Dans cette affaire, survenue en août 2014, un couple de retraités a emprunté le petit train de l’Ile d’Oléron, dont le terminus se situe sur la plage de Maumousson ; ils décéderont en se baignant sur cette plage.
La famille du couple défunt exerce un recours devant la juridiction administrative, afin d’obtenir réparation du préjudice subi, du fait du défaut de signalisation de ce site dangereux.
Si un panneau indiquait que la baignade était interdite, il était alors peu visible et tourné vers la mer.
Le Tribunal a retenu le manque d’information propre à l’interdiction de cette plage à la baignade - le rapporteur public relevant une « insuffisance inacceptable de la part de la Commune » - et a condamné cette dernière à verser la somme de 234.000 € à la famille des victimes, en réparation de leurs préjudices moral et affectif.
Par principe, la responsabilité d’une personne publique conduit à l’obligation de réparer le dommage lié à l’action publique.
Pourtant, durant de longues années, l’autorité publique a été considérée comme irresponsable, du fait de sa souveraineté.
Le Tribunal des conflits y a cependant mis un terme par le célèbre arrêt Blanco [1].
Désormais, la responsabilité de l’administration peut être engagée du fait de son action, ou de son inaction, étant observé dans cette dernière hypothèse que même si son refus d’agir est légal, cette circonstance ne doit pas faire obstacle à la réparation du dommage [2].
La signalisation des sites dangereux relève du Maire, à qui il incombe, au titre de ses pouvoirs de police, « de prévenir, par des précautions convenables, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels » [3].
Cette obligation de prévention des accidents, s’impose sur tous les sites du territoire communal présentant des dangers excédants ceux contre lesquels les usagers doivent personnellement et par prudence se prémunir [4].
En pratique, cela suppose pour le Maire de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des personnes sur les sites dangereux du territoire communal, par une signalisation adaptée des dangers et/ou par des mesures de prévention.
Dans les sites aménagés ou surveillés, l’obligation de prévention des accidents est d’autant plus forte.
La carence du Maire à faire usage de ses pouvoirs de police pour assurer la sécurité, la salubrité ou la tranquillité publique, peut être fautive ; elle est alors de nature à engager la responsabilité de la Commune [5].
En matière de carence dans l’exercice des pouvoirs de police, la faute simple est largement retenue [6].
De nombreuses situations sont ainsi susceptibles de donner lieu à l’engagement de la responsabilité des communes, en cas d’absence ou d’insuffisance de la signalisation, ou bien du caractère inadapté de la signalétique mise en place.
Les sites susceptibles d’être concernés sont nombreux.
I- Les sites de baignade.
En instituant une zone spéciale de surveillance des bains, la Commune ne se dégage pas de toute responsabilité pour les dommages susceptibles de se produire sur l’ensemble de ses plages.
Ainsi, que les lieux de baignade soient aménagés ou non, la Commune est susceptible de voir sa responsabilité engagée en cas de survenance d’un accident dû, en tout ou partie, à un défaut de signalisation [7].
Néanmoins, l’obligation de signalisation des sites dangereux qui s’impose au Maire, est moins exigeante lorsque le site n’est pas aménagé (1-), que lorsqu’il est spécialement aménagé pour les activités nautiques et de baignade (2-).
1- Les baignades non aménagées.
De longue date, la jurisprudence exige que, dans les communes balnéaires, le Maire signale, en dehors des zones de baignades aménagées et surveillées, les dangers qui excèdent ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir [8].
Ainsi, dans les sites non aménagés pour les activités nautiques et de baignade, le Maire n’a l’obligation de signaler que les « dangers exceptionnels ».
A titre d’exemple, il a pu être jugé qu’une baignade non aménagée, mais très fréquentée et où se trouvent des blocs de pierre et de ciment, présente un danger excédant ceux que l’on rencontre habituellement dans les cours d’eau de cette nature.
