En l’espèce, la SCI Alpanga s’était vu, tacitement, délivrer un permis de construire en vue de l’extension et de la surélévation d’une maison d’habitation.
Des tiers au projet ont contesté la légalité de ce permis.
Par un jugement en date du 4 novembre 2010, le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté leur requête.
Ces derniers ont alors interjeté appel de ce jugement et en ont obtenu l’annulation par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux en date du 29 mars 2012.
Ladite Cour a également annulé le permis délivré en considérant que la SCI n’avait pas sollicité l’autorisation de démolit une partie de la construction existante alors que les travaux envisagés impliquaient nécessairement une telle démolition.
En somme, la SCI pétitionnaire aurait dû solliciter la délivrance d’un permis de construire valant permis de démolir, en application des dispositions de l’article L. 451-1 du code de l’urbanisme.
Cette dernière a alors formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.
Après avoir écarté comme étant irrecevables les écritures des tiers ayant obtenu l’annulation du permis litigieux, en raison de l’absence de ministère d’avocat au Conseil et à la Cour de cassation, malgré une invitation à régulariser sur ce point, le Conseil d‘Etat est venu définir la notion d’opération de démolition et par la même, préciser quand il est nécessaire de solliciter un permis de démolir en sus d’un permis de construire ou un permis de construire valant permis de démolir.
En effet, au visa des articles R. 421-27 et R. 421-28 du Code de l’urbanisme, constitue une opération de démolition les travaux qui impliquent la démolition totale d’un bâtiment ou la démolition d’une partie substantielle de celui-ci et le rendant inutilisable.
La Haute Assemblée retient donc en cette matière une définition stricte de l’opération de démolition telle qu’elle est envisagée par le code.
Ce n’est pas la première fois, et tout naturellement, que le Conseil d’Etat vient apporter une définition jurisprudentielle d’une opération ou d’un type de bien en matière d’urbanisme.
Ce dernier avait notamment procédé de la sorte l’an dernier en apportant une définition jurisprudentielle de la notion de bâtiment [1].
Tirant les conséquences de ces éléments, les juges du Palais Royal ont confirmé l’arrêt de la Cour et rejeté le pourvoi formé par la SCI requérante.
En effet, les travaux envisagés par ladite SCI tendaient notamment à démolir la charpente et la toiture existantes et à démolir partiellement plusieurs façades.
L’ampleur de l’atteinte portée au gros œuvre du bâtiment était patente en l’espèce.
A contrario la jurisprudence a déjà pu considérer que la suppression de l’emprise quelques centimètres d’une construction sur un terrain voisin [2] ou les travaux d’aménagement consistant à un simple démontage des habillages de façade en contreplaqué pour les remplacer par d’autres ne constituaient pas des opérations de démolition impliquant la délivrance d’un permis de démolir [3].
Il convient de souligner que la Cour administrative de Marseille avait également pris en compte l’absence d’atteinte au gros œuvre pour déterminer si un permis de démolir était ou non nécessaire.
Le fait de porter atteinte au gros œuvre semble, assez logiquement, impliquer qu’il s’agisse, au moins partiellement, d’une opération de démolition.
Il conviendra d’être attentif à l’appréciation que va retenir le juge administratif pour déterminer si une atteinte est ou non substantielle et notamment dans l’hypothèse où les travaux ne porteraient pas sur le gros œuvre.
En effet, la définition retenue par le Conseil n’exclut pas qu’un permis de démolir ou un permis de construire valant permis de démolir doive être sollicité lorsque plusieurs démolitions partielles d’un bâtiment sont nécessaires à la réalisation d’un projet.
Références : CE, 14 mai 2014, SCI Alpanga, n°359847 ; CE, 20 mars 2013, n°350209 ; CE, 8 juillet 1998, Epoux Gonnin, n°171852 ; CAA Marseille, 12 février 2004, Association information et défense de Cannes, n°99MA01926