Les cas de résiliation de plein droit du bail d’habitation : illustration en cas de destruction de la chose louée.

Par Laurent Vovard, Avocat.

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Explorer : # résiliation de bail # destruction du logement # force majeure # procédure judiciaire

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La résiliation de bail peut être initiée par le locataire ou le bailleur avec des préavis distincts. En cas d'abandon ou de destruction du logement, la résiliation est automatique. Un récent arrêt de la Cour de cassation rappelle l'importance de prouver l'état d'habitation pour valider une résiliation.
Description rédigée par l'IA du Village

La résiliation d’un bail d’habitation obéit à des règles strictement encadrées définies par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 lorsqu’elle intervient à l’initiative du bailleur ou du locataire. En dehors de ces hypothèses, certaines situations entrainent la résiliation de plein droit du bail sans qu’il soit nécessaire de donner congé, avec toutefois quelques précautions à prendre comme l’illustre l’arrêt ici évoqué de la 3ᵉ chambre civile de la Cour de cassation du 9 janvier 2025 (Cass Civ 3, 9 janvier 2025).

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1. Lorsque la résiliation intervient à l’initiative du locataire, celui-ci doit en principe observer un délai de préavis de 3 mois, préavis dont la durée peut être réduit à 1 mois notamment en cas de mutation professionnelle, de perte d’emploi ou nouvel emploi consécutif à une perte d’emploi, lorsque le locataire est victime de violences conjugales et bénéficie d’une ordonnance de protection ou encore lorsque le logement se situe en zone tendue. Le congé obéit à des conditions de forme et doit notamment être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte de commissaire de justice.

2. De même, lorsque la résiliation intervient à l’initiative du bailleur, celui-ci doit observer un préavis de 6 mois et le congé doit être justifié par l’un des motifs suivants : congé pour habiter ou vendre, congé pour motif légitime et sérieux (par exemple le non-paiement des loyers, le défaut d’assurance locative, les troubles de jouissance causés aux voisins)… S’agissant des conditions de forme, le congé doit être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte de commissaire de justice.

3. En dehors de ces cas, il existe des situations ou la loi prévoit une résiliation de plein droit du bail, sans qu’un congé ne soit nécessaire.

En premier lieu, le bail est résilié de plein droit par l’effet d’une clause résolutoire qui vient sanctionner des manquements du locataire tels que le non-paiement des loyers ou le défaut d’assurance. Cette clause prend effet après un commandement de payer ou de se conformer resté sans effet.

Outre cette situation bien connue, le bail est résilié de plein doit :

  • En cas d’abandon du logement par le locataire : dans ce cas, le bailleur peut faire constater l’abandon par un commissaire de justice et saisir le tribunal pour obtenir la résiliation du bail
  • Mais aussi en cas de destruction totale du logement par cas de force majeure. L’article 1722 du Code civil dispose en effet que : « Si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail. Dans l’un et l’autre cas, il n’y a lieu à aucun dédommagement ».

4. Un arrêt récent de la 3ᵉ chambre civile de la Cour de cassation du 9 janvier 2025 (23-13.247) illustre cette situation en rappelant la procédure à mettre en œuvre en de telles circonstances :

Un propriétaire a donné à bail sa maison d’habitation à des locataires ; à la suite de l’effondrement de la falaise surplombant la maison, un arrêté municipal de péril imminent avec danger a été pris et l’immeuble a été déclaré inhabitable.

Les locataires ont assigné le bailleur en référé aux fins de le voir condamner sous astreinte à leur présenter des offres de relogement ou d’hébergement en application des articles L521-1 et s du Code de la construction et de l’habitation, à réaliser des travaux de réfection ainsi qu’à leur verser des provisions à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice et au titre de leurs frais de réinstallation.

De son côté, le bailleur a demandé, à titre reconventionnel, que la résiliation de plein droit du bail soit ordonnée sur le fondement de l’article 1722 du Code civil. Du fait de l’effondrement de la falaise et de l’arrêté municipal déclarant la maison inhabitable, le bailleur considérait en effet que les dispositions prévoyant la résiliation de plein droit du bail devaient s’appliquer.

La cour d’appel a donné raison au bailleur en rejetant les demandes des locataires.
Les locataires ont formé un pourvoi en cassation contre cette décision, reprochant aux juges d’appel d’avoir violé l’article 1722 du Code civil en estimant qu’il était « constant que l’arrêté de péril avait été pris parce que l’immeuble avait été démoli et ainsi rendu inhabitable du fait de l’effondrement de la falaise le surplombant et non en raison de son état intrinsèque de dégradation » sans constater que c’est de façon absolue et définitive que la maison était inhabitable ; De même, les locataires faisaient valoir que l’arrêté de péril pris à la suite de l’effondrement constatait uniquement « un péril imminent avec danger de la propriété » et prescrivait au propriétaire de la parcelle de procéder à un certain nombre de « démarches administratives et techniques en vue de résorber cette situation de péril imminent avec danger », ce qui excluait que la maison qu’habitaient les locataires ait été de façon absolue et définitive inhabitable.

La Cour de cassation, au visa des articles 1722 du Code civil et 834 du Code de procédure civile, casse l’arrêt de la cour d’appel estimant que :

« Selon le premier de ces textes, si, pendant la durée du bail, la chose louée est détruite en totalité par cas fortuit, le bail est résilié de plein droit ; si elle n’est détruite qu’en partie, le preneur peut, suivant les circonstances, demander ou une diminution du prix, ou la résiliation même du bail.
Aux termes du second, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Pour ordonner la résiliation du bail au 26 février 2021 et rejeter les demandes des locataires, l’arrêt retient qu’il est constant que l’immeuble loué a été démoli et ainsi rendu inhabitable du fait de l’effondrement de la falaise le surplombant, de sorte que sa perte par cas fortuit est totale.
En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a tranché une contestation sérieuse relative à la caractérisation d’un cas fortuit, a violé les textes susvisés
 ».

Ainsi, la destruction en totalité de la chose louée, qui entraîne la résiliation de plein droit du bail, est une question sujette à discussion lorsque par exemple des démarches ou travaux peuvent être mis en œuvre pour que le bien soit de nouveau habitable et cette question ne peut être tranchée par le juge des référés qui est le juge de l’évidence.

Il faudra donc porter une attention particulière sur la voie procédurale à mettre en œuvre en de telles circonstances.

Laurent Vovard
Avocat au Barreau de Paris
https://vovard-avocat.com/

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