Enjeu n°1 - (« le » sujet !) l’IA.
Audrey Richard : « Oui, comme pour tout le monde, c’est le sujet du moment, celui auquel nous avons consacré notre dernière université en juin 2024. Non seulement cela impacte les RH mais surtout cela touche tous les métiers que nous gérons, notamment en termes d’automatisations des tâches.
Il faut cependant relativiser : si l’IA suscite beaucoup de réflexions, et la mise en place de chartes, il n’y a pas dans les faits d’actions très significatives : ça ne remplace pas tous les métiers comme certains le craignaient !
Pour en revenir aux RH, c’est effectivement un moyen de trier les CV, et pour les recruteurs de poser les bonnes questions quand les sujets sont techniques par exemple. »
Village de la Justice : Est-ce que vous sentez que cela crée des inquiétudes ?
« Oui dans certains cas, mais les équipes doivent cependant se former et monter en compétences sur ces sujets, notamment afin d’identifier les dérives possibles. »
V.J : Donc l’ANDRH n’est pas réfractaire à l’IA ?
« Non ! Notre rôle à nous, c’est d’accompagner les RH face à cette évolution, d’accompagner la mise en place de l’IA et d’anticiper les évolutions des différents métiers. »
V.J : Et les gardes-fous ?
« On en revient très classiquement au RGPD (et aux problématiques relatives aux données personnelles et à la fuite de données), et à un travail de coopération entre les RH, la DSI et la DJ. »
Enjeu n°2 - Parlons maintenant QVCT, comment l’améliorer ?
A.R : « Quand on parle de QVCT, c’est le sujet du télétravail qui me vient en premier en tête. Nous sommes arrivés à échéance des accords passés à l’époque du Covid, on est dans une phase de renégociation de ces accords. Il y a un réajustement actuel au niveau du nombre de jours de télétravail : 2 jours de télétravail par semaine fait consensus. Pour nous, c’était une recommandation de l’ANDRH depuis le départ. Si on revient à la QVCT, l’idée est de mettre un point d’attention sur le lien au travail, la sociabilisation, la collaboration, le lieu du travail, l’aménagement, etc.
Enfin, j’attire l’attention sur deux points :
la majorité des métiers en France ne sont pas « télétravaillables » : il ne faut pas oublier que beaucoup de salariés ne sont pas concernés.
les solutions aux problématiques soulevées par le télétravail se trouvent dans les accords avec nos partenaires sociaux : c’est au plus près de l’entreprise qu’on trouve les meilleures solutions et les meilleures propositions de politique sociale.
L’autre point qui me semble important, c’est celui de la santé mentale (Grande cause nationale du Gouvernement en 2025). Il faut savoir que les arrêts de travail relatifs à la santé mentale ont pris une proportion très importante. Mais c’est quoi, la santé mentale ? L’ANDRH a proposé des actions (webinaires, podcast, articles etc.) pour que le collectif monte en compétences sur ces sujets, se forme, comprenne.
Maintenant, les équipes savent davantage de quoi on parle, elles sont censées être en capacité de détecter des signaux auprès des collègues.
En tant que RH, il faut également être capable de savoir jusqu’à quel niveau d’aide aller, et identifier quand cela relève de la Médecine du travail. »
Enjeu n°3 - L’égalité hommes femmes : quelles améliorations attendre ?
A.R : « Je constate que l’index de l’égalité a porté ses fruits, l’évolution va dans le bon sens. Certes, ça ne répond pas à tout mais cela crée une dynamique, une attention particulière. »
V.J : Quel complément appelleriez-vous de vos voeux ?
A.R : « Toutes les actions qui seront menées autour de ce sujet-là. Et une tolérance 0 pour toute forme de violence, à commencer par le sexisme ordinaire en entreprise.
Si on compare avec 10 ans en arrière, on voit que cela a bougé, et que ça continue de bouger, donc oui je suis optimiste ! Et là aussi, j’insiste sur l’importance des accords d’entreprise en la matière. »
Enjeu n°4 - La pratique des enquêtes internes et leur législation.
A.R : « Je pense que finalement laisser la possibilité aux entreprises de s’organiser comme elles le souhaitent, sans que ça soit trop structuré, c’est intéressant. Cela permet une adaptation au contexte particulier d’une entreprise, d’un secteur, d’un territoire, d’une problématique économique etc.
En revanche, il faut partager les bonnes pratiques, et ce type de partage est très apprécié par nos adhérents. Il y a une différence de maturité entre les entreprises qui ont déjà mené une enquête interne et celles qui doivent pour la première fois se lancer sur le sujet. »
Enjeu n°5 - La RSE.
A.R : « Il y a plusieurs volets dans la RSE et notamment le volet social, les RH sont particulièrement impliquées, en enclenchant des actions sur la diversité, l’inclusion, l’intergénérationnel : cela dépend de l’entreprise. De nouveau, il faut accorder une grande importance au dialogue avec les parties prenantes, au dialogue avec les partenaires sociaux, etc.
En ce moment, le sujet CSRD [1] nous occupe beaucoup. Cela demande de nombreux reportings et donc une charge de travail importante (et nous attendons d’ailleurs actuellement une simplification des process de la part de l’Europe sur cette directive). Et quid de ce temps qui pourrait être focalisé sur des actions plutôt que sur du reporting… »
V.J : Pour conclure : RH et DJ, le lien est indispensable ?
A.R : « Oui, il est essentiel dans notre métier. C’est une partie du métier, c’est une des briques.
Notre collaboration est une des clefs pour que notre travail soit qualitatif. Et je trouve qu’on en parle pas assez (on parle plus souvent du lien avec la finance) pourtant ce lien est capital, et encore plus dans les entreprises cotées (au vu des obligations qui pèsent sur elles). »