La réforme de la réglementation des lotissements résultant de la Loi ALUR.

Par Laurent Latapie, Avocat.

189635 lectures 1re Parution: 66 commentaires 4.96  /5

Explorer : # réforme de l'urbanisme # densification des lotissements # cahier des charges # loi alur

La réforme de la Loi ALUR impacte en profondeur les règles d’urbanisme dans les lotissements. Ainsi, et nonobstant le cahier des charges ou le règlement de lotissement pouvant exister, force est de constater que le coloti qui le souhaite peut désormais passer outre ces textes pour envisager toute modification construction ou extension de son bien.

-

Il convient de s’intéresser à la question de la réglementation des lotissements suite à la récente réforme issue de la Loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et à l’urbanisme rénové, la fameuse « Loi Alur »,

En effet, la loi ALUR a notamment revisité le code de l’urbanisme afin de favoriser la densification des lotissements dans l’ensemble des communes, même au cœur de quartiers initialement résidentiels et initialement exclusivement composés de maisons individuelles et de villas.

L’objectif, clairement avoué de la loi, est de densifier les gisements fonciers en ne restreignant plus les droits à construire dans les lotissements.

Ainsi l’article L442-9 du code de l’urbanisme prévoit que les règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement deviennent caduques au terme de 10 années à compter de la délivrance du permis d’aménager si à cette date le lotissement est couvert par un PLU ou un document d’urbanisme en tenant lieu.

Avant toute chose, il convient de rappeler quels sont les documents du lotissement, puisque se distinguent en leur sein le cahier des charges du règlement de lotissement proprement dit,

Le cahier des charges renseigne sur les droits et les obligations des colotis (c’est-à-dire des propriétaires).

C’est un document de droit purement privé, établi de manière contractuelle. Il n’est pas obligatoire. Il permet de fixer les règles internes du lotissement en ce qui concerne l’implantation des maisons, l’interdiction de construire sur certaines parties du lot, la destination des constructions, les règles précises d’urbanisme concernant éventuellement les clôtures et les plantations, etc. Fixer les droits et les obligations des colotis et régir la vie collective en lotissement : voici les deux rôles principaux du cahier des charges !

Le règlement de lotissement impose quant à lui des règles d’urbanisme, notamment sur le plan architectural, que doivent respecter les futures constructions : emploi d’un certain type de matériaux, implantation des bâtiments, l’aspect extérieur des constructions ou des clôtures… etc.

Ces règles peuvent être beaucoup plus strictes que celles prévues par le PLU applicable sur la commune.

Toutefois, et réforme faisant, la loi ALUR a supprimé la possibilité pour les colotis de demander le maintien des règles issues des documents du lotissement à l’issue de délai précité de 10 années à compter de la délivrance du permis d’aménager.

L’article L 442-10 du code de l’urbanisme prévoit que les documents du lotissement peuvent être modifiés par l’autorité compétente, après accord de la majorité qualifiée des colotis.

Il en va de même des subdivisions des lots, en vertu de l’article L 442-12 du code de l’urbanisme.

Cet article assimile en effet les subdivisions de lots à des modifications des règles du lotissement.

La loi ALUR précise que la procédure de modification des lotissements s’applique aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés…

Mais qu’entend-on par “stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés” ? :

Initialement et historiquement, le cahier des charges de lotissement peut avoir une valeur réglementaire qui résulte de son approbation par le Préfet. Cependant, depuis le 1er janvier 1978, date d’entrée en vigueur du décret n° 77-860 du 26 juillet 1977, le cahier des charges n’est plus approuvé par le Préfet, les dispositions réglementaires en question sont désormais insérées au sein du règlement du lotissement.

Autrement dit, seuls les cahiers des charges antérieurs à 1978 peuvent encore être dotés d’une valeur réglementaire et être opposé à celui qui veut édifier ou procéder à l’extension d’un édifice en respectant les dispositions du PLU, mais sans respecter le cahier des charges du lotissement.

La loi ALUR, du 24 mars 2014, met fin à la force juridique et à l’opposabilité du cahier des charges, celles-ci étant désormais caduques.

L’application de la règle de caducité aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés est immédiate.

Il en va de même, s’agissant du droit au maintien des règles à l’issue du délai de 10 ans à compter de la délivrance du permis d’aménager.

Ainsi, concernant les lotissements anciens, pour lesquels les colotis avaient exercés ce droit au maintien avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR, les règles propres au lotissement en question ne sont plus applicables depuis le 27 mars 2014.

L’application de la procédure de modification des documents du lotissement aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés s’applique depuis le 27 mars 2014.

La réduction de la majorité qualifiée des colotis requise pour la modification des documents de lotissement et la subdivision de lot est également d’application immédiate.

L’application de la procédure de mise en concordance des documents du lotissement avec les dispositions du document d’urbanisme, aux stipulation des cahiers des charges non approuvés, s’applique depuis le 27 mars 2014.

Les stipulations non réglementaires des cahiers des charges de lotissement non approuvés ayant pour objet ou pour effet d’interdire ou de restreindre le droit de construire ou encore d’affecter l’usage ou la destination d’un immeuble continuent aujourd’hui à produire leurs effets,

Cependant, elles deviendront aussi caduques à compter du 26 mars 2019 comme le prévoit les textes, sauf à ce que les colotis maintiennent ces stipulations en publiant le cahier des charges du lotissement au bureau des hypothèques ou au livre foncier avant cette date.

