La protection de l'enfant victime de violences. Par Vinciane Jacquet, Avocate.

La protection de l’enfant victime de violences.

Par Vinciane Jacquet, Avocate.

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Les personnes ayant connaissance de sévices ou agressions sur des mineurs, hésitent à informer les autorités.
La peur de « briser » une famille lorsqu’il s’agit de violences intra-familiales, de dénoncer une personne innocente, ou la crainte d’être elles-mêmes poursuivies, parce que les violences signalées ne seraient pas réelles, ou parce que la personne dénoncée ne serait pas l’agresseur, freine les signalements.
Rappel sur ce que prévoit la loi.

-

Le Code pénal punit la non-dénonciation des violences sur les mineurs.

D’une part, l’article 434-1 du Code pénal réprime, de manière générale, la non-dénonciation des crimes

« dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets, ou dont les auteurs sont susceptibles de commettre de nouveaux crimes qui pourraient être empêchés ».

Cet article prévoit des exceptions à l’obligation de dénonciation pour les conjoints, parents et enfants de l’auteur supposé du crime, sauf pour si le crime en question a pour victime : un enfant.

L’article 434-3 du Code pénal réprime la non-dénonciation de « privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur », ou à toute personne vulnérable, avec une circonstance aggravante lorsque le mineur victime est âgé de moins de 15 ans.

Les peines maximales prévues sont de 3 ans d’emprisonnement, ou 5 ans en cas de circonstances aggravantes, pouvant être assortis de 45.000 ou 75.000 euros d’amende.

Toute personne ayant connaissance de sévices ou violences infligés à un enfant doit donc en informer, soit une autorité judiciaire (police, gendarmerie, procureur de la République), soit une autorité administrative (généralement, le service social du département du lieu de résidence de l’enfant victime).

L’objectif est double :

  • protéger l’enfant de violences futures ;
  • limiter ou empêcher les conséquences des violences déjà infligées.

Bien sûr, pour être répréhensible, l’absence de dénonciation doit être volontaire.

Concrètement, comment faire ?

Plusieurs possibilités :

1- Se rendre dans un commissariat de police ou poste de gendarmerie pour signaler les faits ;

2- Adresser un signalement, par courrier recommandé avec accusé de réception, au Procureur de la République ;

3- Adresser un signalement via une « information préoccupante » auprès de la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP), laquelle est un service de l’Assistance Sociale à l’Enfance du Département. L’association Contre les Violences sur Mineurs a réalisé un annuaire de toutes les CRIP de France. Les services compétents mèneront une enquête, et saisiront eux-mêmes le Procureur si les accusations de maltraitantes semblent vraisemblables. L’information préoccupante est prévue par les articles R226-2-2 à D226-2-8 du Code de l’action sociale et des familles ;

4- Adresser un signalement en appelant le 119, numéro national est dédié à la prévention et à la protection des enfants en danger ou en risque de l’être. Il est ouvert 24h/24, 7 jours/7, gratuit et anonyme.

Les informations à transmettre au sein de votre signalement :

  • Votre identité et vos coordonnées,
  • Les faits dont vous avez connaissance et comment vous en avez eu connaissance (soyez le plus précis possible),
  • L’identité de la victime (ainsi que son adresse si vous la connaissez, son établissement scolaire, son âge…),
  • L’identité de l’agresseur présumé si vous le connaissez.

Dans les faits, les personnes témoins, qu’elles soient témoins directs de violences, ou témoins indirects (en ayant entendu des propos, reçu des confidences, par exemple) hésitent à informer les autorités.

Les raisons ? La peur de « briser » une famille, ou de dénoncer une personne innocente.

Il est par ailleurs courant que les personnes témoins craignent d’être elles-mêmes poursuivies, parce que les violences dénoncées ne seraient pas réelles, ou parce que la personne dénoncée ne serait pas l’agresseur.

La justice a pris position de manière très claire à ce sujet : le signalement des faits doit être réalisé, peu importe que ces faits ne soient pas certains.

En d’autres termes, ce n’est pas à la personne témoin d’apporter la preuve des faits, et il n’est pas demandé à la personne témoin d’être certaine des faits dénoncés.

Au contraire : les faits de violences doivent être signalés dès la simple suspicion, voire dès le début d’une rumeur.

Un établissement scolaire avait même été condamné après avoir entrepris une enquête préalablement à la réalisation d’un signalement, constituant un délit de signalement tardif ou de défaut de signalement [1] ; le signalement doit intervenir sans délai [2].

Il ne peut donc pas être reproché au témoin d’avoir signalé des faits qui ne seraient finalement pas constitués, ou une personne qui ne serait pas l’agresseur.

Précisons enfin que l’article 44 du Code de déontologie médicale impose au médecin de protéger le mineur et de signaler les sévices dont il est victime.

L’article 226-14 du Code pénal délie le médecin du secret professionnel et l’autorise à alerter le procureur de la République.

Vinciane Jacquet, avocate près la Cour d’appel de Paris -
et au Barreau de Meaux
www.vinciane-jacquet-avocat.com

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Notes de l'article:

[1Cass., Crim., 17 mars 2010, n° 09-85670.

[2Cass., Crim., 5 septembre 2001, n° 01-81397.

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