La prise d’acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture exercé par le salarié lorsqu’il estime que l’employeur a commis une faute grave. Si le juge est saisi de cette rupture, il apprécie la gravité de la faute reprochée à l’employeur pour déterminer quelle est la valeur de la rupture opérée par le salarié. Si les faits reprochés à l’employeur constituent bien une faute grave, la rupture aura la valeur d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Dans le cas contraire, elle produira les effets d’une démission.
Dans l’arrêt du 17 octobre 2012, la salariée avait pris acte de la rupture de son contrat de travail prétextant un conflit avec sa supérieure hiérarchique qui durait depuis trois ans en raison d’un désaccord sur la répartition des tâches. La salariée estimait que les tâches qui lui étaient confiées par sa supérieure hiérarchique ne relevaient pas de son périmètre. La situation s’étant par la suite envenimée et des propos vexants ayant été prononcés, la salariée avait demandé à changer de bureau ou de service.
L’employeur considérait que dès lors que la salariée n’était pas en mesure de démontrer un harcèlement moral de la part de la supérieure hiérarchique, sa prise d’acte de la rupture de son contrat de travail ne pouvait avoir valeur d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur estimait également qu’il n’était pas tenu d’accepter la demande de changement de bureau ou de service faite par la salariée qui se prétendait victime de l’attitude de sa supérieure hiérarchique.
Toutefois, la Cour de cassation, confirmant la décision de la Cour d’appel estime que l’employeur, en ayant « laissé perduré un conflit sans lui apporter de solution » avait commis une faute grave justifiant la prise d’acte de la rupture par sa salariée même si cette dernière ne caractérisait pas l’existence d’un harcèlement moral.
Ce qui semble avoir été retenu par les juges est l’inaction de l’employeur face aux interpellations répétées de la salariée se disant victime du conflit alors qu’une solution aurait dû être recherchée. Il apparaît en outre que l’inspection du travail avait été saisie du conflit et avait proposé une médiation que l’employeur avait refusée.
Conclusion : Les conflits entre salariés, même en dehors de tout harcèlement moral, doivent être pris au sérieux par l’employeur. Celui-ci doit tenter d’y mettre un terme sous peine de risquer de devoir payer des dommages-intérêts au salarié qui prendrait acte de la rupture ou demanderait la résiliation judiciaire de son contrat de travail du fait de son inaction.