« Je ne puis terminer l’histoire du cheval, sans marquer quelques regrets de ce que la santé de cet animal utile et précieux a été jusqu’à présent abandonnée aux soins et à la pratique, souvent aveugles, de gens sans connaissance et sans lettres. La médecine que les anciens ont appelée médecine vétérinaire n’est presque connue que de nom : je suis persuadé que, si quelque médecin tournait ses vues de ce côté-là, et faisait de cette étude son principal objet, il en serait bientôt dédommagé par d’amples succès […], dont on pourrait même par analogie tirer des inductions utiles à l’art de guérir les Hommes » [1].
Les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, qui se dérouleront sur le prestigieux site du château de Versailles, accueilleront environ trois cent cinquante chevaux pour les épreuves de sports équestres, qui comptent trois disciplines : le dressage, le saut d’obstacles et le concours complet d’équitation. Parmi ces trois cent cinquante chevaux, un cheval sur cinq doit voyager par avion. Comme pour tout autre transport d’animaux vivants, cela représente un risque de propagation de maladies. La gestion de ces risques ayant toutefois des spécificités dans la filière équine, elle apparaît particulièrement importante pour assurer la pérennité de ces activités sportives. Les chevaux qui vont concourir sont en effet, des athlètes internationaux, dont le suivi sanitaire ainsi que le bien-être doivent être assurés. Focus sur les mesures mises en place, la lutte contre les maltraitances équines et les points d’amélioration.
I. Concept HHP : des athlètes équins à statut sanitaire élevé.
De l’anglais « high health, high performance » (HHP), le concept de chevaux de haute performance à statut sanitaire élevé, ou concept « HHP », garantit un cheval de compétition en bonne santé en ce qu’il bénéficie d’un statut sanitaire reconnu et qu’il satisfait à une série d’exigences spécifiques (vaccinations, etc.). Le statut « HHP » est valable pour une période de quatre-vingt-dix jours. Basé sur le risque sanitaire, il permet l’importation temporaire de chevaux à des fins de compétitions sportives de haut niveau.
L’Organisation mondiale de la santé animale, en partenariat avec la Fédération équestre internationale, la Fédération internationale des autorités hippiques de courses au galop et la Confédération internationale des sports équestres, a élaboré un cadre harmonisé qui s’appuie sur les normes et principes de l’Organisation mondiale de la santé animale, tels que la compartimentation et le zonage, la certification, la traçabilité, l’identification des animaux et une biosécurité rigoureuse, afin de définir une sous-population de chevaux à statut sanitaire élevé [2].
Le manuel de l’Organisation mondiale de la santé animale sur le cadre « HHP » [3] contient des recommandations détaillées concernant la gestion des sous-populations de chevaux à statut sanitaire élevé ou encore des modèles de certificats vétérinaires « HHP » présentant les critères harmonisés d’importation temporaire de chevaux « HHP ».
Le cadre « HHP » n’entend pas primer sur les accords d’importation existants. Il vise avant tout à aider les pays qui n’ont pas encore instauré d’accords bilatéraux et régionaux régissant les importations, permettant d’offrir à leurs partenaires commerciaux la garantie du très faible risque sanitaire que présentent ces chevaux faisant l’objet de mouvements internationaux temporaires, en vue de concourir dans le cadre de manifestations sportives internationales, avant de rentrer dans leur pays de résidence habituelle.
II. Écuries volantes.
Chaque équidé, avant le vol, doit disposer du document d’identification unique du cheval et respecter les conditions sanitaires prescrites (examens vétérinaires, certificat sanitaire, tests de dépistage, etc.) [4]. En Europe, il n’y a que cinq aéroports qui prennent en charge le transport de chevaux : Roissy, Amsterdam, Liège, Francfort et Ostende.
Au moment du départ, les animaux, équipés de protections, sont placés dans un conteneur appelé « écurie volante », logeant deux chevaux dans des boxes. Un avion peut, au maximum, transporter dix-neuf écuries volantes. Les conteneurs sont soulevés et chargés dans la soute de l’avion, avec précaution pour éviter tout stress ou accident. L’équipement nécessaire (foin, paille, etc.) est chargé pour permettre aux grooms d’assurer les soins des chevaux pendant le vol, au cours duquel ils pourront s’abreuver et se nourrir. Des vétérinaires dédiés sont également présents. Les chevaux ont en permanence de quoi mâcher afin de réduire la pression inconfortable dans les oreilles.
