Un demi-siècle de prime de service.

Par Marie Cochereau, Avocate.

5869 lectures 1re Parution: 6 commentaires 4.92  /5

Explorer : # prime de service # fonction publique hospitalière # conditions d'attribution # modalités de calcul

La prime de service a fêté, cette année, ses 50 ans. Désormais étape annuelle incontournable de la rémunération des personnels non médicaux de la fonction publique hospitalière, la prime de service a été mise en place à travers l’arrêté ministériel du 24 mars 1967 relatif aux conditions d’attribution de primes de service au profit des personnels hospitaliers. Ce dispositif a ensuite été complété par les circulaires parues aux bulletin officiel du ministère de la santé n°362 du 24 mai 1967 et n°436 du 16 novembre 1967 ainsi que par des réponses ministérielles pour son interprétation.

-

La prime de service a été créée pour le personnel non médical (sauf quelques exceptions) afin de prendre en compte la charge de travail et les sujétions particulières par un système incitatif. Plus simplement, la prime de service peut s’analyser comme une récompense offerte aux agents en contrepartie de la charge de travail qu’ils supportent et des spécificités que revêtent leurs tâches. Ce dispositif vise donc à sanctionner l’absentéisme des uns et à récompenser la qualité et la constance du travail des autres.

La prime de service se distingue tant par son champ d’application et ses conditions d’attribution que par ses modalités de calcul.

Le champ d’application de la prime de service

Les personnes habilitées à recevoir la prime de service sont les agents titulaires et stagiaires non médicaux de la fonction publique hospitalière de toutes les filières : administrative, ouvrière, technique, socio-éducative et enseignante.

S’agissant des agents contractuels, des agents employés à titre temporaire et des agents vacataires, la question s’est, un temps, posée. En effet, plusieurs Cour administratives d’appel avaient estimé que la prime de service ne pouvait par principe leur être refusée (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 24 avril 2003, Mme Hortala, req. n°00BX00051 ; Cour administrative d’appel de Nantes, 27 juin 2008, req. n°07NT01742 ; Cour administrative d’appel de Paris, 20 novembre 2007, Centre hospitalier de Montereau, req. n°06PA03376 ; Cour administrative d’appel de Paris, 29 janvier 2008, req. n°06PA03596). Toutefois, c’est en sens contraire qu’a statué le Conseil d’État exposant que les agents contractuels ne peuvent prétendre au versement de cette prime (Conseil d’État, 23 mars 2009, CH de Montereau, req. n°312446).

Les personnels médicaux ne peuvent en principe prétendre au versement de la prime de service. Toutefois, il est admis que les praticiens des hôpitaux psychiatriques, sanatoriums et aériums ainsi que les praticiens des services antituberculeux puissent bénéficier de la prime.

Autres exceptions notables, les agents non-titulaires reconnus personnels handicapés, ainsi que les agents des services hospitaliers (ASH) sont susceptibles de bénéficier de la prime de service.

La prime de service est accordée aux bénéficiaires ci-dessus à la condition qu’ils exercent leur activité auprès soit :
- d’un établissement public de santé ;
- d’un hospice public ;
- d’une maison de retraite publique ;
- d’un établissement public pour mineurs ou adultes handicapés ou inadaptés ;
- d’un établissement public relevant des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance.

Le juge administratif a eu l’occasion d’expliquer que le bénéfice des primes de service instituées par l’arrêté interministériel du 24 mars 1967 est lié à l’exercice effectif des fonctions dans l’un des établissements précités, et ne pouvait dès lors, être accordé à un fonctionnaire hospitalier mis à disposition des services de l’État à temps plein (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 8 septembre 2015, req. n°13BX02289)

Les conditions d’attribution de la prime de service

La prime est facultative, de sorte qu’il appartient au directeur du service hospitalier de proposer au comité technique d’établissement de l’appliquer au sein de l’hôpital.

Ensuite, la prime de service est attribuée à l’ensemble des agents titulaires et stagiaires de la fonction publique hospitalière dont la note administrative est comprise entre 12,5/25 et 25/25 (article 3 de l’arrêté du 24 mars 1967 relatif aux conditions d’attribution de primes de service aux personnels de certains établissements énumérés à l’article 2 de la loi du 9 janvier 1986).