Dans cette hypothèse, le Maire devait donc signaler ce danger exceptionnel [9]
Les pouvoirs de police du Maire en matière de prévention des risques sur les sites dangereux ne lui impose pas seulement de procéder à une signalisation.
Le Code général des collectivités territoriales prescrit en effet que le Maire doit « prévenir, par des précautions convenables » les risques d’atteinte à l’ordre public, ce qui suppose donc une signalisation suffisante et adaptée.
En se bornant à signaler par un panneau sur le chemin d’accès à une plage « baignades dangereuses – courants violents », le juge administratif a estimé que le Maire n’a pas délivré une information suffisamment exacte destinée à avertir les estivants des réels dangers qu’ils encourent à fréquenter cet endroit non aménagé, et a donc commis une faute [10]
Cette dernière décision nous renvoie au jugement récent du Tribunal administratif de Poitiers qui, dans l’affaire dont il était saisi, a considéré que si un panneau était installé sur la plage, il était tourné vers la mer et peu visible, rendant cette signalisation insuffisante au regard de la nature du danger : plage fréquentée, terminus du petit train, dangerosité avérée de la baignade…
2- Les baignades aménagées.
En toute logique, le Maire de la Commune est soumis à une obligation accrue en matière de signalisation des dangers dans les sites de baignade aménagés.
Ainsi, dans les zones aménagées, durant les périodes de surveillance, le Maire est tenu de prendre les mesures destinées à assurer la sécurité, notamment en enlevant les objets décelables, susceptibles de blesser les baigneurs dans la partie proche du rivage où ils peuvent reprendre pied [11]
La Cour administrative d’appel de Nantes a été saisie d’une affaire mettant en cause la responsabilité d’une Commune, à la suite d’un accident survenu après un plongeon de la victime, depuis une plate-forme flottante, équipée d’un plongeoir. Le juge administratif a noté que l’installation ne présentait aucun risque à marée haute, qu’en revanche elle devenait dangereuse lors de l’abaissement du niveau de la mer.
Dans ces conditions, le juge a retenu "qu’aucun dispositif ne permettait aux baigneurs de connaître la profondeur de l’eau ; que l’absence de toute signalisation sur la plage, pourtant dotée d’un poste de secours, ainsi que sur la plate-forme, du danger potentiel lié à la variation de la profondeur de l’eau révèle une carence du Maire dans l’exercice des pouvoirs de police" [12].
L’absence de signalisation du danger particulier présenté par cette plate-forme, à marée descendante, a conduit à retenir la responsabilité de la Commune dans la survenance du dommage de la victime.
Dans une affaire assez similaire, un individu s’est blessé après avoir plongé d’un ponton, situé à l’extérieur de la zone de baignade délimitée, dans une partie du plan d’eau interdite à la baignade.
La Cour administrative d’appel de Bordeaux a constaté qu’un règlement municipal interdisait la baignade, qu’un plan des zones de baignades était affiché sur plusieurs panneau dont l’un à proximité du ponton en question et qu’un autre panneau rappelait qu’en dehors des zones matérialisées la baignade était interdite.
Dans ce contexte, le juge administratif a estimé que « la signalisation des zones d’interdiction de baignade impliquait nécessairement l’interdiction d’y plonger depuis un ponton dépourvu d’aménagement pour cette pratique », excluant ainsi toute responsabilité de la Commune [13].
Les communes littorales, comme l’ensemble des communes disposant de lieux de baignades ou susceptibles d’accueillir des activités nautiques, même non aménagés, doivent ainsi être attentives à l’existence de « dangers exceptionnels », excédant ceux contre lesquels les usagers doivent par prudence se prémunir afin d’y mettre en place une signalisation adaptée, en termes de choix de la signalétique (panneau d’avertissement, barrière, filet de protection…), de son positionnement, sa visibilité, son orientation…
II- Les sites de montagne.