Étant des animaux délicats et sensibles à tout changement d’environnement, les chevaux peuvent rapidement tomber malades ou se blesser. Néanmoins, tout est mis en œuvre pour assurer leur bien-être. Le voyage a d’ailleurs un coût non négligeable [5]. Ce n’est rien par rapport aux chevaux transportés, dont la valeur peut s’élever à plusieurs millions d’euros, mais qui peuvent surtout en rapporter tout autant… Comme pour les humains, il existe trois types de classe pour le transport de chevaux : la classe économique, la classe affaires et la classe VIP. Ces dernières se différencient en fonction du prix associé à la surface dont disposera l’animal, qui sera partagée ou individuelle et plus ou moins spacieuse.
À l’arrivée, les chevaux sont accueillis au poste de contrôle frontalier pour être soumis à différents contrôles (identité, document sanitaire, état de santé, bien- être, etc.), ce qui conditionne l’autorisation d’entrée sur le territoire. Les équidés sont ensuite conduits vers leur centre d’entraînement. Certaines équipes choisissent une période d’acclimatation qui peut durer plusieurs semaines avant les épreuves olympiques.
Si le transport des chevaux semble bien rodé, il convient de relever que l’on ne peut en dire autant à l’endroit des athlètes paralympiques accompagnés de leurs chiens guides. Timothée Adolphe, athlète non-voyant vice-champion paralympique du 100 mètres aux Jeux olympiques de Tokyo en 2021, s’est en effet vu refuser l’accès à un avion de la compagnie Easy Jet en mars 2023, alors qu’il se rendait à Toulouse accompagné de son chien guide. Le 18 mai 2024, c’est à Paris qu’un taxi l’a refusé, toujours à cause de son chien [6]. C’est pourtant bien à Paris que se dérouleront nos Jeux olympiques et paralympiques… Si ces situations sont révélatrices des lacunes qui persistent dans notre pays s’agissant du traitement réservé aux personnes en situation de handicap, qu’en sera-t-il de l’accueil des athlètes, potentiellement accompagnés de leurs chiens guides ?
III. Soins vétérinaires.
À l’occasion de ces Jeux olympiques, un écosystème vétérinaire sera mis en place [7]. Pour ce faire, le parc du château de Versailles sera le théâtre d’une clinique temporaire [8], installée au sein d’une grande tente équipée de quatre boxes d’hospitalisation, trois salles de consultation et six boxes réservés aux contrôles antidopage. La responsable sera le docteur vétérinaire Anne Couroucé. Elle supervisera quelque quatre-vingts vétérinaires, dont certains ont le titre « d’international technical officer » (ITO). Ces vétérinaires officiels sont nommés par la Fédération équestre internationale (FEI), et deux d’entre eux seront dédiés aux contrôles antidopage. L’équipe vétérinaire comprendra aussi des « national technical officers » (NTO), nommés par le Comité d’organisation Paris 2024, et soixante-trois vétérinaires bénévoles seront présents. Enfin, en ce qui concerne les vétérinaires d’équipe, ils devront se déclarer auprès de l’Ordre national des vétérinaires [9]. À ce volet « soins vétérinaires » sera nécessairement associé le volet « bien-être ».
IV. Bien-être équin.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) définit le bien-être de l’animal comme « l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal » [10] Tandis que le Gouvernement vient de lancer un plan national dédié au bien-être des animaux de compagnie [11], le bien-être des équidés sera particulièrement scruté pendant ces Jeux olympiques [12].
Le groupe d’étude parlementaire « Condition animale », présidé par Loïc Dombreval, député sous la XVe législature, a publié en avril 2022 un rapport intitulé « Bien-être équin, Recommandations pour les Jeux olympiques de Paris 2024 », dans lequel figuraient quarante-six recommandations.
Ce rapport était visiblement le bienvenu, car, selon une étude menée par la Fédération équestre internationale en novembre 2022, 87 % des vétérinaires interrogés se déclaraient inquiets quant au bien-être des chevaux lors des compétitions [13].
Sous l’impulsion de ce groupe d’étude, un comité pour le bien-être équin, le Welfare Commitee, a été spécialement créé pour ces Jeux olympiques.
