L’évolution du contentieux de la responsabilité de l’établissement du fait de ses praticiens salariés, est marquée par une décision du Tribunal des Conflits qualifiant de principe général du droit (PGD), le principe d’indépendance professionnelle dont bénéficie le médecin. Cette position du Tribunal des conflits (I) a été suivie par une jurisprudence qui considérait que le médecin salarié était lié au patient par un contrat. La responsabilité personnelle du médecin salarié pouvait donc être engagée, notamment sur le fondement du principe d’indépendance professionnel (II).
I- La position du tribunal des conflits.
Dans sa décision du 14 février 2000, le tribunal des conflits [1] a érigé au rang des principes généraux du droit, « le principe d’indépendance professionnelle dont bénéficie le médecin dans l’exercice de son art ». Ce principe a pour conséquence d’induire une responsabilité personnelle des médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes.
En effet, en vertu de ce principe d’indépendance professionnelle, les patients ou usagers peuvent engager la responsabilité des médecins, chirurgiens-dentistes et sages-femmes, sur le fondement de l’article 1382 et suivant du Code civil. Le Tribunal des conflits affirme ainsi « qu’il est loisible au patient, indépendamment de l’action qu’il est en droit d’exercer sur le fondement contractuel à l’encontre d’un établissement de santé, de rechercher sur le terrain délictuel la responsabilité du praticien, lorsque dans la réalisation d’actes médicaux, celui-ci a commis une faute ». Le principe d’indépendance professionnelle n’est donc pas incompatible avec l’existence d’un lien de subordination.Tribunal des conflits secteur de santé.
II- La responsabilité personnelle du médecin salarié sur le fondement du principe d’indépendance professionnel.
Au travers de cette jurisprudence, on constate que la Cour de cassation admet « en même temps que la responsabilité contractuelle de l’établissement de santé, la responsabilité délictuelle du fait personnel de son médecin salarié, sur le fondement de la faute médicale commise » [2].
Le professionnel de santé salarié était donc considéré comme un « salarié à part » [3]. Ce « professionnel libéral salarié » apparaissait ainsi comme « l’archétype du salarié para-subordonné » [4] .
Dans une décision du 13mars 2001 [5], la jurisprudence de la Cour de cassation avait d’ailleurs étendue la responsabilité du médecin salarié, aux fautes commises par son équipe de soin, en considérant qu’ « en vertu de l’indépendance professionnelle dont le médecin bénéficie dans l’exercice de son art, il répond des fautes commises au préjudice des patients par les personnes qui l’assistent lors d’un acte médical d’investigation ou de soins, alors même que ces personnes seraient les préposées de l’établissement de santé où il exerce ».
La Cour de cassation considérait également que l’établissement et son assureur pouvaient convenir d’un recours en raison du principe d’indépendance du médecin dans l’exercice de son art [6].
Initialement, la jurisprudence considérait donc que le médecin salarié était lié au patient par un contrat. Cependant, par un revirement de jurisprudence, la Cour de cassation a remis en cause ce principe (§II).