1. La jurisprudence antérieure.
Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu’il formule sur ses capacités à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise [1].
Les textes précisent que l’emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.
La portée de l’obligation de reclassement pesant sur l’employeur est source d’incertitudes et de nombreux litiges.
En effet, pour la Cour de cassation, l’employeur doit proposer au salarié tous les postes conformes à l’avis d’inaptitude et disponibles à titre de reclassement.
A titre d’exemple, une Cour d’appel, ayant constaté que l’employeur n’avait pas proposé au salarié un poste compatible avec les préconisations du médecin du travail, préférant procéder à un recrutement externe, a pu en déduire que l’impossibilité de reclasser le salarié n’était pas justifiée [2].
Par ailleurs, la jurisprudence considère que le refus d’un poste de reclassement par le salarié n’exonère pas l’employeur de son obligation de reclassement, s’il est établi que d’autres postes sont disponibles.
Dans un tel cas, il appartient à l’employeur de tirer les conséquences du refus du salarié, soit en formulant de nouvelles propositions de reclassement, soit en procédant au licenciement de l’intéressé aux motifs de l’inaptitude et de l’impossibilité du reclassement [3].
Cette jurisprudence est difficile à mettre en œuvre pour l’employeur car il doit épuiser toutes les solutions de reclassement.
2. La clarification légale et jurisprudentielle.
Depuis la loi « Travail » n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues par le Code du travail, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail [4].
Dans son arrêt du 26 janvier 2022, la Cour de cassation juge que cette présomption ne joue
« que si l’employeur a proposé au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail ».
En l’espèce, un ouvrier est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, le 1er août 2017, puis licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 14 décembre 2017, après avoir refusé trois offres de reclassement.
Contestant son licenciement, le salarié obtient gain de cause devant la Cour d’appel qui relève qu’un poste de conducteur d’engins était disponible à proximité, que le salarié avait demandé à être reclassé sur un tel poste qu’il avait occupé auparavant et qu’il maîtrisait, et que l’employeur ne justifiait d’aucune évaluation de ce poste avec le médecin du travail.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé à l’encontre de l’arrêt.
Deux enseignements peuvent être tirés de cette décision importante :
L’employeur est réputé avoir rempli son obligation de reclassement s’il propose au salarié inapte un autre emploi approprié à ses capacités et conforme aux préconisations du médecin du travail ;
Cette présomption doit être écartée si les juges caractérisent que l’employeur n’a pas exécuté loyalement son obligation de reclassement.
En conclusion, seul un poste peut être proposé au salarié mais encore faut-il que ce poste corresponde à une vraie solution de reclassement.