Composé de personnalités d’horizons différents, dont des éthologues et des sociologues, ce comité aura un rôle de conseil. Un horse welfare officer a également été désigné en la personne de Richard Corde, docteur vétérinaire. Il sera chargé de veiller au bien-être des chevaux durant la compétition [14] et collaborera avec le président du jury, seule personne à détenir un pouvoir de sanction.
Pour aller plus loin, une tribune publiée au mois de février 2024, à l’appui du rapport précité, réclamait des mesures contraignantes : « La France pourrait prendre les devants et promouvoir la lutte contre les maltraitances équines à travers une régulation contraignante des équipements (mors, éperons, guêtres…) et des pratiques équestres lors de l’entraînement, de l’échauffement et de la compétition des chevaux » [15].
Parmi les pratiques équestres proposées à l’interdiction, on peut citer celle de la flexion de l’encolure du cheval, plaçant le chanfrein en arrière de la verticale (appelée « hyperflexion »), ce qui provoque des troubles de la santé, tels que douleurs et traumatismes vertébraux, blocage de la respiration, circulation sanguine de la langue entravée par la pression du mors entraînant un bleuissement de la langue, etc. Par ailleurs, pendant les Jeux de Tokyo, un jeune hongre, prénommé Kilkenny, avait présenté une abondante hémorragie nasale durant l’épreuve de saut d’obstacles, ce qui n’avait pourtant conduit personne à mettre fin à l’épreuve malgré son état de santé alarmant. C’est ainsi que les signataires de la tribune réclament que soit désormais imposé l’arrêt immédiat d’une épreuve à la moindre trace de sang sur le cheval et que ce dernier soit écarté de la suite de la compétition. Toujours durant les Jeux de Tokyo, Jet Set, champion de 14 ans, a fait une mauvaise chute sur le cross lors du concours complet d’équitation, ce qui a conduit à son euthanasie. Afin d’éviter que ce genre d’issue dramatique ne se reproduise, il est donc demandé que le parcours de cross soit équipé d’obstacles prévus pour céder en cas de chute ou d’accroche forte du cheval. Enfin, la vidéosurveillance de la totalité du site, mise à disposition du Welfare Commitee, est également réclamée afin d’éviter toute forme de maltraitance, surtout hors des projecteurs. En ce qui concerne les pratiques équestres lors de la compétition, les regards seront particulièrement tournés vers le bien-être des athlètes équins au cours du pentathlon moderne.
V. Pentathlon moderne, la fin d’une époque.
Discipline olympique depuis 1912, le pentathlon moderne comprend cinq épreuves : l’escrime, la natation, le tir au pistolet, la course à pied et l’équitation. Ce qui distingue cette édition des précédentes c’est que 2024 sera vraisemblablement la dernière année où l’on y verra des chevaux. L’épreuve d’équitation du pentathlon moderne consiste en un parcours de dix obstacles sur une distance de 350 à 400 mètres à réaliser le plus rapidement possible, mais la particularité de cette épreuve réside dans le fait que les chevaux sont attribués par tirage au sort. Le candidat découvre alors le cheval avec lequel il va concourir seulement vingt minutes avant le départ.
La sélection des chevaux recrutés pour le pentathlon se fait en deux temps. Un premier test de sélection effectué par une délégation composée d’un représentant de l’Union internationale du pentathlon moderne, du chef de piste qui officiera aux Jeux olympiques et de membres de « Paris 2024 » s’est ainsi déroulé fin novembre 2023 à Saumur [16].
L’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) a été sollicité par le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. Les chevaux présentés ont été choisis par les écuyers du Cadre noir de Saumur, Nicolas Perez, qui coordonne ce projet, François Fontaine et David Gomez, tous trois spécialisés dans la discipline du saut d’obstacles.
Au total, treize chevaux, propriété de l’IFCE, ont été présentés à la délégation. Un second test de sélection s’est déroulé fin mars 2024 [17]. Cette fois, la Garde républicaine et l’École militaire d’équitation (EME) ont également présenté des chevaux. Au total, la délégation retiendra quarante chevaux. Il est prévu que les chevaux sélectionnés se déplacent à Versailles au mois de juin pour effectuer une répétition avec leurs cavaliers habituels sur le parcours. Ils bénéficieront d’une journée d’acclimatation avant le début de la compétition et seront ensuite présentés lors du « jumping test » pour être observés par les athlètes et les coaches. Lors de chacune de ces étapes, les stagiaires de la formation présenteront les chevaux. Ils seront accompagnés par les écuyers du Cadre noir ainsi que des soigneurs.
