Lorsque ces visites médicales donnent lieu à un avis d’inaptitude définitive à servir, les militaires et gendarmes concernés ne peuvent qu’envisager de le contester.
Pour contester leur avis d’inaptitude, les militaires pouvaient, auparavant, saisir le service de santé des armées d’une demande de surexpertise médicale ou le conseil régional de santé territorialement compétent d’un recours contre l’avis d’inaptitude.
Depuis le 28 avril 2022, les conseils régionaux de santé ont été supprimés au profit d’un conseil national de santé des armées.
Ce nouveau conseil national de santé des armées n’a plus à connaître des recours des militaires contre les conclusions d’inaptitudes médicales des militaires de droit commun.
Les militaires et gendarmes perdent donc une voie de recours pour faire valoir leurs droits en matière d’aptitude médicale à servir.
L’aptitude médicale à servir, c’est quoi ?
L’article L4132-1 du Code de la défense prévoit que :
« Nul ne peut être militaire (…)
3° S’il ne présente les aptitudes exigées pour l’exercice de la fonction (…) ».
Ces conditions sont vérifiées au plus tard à la date du recrutement ».
L’article 1er de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire définit l’aptitude médicale à servir comme « la compatibilité de l’état de santé d’un individu avec les exigences du statut général des militaires et celles propres à chaque force armée et formation rattachée (FAFR) ».
La détermination et le contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire sont fondés sur des expertises médicales qui relèvent de la compétence des médecins du service de santé des armées.
Lors des opérations de recrutement initial dans les FAFR d’un militaire, la détermination de l’aptitude médicale à servir permet de vérifier l’adéquation entre les capacités individuelles des candidats à l’engagement, les normes médicales d’aptitude des forces armées et formations rattachées (FAFR) ainsi que les contraintes du métier des armes (article 4 de l’arrêté susvisé du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
Elle comporte plusieurs étapes successives : l’expertise médicale initiale, le temps de l’incorporation et la réévaluation du profil médical ou de l’aptitude médicale.
L’expertise médicale initiale a pour but de contrôler l’adéquation de l’état de santé du candidat avec les impératifs des métiers militaires, et conduit à la réalisation d’un profil médical et à une conclusion d’ordre médico-militaire appréciant les aptitudes médicales demandées par l’autorité militaire responsable du recrutement.
Cette conclusion peut être l’aptitude à l’engagement, l’inaptitude temporaire à l’engagement, l’inaptitude à l’engagement, ou l’ajournement (article 5 de l’arrêté susvisé du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
L’incorporation a lieu avant la fin du 12ème mois suivant la visite d’expertise médicale initiale et donne lieu à un entretien infirmier dans les 7 premiers jours suivants. Cet entretien infirmier comporte (article 6 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire) :
le recueil de toute évolution de l’état de santé du militaire depuis l’expertise médicale initiale ;
la réalisation des vaccinations légales et réglementaires ;
la réalisation d’actes diagnostics.
La période probatoire a pour but d’observer le comportement de la recrue au sein de la collectivité militaire et d’évaluer ses possibilités d’adaptation au milieu. Elle apporte donc des éléments d’appréciation d’ordre dynamique qui complètent les données recueillies lors des opérations de recrutement (article 7 de l’arrêté susvisé du 21 avril 2022).
1. Avis d’inaptitude à servir des militaires : comment le contester ?
En cas de contestation d’un avis d’inaptitude prononcé à l’issue d’une expertise au recrutement initial ou d’un examen médical dont bénéficient les militaires en cours de carrière ou de contrat, une surexpertise peut être demandée (article 23 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
La demande de surexpertise doit être formulée, par le militaire concerné, dans les 2 mois suivant l’établissement du diagnostic, du profil médical ou de la conclusion médicale (article 24 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
Lorsqu’une surexpertise médicale est accordée, cette procédure suspend tout autre recours gracieux et présentation en commission de réforme des militaires, dans l’attente de l’avis du surexpert.