En dehors des pistes de ski aménagées, le Maire n’a l’obligation de prendre des mesures destinées à assurer la sécurité des skieurs qu’en cas de danger exceptionnel (1-) [14]
Sur les pistes aménagées, il appartient au Maire de la commune de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des usagers : signalisation, fermeture des pistes, mesures de prévention ou de protection… (2-).
En zone de montagne, le Maire doit également prendre les mesures destinées à assurer la sécurité des personnes contre le risque d’avalanche (3-).
1- Le ski hors pistes aménagées.
Dans un secteur non aménagé du domaine, face au danger exceptionnel que présentait la proximité d’une dénivellation profonde et abrupte, le Maire, en ne prenant pas, par une signalisation appropriée, les dispositions convenables pour assurer la sécurité des skieurs, commet une faute de nature à engager la responsabilité de la commune [15].
Le caractère adapté ou suffisant de la signalisation dépend notamment des circonstances factuelles.
Aussi, la mise en place d’une signalétique adaptée en montagne suppose par exemple de prendre en compte la configuration des lieux, la présence ou l’absence d’enneigement… Afin d’assurer une signalisation effective en toutes circonstances.
Lors d’un accident survenu en dehors du domaine skiable, la responsabilité de la Commune a néanmoins été retenue, au regard du caractère exceptionnels du risque et de la configuration des lieux : [16]
« … la victime est décédée d’une chute sur un rocher situé au fond du talweg du Rif Brillant ; que le talus présentait, au lieu de l’accident, une profondeur de trois mètres et une largeur de deux mètres ; qu’il était, en raison de la différence d’altitude entre ses deux rives et de l’épaisseur du manteau neigeux, difficilement décelable depuis la table de pique-nique d’où provenait la victime ; qu’alors même que ce talweg était précédé d’une pente douce, le danger présenté par cet obstacle excédait, compte tenu de sa nature et de sa faible visibilité, les dangers contre lesquels les intéressés doivent personnellement, par leur prudence, se prémunir (…) ».
Ici, l’absence de signalisation du danger, qui présentait un caractère exceptionnel, a conduit le juge administratif à retenir la faute de la commune.
De la même manière, en tolérant le passage habituel des skieurs dans une zone hors-piste où se trouvait une clôture, dont la commune connaissait le danger en période de fonte des neiges, et en ne le signalant pas en amont de l’obstacle, le Maire n’a pas pris les dispositions convenables pour assurer la sécurité des skieurs et a commis une faute qui engage la responsabilité de la Commune [17].
2- Les pistes de ski aménagées.
Les pistes de ski aménagées, comme tout site aménagé susceptible de présenter un danger pour les personnes, imposent au Maire d’user de ses pouvoirs de police pour assurer la sécurité des usagers, notamment en procédant à une signalisation suffisante et adaptée des dangers :
Sur une piste de ski aménagée, le fait pour une Commune de ne pas avoir mis en place de protection particulière, ni de signalisation d’un bâtiment qui se trouvait à l’extrémité d’une piste verte destinée aux débutants, est fautif et de nature à engager sa responsabilité.
Le juge administratif retient d’ailleurs la dangerosité accrue du site compte-tenu du faible état d’enneigement : « …ne faisait l’objet d’aucune protection particulière ni d’aucune signalisation en amont au moment de l’accident alors que, situé à la fin d’une piste verte sur laquelle peuvent évoluer des débutants qui ne possèdent pas nécessairement l’ensemble des connaissances techniques pour maîtriser leur vitesse, il présentait un risque grave pour les usagers du domaine skiable, notamment au regard du faible enneigement alors constaté dans la station » [18].
A l’inverse, lorsque le site ne présente pas de danger exceptionnel, aucune signalisation particulière n’est nécessaire.
Dans cette affaire, un accident de luge est survenu sur un chemin à destination des piétons et personnes en raquettes, d’une largeur suffisante, dégagé et rectiligne, depuis lequel l’excavation située en contre-bas était parfaitement visible.
