Côté chantiers prioritaires que les avocats voudraient que le CNB mène, le premier concerne à 16% la défense du "périmètre du droit". Cette expression renvoie notamment aux articles 4 et 54 de la Loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, qui définissent le périmètre d’action réservé aux avocats. Lutter contre la "captation par certains professionnels de l’activité juridique et judiciaire des avocats" selon les termes de la Commission de l’Exercice du droit du CNB [1], voici donc le chantier n° 1 à mettre en œuvre.
En seconde place (et on ne s’étonne pas qu’elle soit sur le podium !) : les impacts de l’Intelligence Artificielle sur la profession. Le CNB a entamé un travail à ce titre avec la publication en 2024 d’un guide pratique de l’IA générative [2] qui n’est sans doute que le premier pas de l’accompagnement de la profession en la matière.
Enfin, 3ᵉ place du podium (13%), un tout autre sujet bien plus ancien que celui de l’IA : la revalorisation de la rétribution de l’aide juridictionnelle.
À noter :
L’enquête complète publiée se lit pour la France (graphique ci-dessous), ainsi que par barreaux, classés par seuils :
20 barreaux de plus de 500 avocats, représentant 58 735 avocats
59 barreaux entre 100 et 500 avocats, représentant 13 118 avocats
87 barreaux de moins de 100 avocats, représentant 4 729 avocats
Or si ce podium est le même quelle que soit la taille du barreau, "l’ordre du tiercé", lui, change en fonction de cette taille. Par exemple, les barreaux entre 100 et 500 avocats (soit environ 13 000 Avocats) placent la question de l’AJ en 2ᵉ position.
Tout en bas du classement des chantiers prioritaires, on trouve, de façon assez surprenante, tant ce sont des sujets mis en avant par l’actualité et qui reflètent des préoccupations sociétales : l’égalité et la diversité au sein de la profession (6%), le rôle social de l’avocat (5%) et le développement de l’amiable (4%). Cela ne signifie pas cependant qu’ils n’en font pas une priorité, ils estiment peut-être que ces sujets sont déjà pris en main... ?
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Passons aux "menaces" qui pèseraient sur l’exercice professionnel. Les répondants se sont livrés ici à des réponses dites ouvertes, que le CNB à traiter selon la méthode TF-IDF définie au début de la synthèse. Cette technique "mesure l’importance des mots en tenant compte de leur fréquence dans un document et de leur rareté dans l’ensemble des textes, identifiant ainsi les termes les plus pertinents. TF-IDF quantifie l’importance des mots. Les signaux forts correspondent aux termes ayant les scores les plus élevés, indiquant des priorités majeures. Les signaux faibles ont des scores plus bas, reflétant des préoccupations moins fréquentes mais potentiellement émergentes."
Sont classés parmi les signaux forts : la paupérisation de la profession, l’Intelligence Artificielle et automatisation, et les charges sociales et financières. Les réponses relatives aux chantiers prioritaires sont donc cohérentes.
Côté signaux faibles, le CNB met en avant la concurrence entre professions (est-ce le moment de se repencher sur le développement de l’interprofessionnalité pour éviter cette concurrence ?) et la lutte contre le "dumping tarifaire", certains avocats se sentant en concurrence au niveau des honoraires (notamment du fait du grand nombre de nouveaux avocats chaque année) et devant réduire leurs tarifs pour rester compétitifs.
En 2025, les avocats ne semblent (toujours) pas sereins quant à l’avenir de leur profession... des craintes qui expliquent sans doute un autre chiffre : en 2024, ils étaient 23% à envisager de quitter la profession [3]...
Une conclusion en demi-teinte pour le CNB, qui peut se réjouir (ou non) d’avoir encore des combats à mener, pour améliorer le taux de ceux qui se sentent représentés par lui, 36% seulement selon les résultats de cette "grande consultation" [4].