Le droit à la déconnexion fera, grâce à la loi travail El Khomri, partie des prochaines négociations annuelles « égalité professionnelle et qualité de vie ». Dans une société de plus en plus connectée, le législateur estime indispensable de prévoir des règles visant à inciter, voire à imposer des outils tendant à la préservation de la vie privée et familiale et au respect des heures de repos quotidien et hebdomadaire.
Il est clairement indiqué que : « Les modalités du plein exercice par le salarié de son droit à la déconnexion et la mise en place par l’entreprise de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques, en vue d’assurer le respect des temps de repos et de congé ainsi que de la vie personnelle et familiale. À défaut d’accord, l’employeur élabore une charte, après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. Cette charte définit ces modalités de l’exercice du droit à la déconnexion et prévoit en outre la mise en œuvre, à destination des salariés et du personnel d’encadrement et de direction, d’actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques. »
Outre la charte rendue obligatoire dans les entreprises de plus de 50 salariés, la mise en place de ce droit à la déconnexion pourra passer par la note de service, le courrier ou encore l’envoi d’un mail global à l’ensemble des salariés.
Les entreprises peuvent également faire preuve d’imagination lorsque le texte vise la mise en place de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques. Cela peut s’illustrer par l’envoi différé de mails pour l’ensemble des salariés, le blocage de la messagerie à certaines heures hors bureau, l’effacement automatique des mails reçus alors même que le salarié est en congés, etc.
Cependant, au sein de cette même loi, figure également la large incitation au développement du télétravail pour lequel des négociations devaient avoir lieu depuis le 1er octobre 2016. Parmi les thèmes de cette concertation entre les partenaires sociaux figurent la charge de travail et l’articulation vie privée/vie professionnelle. Autrement dit, des sujets communs avec droit à la déconnexion.
Nous nous trouvons alors devant une injonction paradoxale : d’un côté la limitation de la connexion, autrement dit la limitation d’un temps de travail, et de l’autre le télétravail, posant l’autonomie dans l’organisation du temps de travail.
Même si le forfait cadre ce temps de travail pour un certain nombre de salariés, cette injonction fait immanquablement naître (ou renforce tout du moins) de nouveaux types de risques. Le télétravail suppose une grande autonomie du salarié dans l’organisation de son temps de travail, encore plus forte que celle d’un cadre présent chaque jour dans les bureaux de l’entreprise.
Comment un employeur, soumis à de nouvelles obligations de contrôle du temps de travail, pourrait-il combiner cela avec le développement du télétravail ? Comment faire pour que le droit à la déconnexion ne rende pas plus risquée la mise en place du télétravail ?
La loi travail ne laisse pas sans arme les employeurs. Suite à la concertation sur le développement du télétravail, souvent synonyme de qualité de vie au travail, un guide des bonnes pratiques doit être créé par les partenaires sociaux et pourra servir de document de référence lors de négociation d’une convention ou d’un accord d’entreprise.
Mais un guide des bonnes pratiques sera-t-il suffisant pour aider l’entreprise à sécuriser ses pratiques ?
Alertées, les entreprises se doivent d’être attentives, car les risques liés à cette injonction sont de plusieurs natures : risques prud’homaux, risques vis-à-vis de la DIRECCTE (protection des salariés), risques URSSAF (les éléments de compensation financière). Les risques psychosociaux et les accidents du travail, liés au développement du télétravail sont également à envisager pour qu’ils soient anticipés et prévenus. Il semblerait bien alors que la clé se trouve dans la prévention, une prévention nouvelle, construite et spécifiquement dédiée au télétravail.