Eu égard à la singularité de cette épreuve, « il faut trouver des chevaux respectueux, francs, facilement adaptables et bien dressés », explique François Fontaine [18]. Même si les chevaux sont bien dressés et présentent toutes les qualités requises, il n’empêche que cette absence de relation de confiance entre le cavalier et le cheval est particulièrement préjudiciable [19] comme en témoigne le triste épisode qui s’est déroulé durant les Jeux olympiques de Tokyo. La candidate allemande Annika Schleu, ne parvenant pas à créer les conditions de communication nécessaires avec Saint Boy, le cheval qui venait de lui être attribué, avait en effet multiplié les erreurs et, surtout, les coups de cravache et d’éperons. Son entraîneuse, Kim Raisner, avait ensuite donné des coups de poing au cheval, ce qui n’avait pas manqué de choquer le public présent et les téléspectateurs.
Début novembre 2021, le bureau de l’Union Internationale de pentathlon a décidé d’écarter l’équitation du pentathlon moderne pour les Jeux de 2028 à Los Angeles, où les pentathlètes sauteront toujours des obstacles, mais à pied [20].
Cette décision, qui est à saluer, est finalement révélatrice d’un changement de paradigme. Il n’est en effet plus admissible d’utiliser le cheval tel un accessoire sportif interchangeable ou collectif, comme peut l’être un ballon de football par exemple.
Le cheval est un être vivant doué de sensibilité [21], un être sentient [22].
Se retrouvant malgré lui dans une relation de dépendance, le cheval utilisé dans les compétitions sportives est en situation de vulnérabilité [23]. Il convient donc de le protéger, et cela commence par accepter de ne plus le robotiser en lui faisant perdre toute liberté d’action et en le traitant comme une marchandise [24].
VI. Le dopage en ligne de mire.
Les Jeux olympiques attirent l’attention sur la filière des courses hippiques en France, l’une des plus dynamiques au monde. En témoignent les 9 milliards d’euros de chiffre d’affaires réalisés grâce au Pari mutuel urbain en 2018 (dont 50 millions directement pariés dans les hippodromes), ce qui a rapporté un peu moins d’1 milliard d’euros à l’État [25]. Il est donc tentant d’administrer un produit destiné à augmenter les capacités du cheval et, partant, ses performances.
La lutte contre le dopage dans le milieu équin a débuté dans les années 1970. Les sanctions ont longtemps été uniquement sportives, puis administratives et, enfin, judiciaires.
Depuis 2020, le dopage est puni pénalement. C’est un délit passible de cinq ans de prison et de 75 000 euros d’amende [26].
En mars 2022, une opération antidopage d’envergure a été menée en France et a conduit à l’interpellation d’une vingtaine de personnes [27]. Si l’on ne peut affirmer que tous les chevaux sont forcément dopés, la frontière entre produits dopants et non dopants est parfois floue. Il faut également noter que la plupart des contrôles antidopage sont réalisés après la course. Or, beaucoup de produits disparaissent pendant l’effort, devenant ensuite indétectables.
Pourquoi ne pas faire les contrôles en amont ? Car certains chevaux auraient besoin de calme avant la course, et cela pourrait les perturber : un argument réfuté par plusieurs professionnels [28].
De surcroît, une nouvelle génération de produits dopants a fait son apparition : les peptides de synthèse. Ces substances sont des molécules analogues à celles que l’on trouve naturellement dans le corps de l’animal. Il est donc difficile de faire la différence entre un produit administré et un produit qui serait sécrété par l’organisme.
Ce qu’il faut bien garder à l’esprit, c’est que le dopage est une forme de maltraitance animale. Il a en effet des conséquences gravissimes sur la santé des chevaux, qui peuvent mener jusqu’au décès [29]. La mort du cheval, spontanée ou provoquée, est pourtant rarement associée au dopage. Il arrive que des chevaux s’effondrent en pleine course de façon « inexpliquée » [30]. Bien que de forts soupçons de dopage pèsent parfois, on ne pourra bien souvent pas en rapporter la preuve. Tel a été le cas dans une affaire qui s’est déroulée en septembre 2016. Ajayeb, une jument de 15 ans courant sous selle émiratie, a dû être euthanasiée après avoir couru avec une fracture ouverte sur plus de 23 kilomètres lors du championnat du monde d’endurance en Slovaquie [31].