En cas d’inaptitude médicale prononcée après la fin de la période probatoire de l’engagement initial dans les FAFR, une aptitude à servir par dérogation aux normes médicales d’aptitude peut être accordée par le commandement.
Concrètement, lorsqu’un militaire se voit notifier un avis d’inaptitude postérieurement à l’expiration de sa période probatoire, il peut saisir le conseil national de santé des armées (CNSA) d’une demande d’aptitude à servir par dérogation aux normes médicales d’aptitude (article 25 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
En pratique, cette demande consiste à demander au conseil national de santé des armées une autorisation dérogation pour servir malgré l’inaptitude constatée par le médecin militaire.
Le conseil national de santé des armées peut aussi être saisi pour :
les nouvelles demandes de présentation d’un dossier, déjà présenté antérieurement à ce conseil, en raison d’un fait médical nouveau ou d’un souhait de levée de restriction(s) d’aptitude médicale ;
les contestations, dans un délai maximum de deux mois, des conclusions d’aptitude et d’inaptitude médicales, prononcées par le conseil maritime de santé.
Après étude du recours du militaire concerné, le conseil national de santé des armées (CNSA) peut confirmer ou réévaluer les conclusions relatives à l’aptitude médicale ou aux restrictions d’emploi.
S’il se prononce en faveur de la restitution de l’aptitude médicale, sans dérogation ni restriction, cette restitution d’aptitude médicale est alors immédiatement applicable, sans nécessiter de décision administrative de l’autorité de gestion.
Si le conseil national de santé des armées (CNSA) confirme l’inaptitude, il exprime son avis à l’autorité de gestion qui est seule à prendre la décision administrative qui en découlera (refus de recrutement, résiliation de contrat d’engagement, réforme, etc.).
La décision administrative prise par l’autorité de gestion après avis du conseil national de santé des armées (CNSA) peut être contestée par le militaire ou le gendarme concerné devant la commission des recours des militaires (CRM) (article R4125-1 du Code de la défense) puis, le cas échéant, devant le tribunal administratif territorialement compétent.
2. Suppression des conseils régionaux de santé.
Auparavant, les militaires ayant fait l’objet d’un avis d’inaptitude médicale à servir pouvaient saisir le conseil régional de santé territorialement compétent en vue de la contestation de l’avis d’inaptitude litigieux (article 23 abrogé de l’arrêté du 20 décembre 2012 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
Ce recours pouvait être assorti d’une demande d’aptitude à servir par dérogation aux normes médicales d’aptitude à servir.
Depuis le 28 avril 2022, date d’entrée en vigueur de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire, les conseil régionaux de santé ont été supprimés au profit du conseil national de santé des armées (CNSA).
Or, ce dernier n’a plus à connaître des recours contre les avis d’inaptitudes médicales sauf en ce qui concerne les avis du conseil maritime de santé (article 25 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
Par ce nouveau dispositif, les militaires et les gendarmes perdent donc une voie de recours très utiles contre les avis d’inaptitude médicale prononcées à leur encontre.
Heureusement, les militaires et les gendarmes conservent la possibilité de formuler des demandes de dérogations en vue de la poursuite de leur engagement ou de leur carrière malgré les avis d’inaptitude prononcés à leur encontre (article 25 de l’arrêté du 21 avril 2022 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire).
Discussion en cours :
Chère Maître, votre article est excellent mais il existe aussi la voie pénale, pas assez connue contre par exemple des réformes du SSA pour folie (P4) qui ouvre à la protection fonctionnellle.
J’ai vécu un tel cas avec plusieurs « vieux » Polytechniciens dont la DGA voulait se débarrasser et après avoir gagné une douzaine de procès adm et une réintégration par voie de justice au prestigieux CGARM, une plainte au pénal avec CPC est en cours depuis 2020. Un certificat avait même été fait contre moi sans même me voir !
Je suis prêt à échanger vu que deux articles de presse sont parus et que j’approche de ma limite d’âge (66 ans)