Le CDD est conçu par le droit du travail comme un véritable engagement de l’employeur comme du salarié à exécuter le contrat de travail pendant une période donnée. Les hypothèses dans lesquelles le contrat peut être rompu avant son terme sont limitées.
Le CDD peut toujours être rompu par accord entre le salarié et l’employeur. Cette hypothèse ne doit pas être confondue avec la rupture conventionnelle laquelle n’est pas admise en matière de CDD. La rupture d’un commun accord ne donne droit à aucune indemnité, si ce n’est l’indemnité de précarité.
En dehors de cet accord, chaque partie peut prendre l’initiative de la rupture dans des cas limitativement énumérés par le code du travail.
Dans quelles hypothèses l’employeur peut-il prendre l’initiative de la rupture ?
L’article L1243-4 du Code du travail prévoit 3 cas de rupture à l’initiative de l’employeur :
« La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L1243-8 ».
De jurisprudence constante, ces dispositions s’appliquent même si le contrat n’a pas commencé à être exécuté :
« Vu les articles L1243-1 et L1243-4 du Code du travail ;
Attendu qu’il résulte de ces textes que dès lors qu’un contrat de travail à durée déterminée a été conclu, sa rupture à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas mentionnés au premier de ces textes, ouvre droit pour le salarié à des dommages-intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, peu important que l’exécution du contrat n’ait pas commencé, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat » [1].
La faute grave du salarié est celle qui rend impossible son maintien dans l’entreprise. Cette notion ne présente aucune spécificité en matière de rupture anticipée de CDD.
L’inaptitude médicalement constatée ne présente pas non plus de particularité.
La force majeure mérite, en revanche, quelques précisions. Elle est admise avec beaucoup de précaution par la Cour de cassation.
L’article 1218 du Code civil définit la force majeure comme suit :
« un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriée ».
Appliquée à la rupture anticipée du contrat de travail, la force majeure doit avoir « pour effet de rendre impossible la poursuite du contrat de travail » [2].
Selon la Cour d’appel de Paris :
« l’impossibilité doit être absolue et ne pas se limiter à des difficultés d’exécution » [3].
Ainsi, la Chambre sociale a retenu la force majeure s’agissant de :
la destruction totale ou partielle des locaux, à la suite d’un sinistre, à la condition que la reprise de l’exploitation, après reconstruction, et par là celle des contrats de travail, soit impossible [4].
le retrait d’autorisation à un salarié d’exercer sa profession [5].
En revanche, la force majeure n’a pas été retenue dans les cas suivants :
suppression du poste du salarié remplacé à la suite d’une réorganisation de l’entreprise [6] ;
fermeture pour motif économique d’un magasin [7] ;
liquidation judiciaire de l’entreprise [8] ;
refus de l’entreprise dans laquelle l’employeur comptait envoyer le salarié embauché sous contrat à durée déterminée et mis à disposition [9].
Dans quelles hypothèses le salarié peut-il prendre l’initiative de la rupture ?
Le salarié peut décider de rompre le contrat de travail lorsqu’il peut justifier de la conclusion d’un contrat de travail à durée indéterminée. Dans ce cas, le CDD prend fin à sa demande mais le salarié perd le bénéfice de l’indemnité de précarité.
La faute grave de l’employeur fait également parti des motifs de rupture anticipée du CDD. En ce sens, la Cour de cassation a considéré que le salarié était fondé à s’estimer « libre de tout engagement » dès lors que l’employeur ne payait pas les salaires convenus [10].
La haute juridiction va même, dans sa jurisprudence récente, jusqu’à considérer que le non-paiement des salaires d’un salarié en CDD s’analyse en une rupture de fait du contrat de travail à durée déterminée à l’initiative de l’employeur [11].
La rupture étant imputable à la faute de l’employeur, elle s’analyse en une rupture anticipée et abusive du CDD.
Quelles sont les sanctions encourues en cas de rupture anticipée abusive ?
Aux termes de l’article L1243-4 du Code du travail :
« La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 ».
Ainsi, le salarié a droit aux indemnités suivantes :
Dommages et intérêts aux moins égaux aux rémunérations qui auraient été perçues jusqu’au terme du contrat – il s’agit d’une indemnisation forfaitaire minimale susceptible d’être augmentée en cas de préjudice subi par le salarié distinct de la perte de rémunération [12] ;
Indemnité de fin de contrat égale à 10% des rémunérations.
S’agissant de la rupture illicite du CDD par le salarié, en cas de préjudice subi par l’employeur, la condamnation au paiement de dommages et intérêts est envisageable.