Le règlement de la FEI prévoit que tout cheval euthanasié pour « blessure catastrophique » fasse obligatoirement l’objet d’une autopsie. Les organisateurs sont chargés de mettre en place la logistique nécessaire au transport du cadavre. Or, à Samorin, Ajayeb a d’abord été conservée dans une pièce non réfrigérée pendant trois jours avant qu’un véhicule ne l’emmène vers le lieu de l’autopsie. Le corps a ensuite mystérieusement disparu, et c’est finalement grâce au GPS de son cavalier, qu’elle portait toujours sur elle, qu’Ajayeb a pu être retrouvée « au milieu d’un tas de vaches mortes »… [32].
Il n’y a par conséquent jamais eu de condamnation pour maltraitance ou pour dopage, alors que bon nombre d’observateurs soupçonnaient la monture d’avoir reçu de la Xylazine, un sédatif, analgésique et relaxant musculaire, dont les effets secondaires bloquent les nerfs et suppriment la fonction protectrice fondamentale de la sensibilité. Faute de signal de douleur et, donc, de boiterie, le cheval s’expose à des fractures de stress et de fatigue, qui causent finalement une blessure catastrophique, laquelle ne relève pas du hasard, mais d’une pratique répétée.
En France, le problème de l’absence de déclaration de la mort des chevaux en dehors des compétitions a été soulevé par Stéphane Meunier, président du Syndicat des entraîneurs, drivers et jockeys de trot : « À l’heure actuelle, nous n’avons pas l’obligation en tant qu’entraîneur de déclarer la mort de nos chevaux. Normalement, pour avoir une trace écrite, on le déclare à l’IFCE (Institut français du cheval et de l’équitation). Mais si je n’ai pas envie de le déclarer, que j’ai envie de le mettre au fond de ma fumière ou dans un trou, je peux. Ça fait partie des pistes d’amélioration. Comme le suivi toute l’année. C’est-à-dire que, normalement, on a obligation de déclarer où sont les chevaux, mais, par moments, on peut avoir des trous parce que cette obligation de déclarer n’est pas forcément suivie par nos services qui sont noyés par une somme d’infos. Des fois, un cheval disparaît pendant six mois. Il passe la frontière espagnole pour réapparaître 6 mois après sa balnéo en Espagne… » [33].
Pour pallier ces lacunes et agir en faveur du bien-être animal, Jacques Nardin, vétérinaire spécialisé dans le contrôle antidopage, recommande de « réunir une commission parlementaire sous l’égide de l’Ordre vétérinaire.
La commission d’enquête sur le dopage humain en 2013 avait fait un énorme travail qui a permis de prendre conscience de beaucoup de choses. Malheureusement, elle avait oublié le milieu du cheval. Et, les instances n’ont rien fait pour se rappeler à son souvenir. Il faut aussi que la ministre de tutelle s’empare de la question » [34] Le dopage humain et le dopage animal doivent en effet être tous deux combattus sous la même bannière, et ce, en vertu du concept « One Health ».
VII. Pour une application effective du concept "One health".
Le concept « One Health » [35] « peut se traduire littéralement par “Une seule santé”. Il nous paraît cependant plus juste de le traduire par l’expression “Santé commune”. “Une seule santé” sous-entend en effet qu’il s’agirait d’un bloc monolithique, alors qu’il existe différentes interactions entre la santé humaine, la santé animale et la santé environnementale, lesquelles forment les ramifications du concept One Health » [36].
Les compétitions sportives mêlant humains et animaux, à l’image des sports équestres durant les Jeux olympiques, en sont une remarquable illustration. L’attention portée à la santé et au bien-être des humains ne doit en effet pas occulter la santé et le bien-être des chevaux. Si l’épreuve d’équitation du pentathlon vient bien à disparaître pour la prochaine édition des JO de Los Angeles en 2028, ce sera toujours moins d’exploitation et de souffrance animale.
En attendant, reste à savoir si les Jeux de Paris seront davantage respectueux des animaux que ne l’ont été les Jeux de Tokyo et à la hauteur des attentes légitimes relatives à la protection de la santé et du bien-être des athlètes équins.
NDLR : Article paru initialement dans la Revue Droit&Santé : Aloïse Quesne, "Jeux olympiques de Paris 2024 et santé animale : quelle protection pour les athlètes équins ?", Revue Droit&Santé, Juillet 2024, n°120, p. 567 à 575.