Par ailleurs, pour percevoir la prime de service, il convient d’avoir exercé, au moins a minima, son activité durant l’année en cours, de sorte qu’un agent absent pendant une année entière, même pour maladie imputable au service, n’a pas droit à la prime au titre de cette année.

En outre, les agents travaillant en mi-temps thérapeutique conservent le bénéfice de la totalité de leur traitement et sont bénéficiaires de l’intégralité des primes et indemnités auxquelles ils peuvent prétendre, de sorte qu’ils demeurent bénéficiaires de la prime de service.

Les modalités de calcul de la prime de service

Le montant total de la prime de service au sein d’un établissement est reversé aux bénéficiaires chaque année selon des critères de répartition définis par l’administration hospitalière. Ce montant ne peut dépasser, pour chaque établissement, 7,5% du total des traitements bruts accordés aux personnels de l’établissement au cours de l’année concernée.

Aux termes de la jurisprudence administrative, l’autorité investie du pouvoir de nomination, le directeur de l’établissement, fixe les conditions dans lesquelles le montant de la prime varie proportionnellement aux notes obtenues (Cour administrative d’appel de Bordeaux 15 mai 2003, Jocelyn Boyer, req. n°00BX02215).

L’article R. 6144-40 du Code de la santé publique prévoit que le Comité Technique d’Établissement (CTE) est obligatoirement consulté, après qu’ait été recueilli l’avis du comité technique paritaire, et fixe les critères individuels de modulation de la prime de service et donc les barèmes par notes.

Le montant total de la prime dans chaque établissement et pour chaque agent pris individuellement est limité à 17 % du traitement brut versé à l’agent au 31 décembre de l’année concernée par le versement de la prime.

S’agissant de son montant individuel, versé à chaque agent, la prime de service se voit appliquer un abattement de 1/140e de son montant total pour chaque jour d’absence de l’agent concerné.
A ce titre, il a été jugé qu’un agent qui n’était pas absent, mais qui n’avait pas effectivement exercé ses fonctions en raison d’une suspension à titre conservatoire, ne pouvait percevoir de prime de service pour la période correspondante (Cour administrative d’appel de Douai, 5 juin 2014, req. n°13DA00053).

Toutefois, ne sont pas déduits du montant individuel de la prime de service les journées d’absence imputables à (article 3 de l’arrêté du 24 mars 1967) :
- un accident de travail ;
- un congé annuel ;
- une maladie professionnelle ;
- un congé maternité ;
- un déplacement dans l’intérêt du service.

En outre, une absence inférieure à une demi-journée ne doit pas être décomptée.

En revanche, le juge administratif a pris le soin de préciser que lorsqu’un agent était absent pour cause de maladie autre que professionnelle, le décompte des abattements à opérer sur la prime de service au titre d’une année s’élève à autant de cent-quarantièmes qu’il y a de journées comprises du premier jour inclus au dernier jour inclus où cette absence a été constatée, sans qu’il y ait lieu d’exclure de ces abattements les jours de repos et les jours fériés (Conseil d’État, 27 avril 2007, req. n°287582).

Plus concrètement le montant de la prime de service peut être obtenu par le calcul suivant :
traitement annuel x (note /25) x (140-(jours d’absence)/140) = nombre de points.

La prime peut donc varier de 1 à 17 % du montant des traitements perçus par un agent sur l’année concernée en fonction (article 3 de l’arrêté du 24 mars 1967 relatif aux conditions d’attribution de primes de service aux personnels de certains établissements énumérés à l’article 2 de la loi du 9 janvier 1986) :

  • de ses jours d’absence ;
  • de la manière de servir de l’agent.

La prime de service est versée annuelle et en une seule fois, à terme échu. Elle n’est pas soumise à retenue pour pension (article 5 de l’arrêté du 24 mars 1967).