Dans ces conditions, l’accident n’est pas de nature à engager la responsabilité de la commune, qui n’a commis aucune faute quant à l’absence de signalisation, de barrière ou de filet de protection [19].
Il ressort des décisions précitées que l’appréciation du risque et notamment l’existence d’un danger exceptionnel, excédant ceux contre lesquels les personnes doivent se prémunir par leur prudence, résulte aussi des circonstances factuelles, qui peuvent évoluer.
Le Maire doit alors tenir compte de cette évolution du risque (marée montant ou descendante ; niveau d’enneigement…), pour installer une signalisation adaptées en toutes circonstances.
Cette obligation impose aux collectivités de faire preuve d’une grande vigilance, d’une part, dans l’identification des sites dangereux, en toutes circonstances ou dans des conditions particulières, d’autre part, dans la précision et la pertinence de la signalisation mise en place, qui doit être spécifiquement adaptée au risque identifié.
3- Le risque d’avalanche.
Le risque d’avalanche, qui présente un danger certain pour la sécurité des personnes, est lui aussi susceptible de conduire à l’engagement de la responsabilité de la commune, en cas de dommage, lorsque le Maire n’a pas fait usage de ses pouvoirs police en procédant à la signalisation du danger.
Dans une affaire déjà ancienne, les conditions météorologiques et l’enneigement laissaient prévoir un risque d’avalanche quasi-certain. Le Maire de la Commune avait alors mis en place un drapeau annonciateur d’avalanches et fait diffuser une note interdisant la circulation des piétons sur certaines routes du domaine.
Le juge administratif a considéré dans ce cas, qu’en n’interdisant pas totalement l’accès aux immeubles susceptibles d’être atteintes par une avalanche, et en ne diffusant pas plus d’informations à l’usage des nouveaux venus de la station, le Maire avait commis une faute dans l’exercice de ses pouvoirs de police [20].
En revanche, dans une affaire où la Commune avait installé des panneaux, visibles nonobstant les mauvaises conditions climatiques et de couleur rouge, indiquant « itinéraire hors-piste » et « pistes difficiles », sa responsabilité n’a pas été retenue pour absence de signalisation particulière du risque d’avalanche sur le site considéré [21].
III- Les sites naturels.
Au regard de ce qui précède, dès lors qu’un site naturel présente un danger excédant ceux contre lesquels les personnes doivent par prudence se prémunir, une signalisation s’impose.
La question est donc de savoir quels dangers doivent être signalés et comment allier l’obligation de signalisation avec la préservation des paysages dans les sites naturels.
Là encore, la jurisprudence distingue en pratique les cas où le site naturel a fait l’objet d’un aménagement pour la fréquentation du public (1-), des sites naturels sauvages (2-).
1- Les sites naturels aménagés.
Les sentiers de randonnées constituent par exemple des aménagements des sites naturels. Lorsqu’ils présentent un danger qui excède celui auquel les promeneurs doivent se prémunir par leur prudence, c’est-à-dire un « danger exceptionnel », le Maire doit procéder à sa signalisation.
L’exercice peut s’avérer complexe, lorsque le sentier de randonnées chemine à travers plusieurs communes, ou lorsque sa gestion est confiée à un tiers (Communauté de communes, Office National des Forêts…). Néanmoins, une telle circonstance ne peut conduire à exclure toute responsabilité des personnes publiques.
Après la survenue d’un accident grave sur un sentier de randonnées, l’affaire a été portée jusque devant le Conseil d’Etat, lequel a fait grief aux premiers juges d’avoir considéré qu’aucune obligation d’information ou de signalisation ne s’imposait aux différentes collectivités concernées par le site de randonnées en cause.
Cependant, un arrêté préfectoral interdisait la circulation des piétons sur les sentiers de randonnées de la commune, dans un site faisait habituellement l’objet d’une forte fréquentation. De plus, aucune signalisation n’avait été maintenue pour signaler le risque encouru par les promeneurs.
