Changer d’enseigne (devient possible).

Par Luc-Marie Augagneur, Avocat.

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Voici déjà plusieurs années, j’avais montré comment certains réseaux de franchises de la distribution organisent l’extrême difficulté pour leurs franchisés à changer d’enseigne. J’avais fait valoir que l’arsenal de clauses qui font obstacle à cette mobilité sont souvent anticonstitutionnelles -notamment les clauses de non réaffiliation.

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A l’époque, malgré quelques frémissements, les juridictions étaient plutôt bienveillantes à leur égard, et admettaient généralement leur validité. D’autant que de nombreux contrats contraignent les franchisés à recourir à l’arbitrage qui, déjà à l’époque, manquait parfois de transparence sur les conflits d’intérêt.

La mobilité des franchisés s’en trouvait considérablement restreinte et il était difficile de rejoindre un réseau jugé plus performant sans craindre le courroux judiciaire de l’ancien franchiseur. Ce dernier, aussitôt la fin du contrat, s’efforçait de faire descendre l’enseigne et de faire interdire la vente de produits de marque de distributeurs concurrents au sien, au motif que la clause de non réaffiliation l’interdisait.

Depuis, le vent jurisprudentiel a tourné.

Dans un premier temps, l’Autorité de la Concurrence a rendu un avis en 2010dans lequel le gendarme de la concurrence a effectivement jugé que de nombreux dispositifs anti-fuite des réseaux conduisaient à des rentes de situation sans justification économique.

Elle déduisait que ces clauses constituaient des arrières d’entrée sur le marché pour les autres réseaux.

Mais cet avis, même s’il a été suivid’un autre avis en 2012 portant sur le marché parisien, ne sanctionnait aucune situation particulière.

Encore fallait-il que les juridictions le reçoivent et l’appliquent sans se défausser.

Plusieurs décisions rendues depuis confirment cette tendance dans les faits. Par un premier arrêt du 6 mars 2013, la Cour d’appel de Paris, seule compétente pour juger les recours impliquant les règles de droit de la concurrence, a en effet annulé une clause de non réaffiliation par une motivation circonstanciée.

Plus récemment, par un arrêt du 3 avril 2013, elle a jugé qu’une clause de non réaffiliation d’une durée d’une année pour un périmètre de 5 kilomètres n’était pas justifiée par « le maintient de l’identité commune et de la répartition du réseau ». Elle en déduit qu’elle est anticoncurrentielle et qu’elle ne peut bénéficier du règlement d’exemption européen définissant les clauses présumées licites des accords de distribution.

Au passage, la Cour écarte l’application des clauses d’approvisionnement prioritaire pendant la durée du contrat de franchise pour les produits de marque nationale.

En d’autres termes, autant le franchiseur peut imposer à son franchisé de s’approvisionner en produit MDD correspondant à l’enseigne, autant elle ne peut interdire à ce franchisé de s’affilier à une autre centrale pour les autres produits.

Rien là que de très logique.

Mais les évidences aujourd’hui ne sont pas celles d’hier…

Luc-Marie AUGAGNEUR, avocat associé Lamy & Associés

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