il n’arrive pas à la réparer ?
Bonjour,
Lorsque le client récupère son auto après trois ou quatre jours de dépôt chez un garagiste, est-il redevable des frais de parking alors qu’aucune réparation n’a été faite sur le véhicule ?
Bonjour,
J’ai acheté un véhicule d’occasion à un garagiste peu de temps après le véhicule présente des pannes et un autre garage immobilise le véhicule en vue de sa non-conformité à la circulation. Je lance donc une procédure accompagnée de ma protection juridique.
L’expert expertise le véhicule est en conclu que le vendeur doit récupérer le véhicule pour le réparer et le remettre conforme à la circulation avant le 31/03/24. Le problème est que le garage qui détient le véhicule me demande des frais de gardiennage, donc le vendeur refuse de les payer donc ne récupère pour l’instant pas le véhicule.
Est-ce à moi de les régler ?
Est-ce que le garage peut demander des frais de gardiennage si la voiture n’est pas réparée ou s’il refuse de la reparer ?
L’affirmation que vous énoncez en fin d’article : "pour que des frais de gardiennage soient applicables à un contrat de dépôt ; ce dernier doit être l’accessoire d’un contrat d’entreprise" est à nuancer à mon sens.
La Cour de cassation ne fait que poser une présomption de caractère onéreux dès lors que le contrat de dépôt est l’accessoire du contrat d’entreprise ; ainsi il ne faut pas croire qu’elle décide de faire de l’existence d’un contrat d’entreprise une condition sine qua none du caractère onéreux d’un contrat de dépôt. Simplement, en l’absence de contrat d’entreprise il n’y aura pas de présomption de caractère onéreux du contrat de dépôt, ce sera au garagiste de démontrer le caractère onéreux du contrat de dépôt.
En effet, on peut très bien imaginer qu’en l’absence de tout contrat d’entreprise entre le client et le garagiste (par exemple dans l’hypothèse où le client a vu l’expert déclarer son véhicule économiquement irréparable, et que l’assureur refuse de lui racheter pour destruction parce que ledit véhicule a été modifié et entraîne une non garantie, ce qui est assez fréquent), le garagiste puisse tout de même démontrer que le dépôt a été effectué à titre onéreux, en l’absence même de tout contrat d’entreprise entre lui et le client.
D’ailleurs, le Code civil reconnaît lui-même que le contrat de dépôt puisse être onéreux en envisageant, dans le cadre des obligations du dépositaire, le cas où il a été stipulé un salaire (art. 1928 c.civ.).
Votre analyse est de nature à induire les consommateurs en erreur et nous ramène plus ou moins à la même conclusion. le précédent ainsi soulevé sera difficilement "déboulonnable" pour un garagiste qui souhaite formuler une telle requête pécuniaire en frais de gardiennage, parce que franchement rapporter la preuve du contrat onéreux risque d’être compliqué pour celui-ci sans évoquer le fait de perdre inutilement le client d’espèce qui partira à l’endroit de la concurrence.
Bonjour, j’ai un cas concret.
Hier, vendredi, ma voiture est tombée en panne sur l’autoroute, mon frère la conduisait. Un dépanneur l’a ramenée à son dépôt juste après l’heure de la fermeture. Mon frère n’a rien signé.
Plus tard dans la soirée mon assurance me dit que ce dépanneur demande 12€ par nuit de gardiennage, et que mon assurance ne prendra en charge que le dépanneur qu’ils enverront la récupérer le samedi matin.
J’appelle dont le dépanneur qui a ma voiture ce matin ( samedi), il ne répond pas. Je suis à un peu plus d’une heure de chez lui.
Peut-il me facturer des frais de gardiennage pour ce vendredi et le week-end ?
Cordialement
Bonjour
J’aimerais apporter mon expérience de gérante de carrosserie.
Je suis agréée par des cies d ’assurances. Lors d’un sinistre le sociétaire fait appel à son assistance pour le remorquage ( qui n ’est pas l’assurance ne pas confondre) cette assistance, souvent sans nous prévenir, fait livrer par un dépanneur agrée le véhicule accidenté du sociétaire. En cas de voiture en épave, si le soc est tous risques, il n’ y a pas de pb. si il n’est pas en tort
non plus car il y a passage d’expert et transfert du véhicule chez un épaviste. cela se complique quand le soc est en tort et est au tiers , pour ma part je ne prends pas de frais de gardiennage mais je demande que leur voiture soit enlevée à leur charge sous 8 jours, je propose aussi de la faire enlever par un épaviste pour cela je demande qu il me signe la cg . Malgré cela certains soc ne sont pas sérieux et ne reviennent pas . Alors il ne faut pas s’étonner que nous la profession prenons des frais de gardiennage, mais pour cela il faut le prouver , faire des démarches etc. , passer un temps fou, rappeler les soc afin que ces véhicules ne restent pas chez nous indéfiniment car nous ne sommes pas épavistes. Voila un point de vue de professionnelle Geneviève