Le Conseil d’Etat a considéré que c’est en commettant une erreur de droit que les premiers juges ont écarté, tant la responsabilité de la Commune, que celle du Préfet qui se devait d’agir en cas de carence du Maire [22].
Dans une affaire concernant un accident survenu sur un chemin de randonnée, en zone de montagne, le juge administratif a écarté la responsabilité de la Commune, en relevant que « un panneau de danger est apposé sur le sentier de la cascade des Anglais avertissant les randonneurs du caractère très accidenté du terrain, leur demandant de rester vigilants et de ne pas utiliser les passerelles de franchissement de la cascade pour jouer ou se balancer. Il ne résulte par ailleurs pas de l’instruction que le risque qui s’est réalisé excéderait les risques ordinaires contre lesquels les randonneurs doivent se prémunir lorsqu’ils circulent sur des sentiers de montagne » [23].
2- Les sites naturels sauvages.
La particularité des sites naturels sauvages est que la multiplicité des dispositifs de signalisation pourrait conduire le public à penser que le site est aménagé et ainsi réduire sa vigilance.
Par conséquent, dans les sites naturels sauvages, sauf danger inhabituel, une signalisation à l’entrée du site ou à un endroit stratégique rappelant le caractère naturel des lieux, les dangers qu’ils présentent et la vigilance dont il convient de faire preuve, est en principe suffisante.
Un accident mortel est survenu, en raison de la chute de plusieurs mètres d’un joggeur qui s’est écarté du sentier forestier aménagé, pour s’enfoncer en forêt dans une zone accidentée. Les circonstances de l’accident ont conduit le juge administratif à écarter toute responsabilité de la commune.
Il a été jugé que « cet accident ne peut être imputé qu’à la seule imprudence commise par M. E qui s’est volontairement écarté du cheminement aménagé pour évoluer dans une zone de dénivellation alors qu’il n’ignorait pas se trouver dans un site naturel » [24].
Sur le terrain, la distinction entre site naturel aménagé et site naturel non aménagé est parfois ténue. Il ressort d’ailleurs de l’arrêt précité que le sentier forestier est considéré comme un espace aménagé, alors que la forêt alentours est regardée comme un site naturel sauvage.
Cette circonstance est appréhendée par le juge administratif, notamment dans l’hypothèse d’un accident survenu dans un site naturel sauvage situé à proximité d’un site aménagé.
La Cour administrative d’appel de Bordeaux a eu à connaître de ce cas de figure, après un accident mortel dû à une chute de rocher lors de la pratique de l’escalade. Cet accident a eu lieu dans un site naturel non aménagé, mais situé à proximité de deux sites d’escalade aménagés.
Cette circonstance a conduit le juge administratif à retenir un partage de responsabilité : « en omettant de prévenir le public des dangers présentés par la falaise située à proximité immédiate du secteur aménagé, et qui était connu de la commune, le maire a (…) commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ».
Mais la victime « en s’engageant ainsi dans un secteur sur lequel il ne disposait d’aucune information précise, il a commis une imprudence de nature à exonérer la commune de la moitié de sa responsabilité » [25].
IV- Exemples d’autres risques.
De nombreux sites sont, par leur nature même, identifiés comme potentiellement dangereux et nécessitant l’adoption de signalisation et de mesures particulières pour assurer la sécurité des personnes, c’est le cas des lieux de baignades, des sites de montagnes et des sites naturels notamment.
Cependant, la jurisprudence nous invite aussi à prendre en considération tout type de danger, notamment les dangers pour la navigation (1-), encore le risque attaché à la présence de requins (2-).
1- Les dangers pour la navigation.
C’est par une décision désormais ancienne que le Conseil d’Etat a estimé, qu’en ne prenant aucune mesure propre à avertir les plaisanciers du danger exceptionnel, constitué par la présence d’une ligne à haute tension (même à hauteur réglementaire), à proximité d’une rampe d’accès des voiliers à un lac, le Maire avait commis dans l’exercice de ses pouvoirs de police, une faute de nature à engager la responsabilité de la commune [26].
