Le 28 novembre 2017, le Tribunal administratif annulait les arrêtés préfectoraux fixant les plafonds de loyer applicables à Paris depuis le 1er août 2015, y entraînant ainsi immédiatement l’annulation de l’encadrement des loyers.
L’article 140 de la loi du 23 novembre 2018, dite Loi ELAN ramenait donc le sujet évoqué par la loi ALUR quelques années plus tôt.
Cet article prévoit qu’à titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de sa publication, la commune de Paris et les établissements publics territoriaux de la métropole du Grand Paris (entre autres) peuvent demander qu’un dispositif d’encadrement des loyers soit mis en place.
Pour faire simple et (extrêmement) synthétique, cet article nous donne les règles du jeu de cette expérimentation à l’issue de laquelle le gouvernement devra rendre un rapport :
Le loyer de base est fixé librement entre les parties lors de la conclusion du contrat de bail, dans la limite du loyer de référence majoré. Un complément de loyer peut être appliqué si le logement mis en location remplit les critères et le locataire a la possibilité de le contester. L’appréciation souveraine des juges du fond va donc sans doute donner lieu à une jurisprudence intéressante sur ces critères.
Le préfet fixe chaque année par arrêté des loyers de référence. Le loyer ne pourra alors excéder le loyer de référence, majoré de 20 %. Lorsque le bailleur ne respecte pas ces règles pour la fixation du loyer du logement, le préfet peut prononcer à son encontre une amende après mise en demeure.
Le contrat de bail doit préciser le loyer de référence et le loyer de référence majoré correspondant à la catégorie de logements. En l’absence de cette mention, le locataire peut saisir dans un délai de 3 mois à compter d’une mise en demeure la juridiction compétente pour minorer son loyer.
Une action en diminution de loyer peut être engagée :
• si le loyer de base prévu dans le contrat de bail est supérieur au loyer de référence majoré en vigueur à la date de signature de ce contrat.
• si le montant du loyer fixé au contrat de bail, hors montant du complément de loyer le cas échéant, est supérieur au loyer de référence majoré lors du renouvellement du contrat.
Une action en réévaluation de loyer peut être engagée lors du renouvellement du bail dès lors que le loyer est inférieur au loyer de référence minoré ;
Depuis novembre donc, nous nous interrogions sur les sanctions du non respect de cette disposition par le Bailleur et sur les modalités d’application.
Notre curiosité est désormais assouvie puisque le Décret n° 2019-437 du 13 mai 2019 relatif aux modalités d’application de la mise en demeure en cas de non-respect du dispositif expérimental d’encadrement du niveau des loyers et au recouvrement des amendes administratives dans le cadre des rapports locatifs, est paru au Journal Officiel.
Il est d’application immédiate.
Ainsi dans l’hypothèse d’un Bailleur ayant fixé un loyer supérieur, le Préfet adressera une mise en demeure :
indiquant le manquement constaté, et la nécessité pour le bailleur de mettre en conformité le contrat de location
le cas échéant, demandant de rembourser les loyers trop-perçus dans un délai de deux mois à compter de la mise en demeure,
et précisant le montant maximal de la sanction encourue si la mise en demeure reste infructueuse.
Le bailleur disposera d’un délai de deux mois pour faire, s’il le souhaite, ses observations.
Dans les délais qui lui sont impartis, le bailleur devra ensuite transmettre au préfet une copie du contrat mis en conformité ainsi que, le cas échéant, les éléments permettant de justifier le remboursement des loyers trop-perçus.
Lorsque la mise en demeure reste infructueuse, le préfet informe le bailleur de son intention de prononcer, à son encontre, une amende (dont le montant ne peut excéder 5.000 € pour une personne physique et 15.000 € pour une personne morale). Le montant de l’amende sera proportionnel à la gravité du manquement constaté.
Le Bailleur disposera à nouveau d’un délai de deux mois pour faire ses observations. Passé ce délai, le préfet pourra émettre un titre de perception dans un délai de deux ans à compter de la mise en demeure. Le titre de perception sera recouvré par le Trésor public comme en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine.
En conséquence, les Bailleurs récalcitrants risquent une double peine puisque l’amende n’exclut pas l’action du locataire en diminution de loyer et remboursement des loyers trop-perçus.
Les administrateurs de biens des zones concernées et notamment de PARIS devront donc être vigilants pour ne pas engager leur responsabilité surtout en cas de renouvellement de bail.
Il ne nous restera plus qu’à attendre la réaction des bailleurs qui risquent de ne plus mettre leur bien en location au regard des trop nombreuses contraintes financières, réglementaires, et fiscales et du statut protégé du locataire, même défaillant, dont l’expulsion est le parcours du combattant !