« Les soirées post-ASH constituent du temps de travail effectif même si le salarié dispose pendant ces soirées d’une liberté de mouvement » décide la Cour de Cassation, dans un arrêt du 5 mai 2010, n°08-44.895.
Les faits : par lettre du 5 novembre 2003, un visiteur médical a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur, en invoquant une série de griefs parmi lesquels, le non paiement de soirées « post –ASH » (ou cocktails dinatoires de nature professionnelle).
Il a, ensuite, saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes tendant à faire produire à sa prise d’acte les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à condamner son employeur à verser différentes sommes.
La Cour d’Appel de Rennes a condamné l’employeur à verser au salarié une certaine somme à titre de rappel de salaires pour les soirées post-ASH ; elle a ainsi relevé, qu’au cours, des soirées post-ASH, le salarié était à la disposition de son employeur et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à ses occupations, tout en constatant ensuite que le salarié disposait d’une liberté de mouvement au cours des ces soirées qui prenait la forme de cocktails dînatoires.
Néanmoins, la Cour d’appel a considéré que la prise d’acte s’analysait comme une démission.
L’employeur a alors formé un pourvoi contre la décision en invoquant la contradiction des motifs du jugement de la Cour d’Appel et que cette contradiction équivaut à un défaut de motifs. Pourtant, la Chambre Sociale a rejeté le pourvoi de la Société sur ce point et approuve ainsi la solution des Juges du fond. Toutefois, elle casse l’arrêt en ce que les Juges de fond ont jugé que la prise d’acte produisait les effets d’une démission.
On pourrait effectivement penser que lors de ces soirées, le salarié, étant libre de ses mouvements, puisse passer « du bon temps » et ne pas travailler, pour autant il est toujours sous la subordination de son employeur et ne peut pas agir de façon totalement libre comme s’il avait été en « soirée personnelle ».
Cette position s’inscrit bien dans la problématique actuelle de la définition du temps de travail, travail effectif, heures d’équivalence.
La Cour de Cassation par cet arrêt, encadre et définit une partie des heures passées pour le compte de l’employeur mais, hors des heures de travail habituel.
Cette jurisprudence se trouve très favorable pour de nombreux salariés (les Médecins, les Commerciaux, les Directeurs…) dont la présence, la représentation à des soirées, cocktails, conférences font partie intégrante de leurs fonctions.
D’ailleurs, pour aller jusqu’au bout du raisonnement de la Cour de Cassation, ces temps de cocktails, s’ils ont lieu pendant une partie de la nuit, devraient faire l’objet des majorations des temps de travail de nuit, selon les règles légales et conventionnelles applicables.
Et à cet égard, on ne peut qu’inviter les DRH à comptabiliser désormais les temps de cocktails dans le temps de travail effectif.
Frédéric CHHUM - Avocat
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