Il ressort de cette décision que ce sont précisément les circonstances factuelles qui ont conduit le juge administratif à identifier l’existence d’un « danger exceptionnel », en l’espèce la configuration des lieux, dont il résultait que la ligne haute tension se trouvait à proximité immédiate des voiliers.
Par conséquent et quelque soit la nature du risque, dès lors que le danger excède les dangers contre lesquels les personnes doivent se prémunir par leur prudence, le Maire est tenu de prévenir le risque d’atteinte à la sécurité, en procédant à une signalisation adaptée.
2- Le risque de requins.
Le cas des attaques de surfeurs ou baigneurs par des requins a récemment fait couler beaucoup d’encre, interrogeant les communes concernées, sur l’île de la Réunion notamment, quant à leur responsabilité.
Par une décision récente, la Cour administrative d’appel de Bordeaux est venue utilement préciser les limites de la responsabilité des communes en la matière [27].
Dans cette affaire, le juge administratif a exclu la responsabilité de la commune dans la survenue de l’accident du surfeur, qui a été attaqué par un requin.
La cour administrative d’appel a tout d’abord tenu compte de la signalisation mise en place par la commune et de l’identification de la dangerosité des lieux par un arrêté municipal y interdisant la baignade : "Cette partie du rivage qui ne constituait pas un lieu de baignade présentant une garantie suffisante pour la sécurité des baignades et des activités nautiques, était signalé comme " accès et site dangereux, à vos risques et périls, baignade interdite" par un arrêté du maire (…), qui au demeurant était matérialisé, par un panneau explicite quant à la dangerosité des lieux sur lequel était mentionné : " baignade interdite, site dangereux, accès à vos risques et périls".
Dans un second temps, le juge administratif retient également la connaissance des lieux par la victime, sa qualité de surfeur expérimenté et la réalisation de campagnes d’information par la commune.
Le juge administratif indique ainsi explicitement qu’il appartenait à l’intéressé de « se prémunir par un comportement prudent et adapté aux circonstances dans lesquelles il pratiquait son activité sportive ».
On comprend à la lecture de cette décision, qu’en présence d’un danger identifié et signalé de manière appropriée par le Maire de la commune en vertu de ses pouvoirs de police, il appartient aux personnes d’adopter un comportement prudent adapté aux circonstances, c’est-à-dire un comportement adapté au « danger exceptionnel » signalé.
La responsabilité de la commune n’exclut pas toute responsabilité de la victime qui, parfois, ne fait pas preuve d’une prudence suffisante compte-tenu des circonstances !
A titre d’exemple, dans un cas de ski hors-piste, sur une partie du domaine connue pour la présence d’une dénivellation profonde et abrupte, le juge administratif a conclu au partage de responsabilité pour moitié, entre la commune qui ne l’avait pas signalé et le skieur victime qui « connaissait les lieux et n’a pas fait preuve de la prudence qui s’imposait particulièrement à lui alors qu’il circulait hors de toute poste balisée » [28].
En d’autres termes, lorsque les lieux sont signalés comme présentant un danger, il appartient aux personnes qui les fréquentent de faire preuve d’un comportement prudent et adapté aux circonstances, d’autant plus lorsqu’il est établi que ces personnes sont expérimentées ou qu’elles connaissent les lieux [29].
Partant, le juge administratif recherche l’existence d’une faute imputable à la commune pour retenir sa responsabilité, en prenant en compte la nature du danger, qui doit être exceptionnel c’est à dire excéder le risque normal contre lequel les personnes doivent par leur prudence se prémunir.
Pour autant, le juge administratif n’exige pas que le Maire, au titre de ses pouvoirs de police, réglemente l’ensemble de son territoire, ni qu’il réduise à néant tout risque d’accident [30].