Vers une meilleure prise en charge par l'assurance maladie des patientes atteintes du cancer du sein. Par Charlotte Mérigot, Avocate.

Un sujet proposé par la Rédaction du Village de la Justice

Vers une meilleure prise en charge par l’assurance maladie des patientes atteintes du cancer du sein.

Par Charlotte Mérigot, Avocate.

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Explorer : # cancer du sein # assurance maladie # prise en charge

En France, le cancer du sein est le plus fréquent et le plus meurtrier chez les femmes (plus de 12 000 décès chaque année). Il touche une femme sur huit.

Si cette pathologie est reconnue comme une affection longue durée (ALD) permettant aux patientes de bénéficier d’une prise en charge à 100% des soins liés à leur cancer, en réalité, des frais importants restent à la charge des patientes, constitués d’une part, par les dépassements d’honoraires des soins prodigués dans le secteur privé (chirurgie de reconstruction mammaire), et d’autre part, par les dispositifs et produits médicaux partiellement ou non pris en charge (renouvellement de prothèses mammaires, crèmes etc…).

Ce reste à charge évalué entre 1 300 et 2 500 euros en moyenne, contraint les patientes les plus précaires financièrement à se détourner de certains soins ou produits médicaux. Ainsi, 15% des patientes renoncent à une reconstruction mammaire pour des raisons financières.

Pour y remédier, l’Assemblée nationale a adopté la loi n° 2025-106 du 5 février 2025 visant à améliorer la prise en charge des soins et dispositifs spécifiques au traitement du cancer du sein par l’assurance maladie.

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1. Le dispositif de l’ALD.

Etant inscrit sur la liste « ALD 30 », le cancer du sein est reconnu comme une affection longue durée par l’assurance maladie, ce qui permet aux patientes d’obtenir une prise en charge intégrale des soins liés à leur cancer (chimiothérapie, chirurgie, consultations, examens de suivi, examens biologiques pour les patientes en rémission etc…) [1]. Cela signifie que la Sécurité sociale prend en charge 100% de la base de remboursement de l’acte réalisé par le médecin, au lieu de 70%.

Pour bénéficier de la suppression de la participation financière de l’assuré, les actes, prestations et traitements doivent être inscrits dans le protocole de soins établi par le médecin traitant [2].

Nonobstant ce dispositif, de nombreux postes de restes à charge subsistent pour les patientes atteintes d’un cancer du sein.

2. Les apports de la loi du 5 février 2025.

La loi nº 2025-106 du 5 février 2025 est venue compléter le Titre VI du premier livre du Code de la Sécurité sociale, en insérant un chapitre XI comprenant de nouvelles dispositions relatives

« aux personnes bénéficiant d’un traitement du cancer du sein, de soins consécutifs à un cancer du sein ou d’un parcours de soins global à l’issue d’un traitement du cancer du sein ».

Le nouvel article L16-11-1 du Code de la Sécurité sociale prévoit la prise en charge intégrale des soins et dispositifs lorsqu’ils présentent un caractère spécifique au traitement du cancer du sein ou à ses suites.

Ces soins et dispositifs comprennent notamment :

  • le renouvellement des prothèses mammaires ;
  • les actes de dermopigmentation de la plaque aréolo-mamelonnaire (tatouage) ;
  • les sous-vêtements adaptés au port de prothèses mammaires amovibles.

La liste des soins et dispositifs concernés va être définie par arrêté.

En outre, des crèmes, gels et vernis encore non remboursés à ce jour, pourront être pris en charge par la Sécurité sociale dans le cadre d’un forfait spécifique, dont le montant doit être fixé par arrêté [3].

La loi du 5 février 2025 a également prévu que les dépassements d’honoraires des chirurgiens esthétiques pratiquant des opérations de reconstructions mammaires, notamment consécutives à une mastectomie, seront plafonnés et que le montant de ce plafond sera négocié entre les médecins et l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM) [4]. Ce texte permettra de diminuer le reste à charge résultant en partie pour les patientes des dépassements d’honoraires associés à des soins prodigués dans le secteur privé en l’absence d’offre publique adaptée ou accessible.

Le médecin oncologue devra fournir à la patiente des informations détaillées sur les soins de support disponibles dans sa région et l’inviter à consulter l’annuaire des soins de support oncologiques de la région [5].

Enfin, la loi du 5 février 2025 étend la prise en charge des trois soins de supports : séances d’activités physiques adaptées, soins psychologiques et suivi nutritionnel, initialement réservée aux patientes en post-traitement, aux patientes en traitement actif, pour un montant global de 180 euros [6].

3. Les recours.

La patiente qui se verrait refuser la prise en charge intégrale de ses soins ou des dispositifs présentant un caractère spécifique au traitement de son cancer du sein ou de ses suites, pourra contester cette décision devant la Commission de recours amiable (CRA) de l’assurance maladie dans un délai de deux mois suivant la notification du refus par la CPAM [7].

Dans l’hypothèse où ce refus serait confirmé par la CRA, la patiente pourra saisir le Pôle social du tribunal judiciaire dans le ressort duquel demeure l’assurée [8].

La requête doit être déposée ou adressée au tribunal compétent [9] :

  • dans les deux mois suivant la date de notification de la décision de la Commission de recours amiable (CRA) ;
  • dans les quatre mois suivant la réception de la réclamation par l’organisme de sécurité sociale, si la CRA n’a pas statué dans le délai de 2 mois qui lui est imparti.

Charlotte Mérigot
Avocate à la Cour d’appel de Paris

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Notes de l'article:

[1Art. L160-14 du Code de la Sécurité sociale.

[2Art. L324-1 du Code de la Sécurité sociale.

[3Art. L16-11-3 du Code de la Sécurité sociale.

[4Art. L162-5 du Code de la Sécurité sociale.

[5Art. L16-11-2 du Code de la Sécurité sociale.

[6Art. L1415-8 du Code de la santé publique.

[7Art R142-1 du Code de la Sécurité sociale.

[8Art. R142-10 et L142-8 du Code de la Sécurité sociale.

[9Art. R142-10-1 du Code de la Sécurité sociale.

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