L’article 9 du Code civil nous rappelle que chacun a droit au respect de sa vie privée.
L’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales rappelle aussi que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
Et l’article 9 du code de procédure civile rappelle qu’il appartient à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention
Un jour, un homme réparait le puits d’une personne quand la charpente le surplombant s’est effondrée sur lui.
Au cours des opérations d’expertise judiciaire diligentée à sa demande, il a invoqué des troubles importants de la marche, devant se déplacer en appui sur une canne.
La compagnie d’assurances susceptibles d’indemniser avait saisi un détective privé.
Celui-ci voit la victime tenir une canne à la main, marcher en appui le dos courbé en claudicant pour pénétrer chez un agent général d’assurances, partir avec une conduite normal… puis changer de comportement en roulant à vive allure, sauté de son véhicule et filer en courant jusqu’à un pavillon face auquel il est garé.
Pour tout dire, l’assureur avait décidé de pas moins de quatre enquêtes, l’une ayant duré deux mois, au cours desquels ont été interrogés les voisins, le maire du domicile ainsi que le personnel de la mairie ; les « notables » ont été consultés, le registre du commerce, les immatriculations des véhicules tant s’agissant de l’assuré que sa compagne.
L’assuré a été pris en photos. Des filatures de plusieurs heures, impliquant notamment de suivre l’assuré lors de visites privées sont intervenus comme ont été évoquées des disputes de voisinage totalement étranger au litige.
Or, il convient que la réalisation par des enquêteurs privés à la requête d’un assureur de diligence, impliquant l’immixtion dans la vie privée soit proportionnelle au but recherché, c’est-à-dire la mise en œuvre du droit à la preuve de l’assureur.
Dans un arrêt du 25 février 2016 (15–12403) la Cour de cassation rappelle que le droit de la preuve ne peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie privée qu’à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.
Et elle relève que les investigations telles que ci-dessus décrites, si on les considérait, dans leur ensemble constituaient, par leur durée leur ampleur, une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de la personne surveillée
C’est ainsi que le rapport du détective doit en ce cas être écarté des débats.
Discussions en cours :
Maître,
Merci pour cet article relatif à cette récente décision qui nous confirme une jurisprudence déjà bien établie en la matière.
En effet, si une filature organisée par un assureur peut laisser penser à une atteinte à la vie privée de l’assuré, elle n’en demeure pas moins validée si elle est organisée sur la voie publique tout en restant proportionnée au regard de la nécessaire et légitime préservation des droits de
l’assureur et des intérêts de la collectivité des assureurs.
Ces conditions édictées par une précédente décision (Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 31 octobre 2012, 11-17.476) n’ayant pas été respectée par cet enquêteur, il est à mon sens tout à fait normal que son rapport ait été écarté.
Bonsoir Maître et merci pour cet article très intéressant.
Rappelons que l’intervention d’un détective est encadré par trois principes généraux sur lesquels il ne peut transiger :
A cela s’est progressivement ajouté le principe de proportionnalité qui est aujourd’hui aussi important que les trois premiers.Ainsi, le détective doit adapter sa méthodologie d’intervention selon le type de dossier. Pour information, le rapport d’un détective privé ayant effectué une filature de plusieurs mois pour une affaire d’adultère a été jugé disproportionné et non versé comme pièce de procédure aux débats.
La licéité de la preuve est donc, comme vous l’avez parfaitement énoncé, établie sur la base de l’article 9 du Code civil mais aussi de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales. On entend par licéité la conformité de la preuve à l’ensemble des règles de droits en vigueur.
Via ce principe de proportionnalité, le juge autorise donc des ingérences pour autant que ces dernières soient mesurées et surtout nécessaires N’oublions pas non plus que le droit au respect de la vie privée est un droit non absolu...donc soumis à des ingérences pour autant qu’elles soient légales et justifiées.
bonjour maître
un détective privé enquête sur un couple pdt un divorce afin de prouver l’adultère. Le détective suit la conjointe de la femme trompée jusqu’à son travail et va même jusqu’à téléphoner au travail. Les rapports de travail change après les coups de téléphone le patron voit çà d’u mauvais œil et demande le licenciement de la personne pour terminer sur une rupture conventionnel forcée. Y’a t’il violation de la vie privée et possibilité de recours sur une procédure.
D’avance merci pour votre réponse