Ainsi, cette réforme dite de la Loi ALLUR qui touche de nombreux domaines impacte considérablement les droits des lotissements et permet aux colotis qui le souhaitent de procéder à des modifications, constructions, extensions ou changements qu’ils souhaitent sans pouvoir se voir opposer la force du cahier des charges ou du règlement de lotissement, avec les conséquences en terme de relations de voisinage que cela peut comporter...

Laurent Latapie,
Avocat à Fréjus et Saint-Raphaël, Docteur en Droit,
Barreau de Draguignan
www.laurent-latapie-avocat.fr

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

1914 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 19 avril à 07:41
    par M B , Le 4 avril 2022 à 08:05

    Existe-t-il t il des notaires spécialisés dans ce domaine ?

    • par JOSE RODRIGUEZ , Le 21 août 2022 à 09:33

      Je ne suis pas d’accord pour continuer à payer les travaux d’aménagement de ce lotissement vieux de quarante ans. que dois je faire ?

    • par laurent latapie avocat , Le 21 août 2022 à 15:59

      cher Monsieur,
      j’ai pris bonne note de votre mail,
      il me faudrait plus d’éléments que je puisse vous donner mon avis sur pièces,
      notamment votre acte de propriété, le règlement et le cahier des charges, ainsi que les statuts du lotissement si vous les avez, et éventuellement la dernière AG si il y en a eu une
      mon mail est : latapie.avocat chez hotmail.fr
      dans cette attente
      bien à vous
      Laurent Latapie Avocat

    • par PSYSAM , Le 19 avril à 07:41

      Bonjour,

      Je suis propriétaire d’une maison (et de son terrain) dans un lotissement et l’AG souhaite intégrer une clause d’usage d’habitation exclusif sur les maisons dans le règlement du lotissement pour exclure les professions et établissements recevant du public.

      Je suis psychologue en professions libérale et je reçois des clients au rez de chaussée dans ma maison, quels sont mes moyens de recours ? Cette clause est elle légale ? Que se passe t’il si je continue à recevoir mes clients après la mise en place de cette clause ? Merci pour votre réponse.

  • par Pillon Thierry , Le 31 mars 2023 à 12:32

    Le PA10 du lotissement ( lotissement assez récent ) précise : PA10 III : sont admises « les constructions à usages d’habitations ». PA10 IX : « chaque lot comprendra, au maximum, une construction principale ». Mais il n’est pas précisé clairement que sont interdit deux logements sur un même lot. Question : concernant un permis accordé pour une grande bâtisse ( donc bien "une seule construction principale" ), est il possible de déposer un PC modificatif ( les travaux sont bien avancés mais non terminés ) pour la création de 2 logements dans cette bâtisse ? Le but étant, après accord du PC modificatif, de pouvoir faire poser 2 compteurs électrique et 2 compteurs d’eau. Sachant que rien d’autre n’est modifié ( ouvertures, implantation, surfaces, accès, ... ) et la demande initiale a été accordée avec 4 places de stationnement en surface qui suffisent pour 2 logements. La demande de PC modificatif ne prévoit aucunement la division du terrain ( qui est, elle, interdite ), il y aurait bien 2 logements mais toujours un seul propriétaire. Une telle demande a t elle une chance d’être accordé ? Merci pour vos réponses et vos avis. Cordialement.

  • par REVERDY , Le 24 mars 2023 à 23:09

    Bonjour,
    La loi ALUR traite le cas où le règlement du lotissement est plus contraignant que le PLU.
    Quand est-il du cas ou le règlement du lotissement est moins contraignant que le PLU et que ce règlement et cahier des charges ont été renouvelés tous les dix ans ?
    Le PLU s’appliquera t’il automatiquement au bout de 5 ou 10 ans ?
    Exemple : le règlement du lotissement indique hauteurs murs autour des propriétés = 2,00 m maxi et le PLU indique 1,50 m. Le règlement devrait il passer à 1,50 m pour tous les murs des propriétés existantes depuis plus de 40 ans, ou restera t’il à 2,00 m, ou sera t’il de 1,50 m uniquement pour les aménagements nouveaux ?
    Merci de vos conseils

  • par GIRAUDO patrick , Le 20 mars 2023 à 17:23

    Bonjour Monsieur
    mon voisin et moi même comptons vendre nos villas sur 2 parcelles contigües dans le quartier du PIOL a Nice, a un promoteur pour édifier un immeuble. Il m’annonce ce jour qu’il sera nécessaire d’obtenir l’accord de tous les propriétaires de du lotissement (1952) constitué principalement d’immeubles. qu’en est il exactement et cela depuis la loi ALUR de 2014 ?
    Je vous remercie par avance pour votre réponse.

  • par coudray , Le 9 mars 2023 à 07:52

    Bonjour
    Un cahier des charges de 2010 stipulant "maisons à usage d’habitation" est il toujours valable concernant un changement de destination d’une habitation en local professionnel avec changement de destination du bien (bail pro activité bruyante) En vous remerciant cdlt MC

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27854 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs