Même si les définitions du droit à un procès équitable émanent de différentes sources qu’elles soient doctrinale, jurisprudentielle ou conventionnelle, leur contenu est quasiment identique. Le droit à un procès équitable est « reconstruit » en trois volets. Au volet central des garanties procédurales (indépendance et impartialité du tribunal, égalité des armes, publicité, délai raisonnable), sont ajoutés deux droits matériels, le droit d’accès à un tribunal, et le droit à l’exécution des décisions de justice.
« Le procès équitable forme le droit naturel de la procédure » enseigne Jean Carbonnier (Droit civil introduction, Paris, 21ème éd. PUF 1992, p.361). C’est dire toute l’importance que revêt le procès équitable, et il serait naïf de croire qu’il suffit au législateur béninois de doter le pays d’un code de procédure au service du droit substantiel, pour équilibrer la balance de la Justice dans une société en perte de repères. Il faut encore que le texte de loi satisfasse aux exigences du droit à un procès équitable.
A cet égard, une étude sommaire des garanties du droit à un procès équitable dans le code béninois de procédure civile, commerciale, sociale et administrative, accrédite l’idée du renforcement du droit d’accès à un tribunal. Ainsi, l’accès au juge est devenu plus lisible et plus aisé par rapport à la législation antérieure. Par exemple, le législateur innove en consacrant la requête comme principal mode d’introduction de l’instance, à côté de l’assignation (article 116). Le nouveau Code de procédure a par ailleurs modifié le régime de nullité des actes de procédure : nullité pour vice de forme et nullité pour vice de fond en lieu et place de nullité relative et nullité absolue (articles 191, 196). On pourrait multiplier les exemples.
L’indépendance institutionnelle du juge relève du principe de la séparation des pouvoirs enraciné dans la Constitution du 11 décembre 1990, et semble tellement acquise que le législateur du Code n’a imposé que l’impartialité à l’égard des parties, à travers une série de situations dans lesquelles le juge est présumé être dépendant de l’une des parties (article 421). Ainsi, la récusation du juge, le renvoi de l’affaire d’une juridiction à une autre pour suspicion légitime (art. 436), sûreté publique (art. 445) se révèlent comme des garanties d’impartialité.
L’analyse du nouveau code de procédure à l’aune du droit à un recours effectif, fait ressortir des améliorations par rapport au code de procédure en vigueur, avec la consolidation des droits de la défense et l’accroissement des garanties procédurales. Le législateur béninois a notamment consacré dès l’entame du texte les principes directeurs du procès (articles 2 à 18), et rénové les voies de recours à l’exemple du délai d’appel qui est ramené de deux mois à un mois (art. 617 du Code), l’abandon de la requête civile au profit du recours en révision (art. 666), etc. Même si le délai raisonnable n’est pas expressément visé par le Code, les rédacteurs du Code ont en revanche reconduit l’exigence de publicité des débats et du jugement (art. 500).
Enfin, une prise en compte effective du droit à un jugement exécutoire transparaît dans la promotion qu’en fait le code de procédure de 2008, à travers l’amélioration de l’efficacité du jugement et le réaménagement de l’exécution provisoire (articles 592 à 602). Aux termes des dispositions de l’article 579 du Code, le nouveau juge de l’exécution a une compétence exclusive pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires, des incidents d’exécution et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée des jugements et arrêts.
À l’épreuve du droit à un procès équitable, les efforts du législateur béninois sont louables et contribueront sans doute à améliorer le sort des plaideurs, une fois le nouveau Code de procédure promulgué. Et pour que les règles ainsi posées ne deviennent lettres mortes, c’est à la jurisprudence qu’il reviendra de peaufiner l’œuvre entamée et de combler les failles constatées.
Julien Hounkpe
Juriste