En raison du système des abattements, demeure parfois, après versement aux agents de leur prime de service, un certain reliquat. La question s’est ainsi posée de savoir comment devait être utilisée cette somme, et le cas échéant, comment devait-elle être répartie. Le juge administratif a estimé que le reliquat de prime de service dégagé par les abattements devait être redistribué, et que sa répartition obéissait également aux règles posées par l’arrêté du 24 mars 1967 (Cour administrative d’appel de Nantes, 30 mai 2003, CH de Chartres, req. n°00NT01966 ; Cour administrative d’appel de Nancy, 18 novembre 2004 CH de Remiremont, req. n°00NC00769)

Par ailleurs, la prime de service se trouve soumise, comme tous les régimes indemnitaires, aux cotisations et contributions habituelles, à savoir :

  • Cotisation au régime additionnel de la fonction publique (RAFP) : 5% dans la limite de 20% du montant du salaire de base ;
  • Contribution exceptionnelle de solidarité : 1% dans la limite de 12 680€ ;
  • Contribution sociale généralisée (CGS) : 7,50% sur 98,25% du brut imposable dans la limite de 12 458,10€ ;
  • Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) : 0,50% sur 98,25% du brut imposable dans la limite de 12 458,10€.

Elle est également soumise à l’imposition sur le revenu.

Enfin, la prime de service figure au nombre de préjudices patrimoniaux indemnisables pour un agent. En effet, dans une affaire portée devant la Cour administrative d’appel de Nancy, un agent de la fonction publique hospitalière sollicitait d’une commune l’indemnisation des préjudices qu’il estimait avoir subi consécutivement à une chute sur la chaussée, causée par un défaut d’entretien normal de celle-ci, et ayant entrainé un arrêt de travail conséquent. Le juge administratif a estimé que la prime de service devait être prise en compte dans la détermination du montant de l’indemnité due à l’agent par la collectivité, constatant que, sans ces arrêts de travail, l’agent avait une chance sérieuse de bénéficier de la prime de service (Cour administrative d’appel de Nancy, 24 septembre 2015, req. n°14NC00708)

Avocate associée
Droit de la fonction publique
www.officioavocats.com

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

40 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • Bonjour,

    Je travail depuis 8 ans à l’hopital,
    Je suis en cdi évolutif depuis 2 ans et je suis en formation pour valider mon diplôme ( une fois le diplôme validée je serai fonctionnaire)
    Est-il possible de demander la prime de service ?

    Merci pour votre réponse

    • par Jacques , Le 4 mai 2022 à 01:48

      Bonjour,
      Ancien titulaire de la fonction publique hospitalière, le percepteur a, contre le choix de mon employeur public, bloqué le versement de ma prime de service 2021 calculée sur 7 mois de présence effective, invoquant que le fait d’être parti en retraite le 1er août 2021 ne répondaient pas à l’interprétation qu’il faisait du "service annuel complet" cité à l’article 2 de l’arrêté ministériel du 24 mars 1967.
      A ma connaissance (45 ans de services) tous les établissements pratiquent la proratisation.
      Existe-t-il une jurisprudence par rapport à ce refus ?
      En vous remerciant pour l’éclairage que vous pourrez m’apporter.

  • Bonjour, ce n est pas un commentaire mais une précision qui m intéresse . Peut on comprendre qu’ en arrêt pour maladie professionnelle on a droit à la 2ème répartition.? Merci pour votre réponse.

  • par lydie , Le 17 février 2020 à 11:38

    bonjour
    suite à un accident de travail , j ai repris mon activité à temps partiel thérapeutique (AT)
    ma prime a donc été calculée sur la base du temps partiel sans tenir compte de l accident du travail
    , or si j étais restée en arret AT ma prime aurait été versée dans son intégralité , cette prime est sensée récompenser le présentéisme , je ne comprends pas pourquoi , elle a été versée au prorata de la présence puisque le traitement de base du salaire est maintenu
    merci de mon répondre
    cordialement

  • par Philippe corneloup chef de produit marketing RH , Le 18 octobre 2019 à 23:13

    Ce type de temps partiel est une modalité d’organisation du temps de travail permettant à un fonctionnaire de continuer à exercer une activité professionnelle malgré une incapacité temporaire et partielle du fait de son état de santé. Ce type d’aménagement se distingue du droit commun au niveau de ses conditions d’octroi et de renouvellement ainsi qu‘en ce qui concerne ses modalités de rémunération. Suite à la publication, le 15 mai 2018, d’une circulaire décrivant la procédure de mise en œuvre et de fonctionnement du temps partiel thérapeutique, la Fédération Hospitalière de France (FHF) a demandé des éclaircissements à la Direction Générale de l’Offre de Soins (DGOS) au sujet des primes et des indemnités auxquelles auraient droit les salariés concernés.

    La réponse de la DGOS est claire : la prime de service est bien soumise au prorata de la présence effective du fonctionnaire.

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27843 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs