Compte Epargne-Temps : Mode d’emploi.

Par Emmanuelle Destaillats, Avocat.

40473 lectures 1re Parution: 20 commentaires 4.92  /5

Le dispositif du compte épargne-temps (CET) peut être mis en place dans toutes les entreprises, de manière facultative. Il permet au salarié d’accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d’une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congés ou de repos non prises ou des sommes qu’il y a affectées [1]. Ce dispositif profite également à l’employeur en ce qu’il permet d’optimiser la gestion prévisionnelle du temps de travail. Modalités de mise en place, alimentation, utilisation du CET, sort en cas de rupture du contrat de travail : voici le mode d’emploi de ce dispositif.

-

Mettre en place le CET.

Le compte épargne-temps est institué par accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut par une convention ou un accord de branche [2].

Il ne s’agit que d’une simple faculté et non pas d’une négociation obligatoire.

En cas d’existence d’un accord de branche et d’un accord d’entreprise, c’est ce dernier qui prévaut, même s’il est moins favorable pour les salariés.

La conclusion d’un accord collectif est indispensable à la mise en place du CET.

Ce dispositif ne peut être instauré par simple décision unilatérale de l’employeur.

Que doit contenir l’accord collectif ?

L’accord collectif détermine [3] :
- les conditions et limites dans lesquelles le compte épargne-temps peut être alimenté en temps ou en argent à l’initiative du salarié, ou, pour les heures accomplies au-delà de la durée collective, à l’initiative de l’employeur ;
- les modalités de gestion du CET ;
- les conditions d’utilisation  ;
- les conditions de liquidation, de transfert des droits d’un employeur à un autre ;
- le dispositif d’assurance ou de garantie des droits acquis.

L’accord collectif fixe également le champ d’application de l’accord (salariés concernés), ainsi que sa durée, déterminée ou non.

Alimenter le CET.

Les partenaires sociaux ont toute latitude pour fixer les conditions et limites d’alimentation du compte épargne-temps dans la convention ou l’accord collectif instituant le dispositif, sous réserve du respect des principes d’ordre public [4].

Le CET peut être alimenté, à l’initiative du salarié ou de l’employeur :
- En temps
- En argent

Alimentation en temps.

À l’initiative du salarié.

Dans les conditions et limites fixées par l’accord collectif, les salariés peuvent (ce n’est qu’une faculté) alimenter leur CET avec :
- des heures de repos acquises au titre des heures supplémentaires (repos compensateur de remplacement ou de la contrepartie obligatoire en repos) ;
- des jours de repos et de congés accordés au titre de l’aménagement du temps de travail (jours de RTT) ;
- des jours de repos accordés au titre du forfait annuel en jours ou heures ;
- des jours de congés payés annuels au-delà de 24 jours ouvrables, correspondant à la cinquième semaine de congés payés et au-delà le cas échéant [5] ;
- des jours de congés supplémentaires pour fractionnement ;
- des jours de congés conventionnels (congés d’ancienneté par exemple).

En revanche, ne peuvent être affectés sur le CET les repos relavant du droit à la santé et à la sécurité des salariés tels que les temps de repos quotidien et hebdomadaire ou encore les contreparties en repos au travail de nuit.

À l’initiative de l’employeur.

L’employeur peut, dans les conditions et limites fixées par l’accord collectif, affecter sur le CET les heures effectuées par les salariés au-delà de la durée collective de travail c’est-à-dire les heures supplémentaires assorties de leur majoration.

Alimentation en argent.

À l’initiative du salarié.

L’accord collectif peut prévoir la possibilité pour le salarié d’affecter sur le compte épargne-temps des éléments monétaires tels que :
- les majorations au titre des heures supplémentaires ou complémentaires  ;
- des primes et indemnités conventionnelles (13ème mois, prime de vacances etc)
- des sommes perçues au titre de l’intéressement, de la participation ou d’un plan d’épargne.

À l’initiative de l’employeur.

L’accord collectif peut prévoir l’abondement par l’entreprise des droits affectés sur le CET du salarié.

Il s’agit là de droits supplémentaires accordés par l’employeur et non pas des sommes dues au salarié, notamment au titre de sa rémunération.

Utiliser le CET.

Le CET peut être utilisé par chaque salarié sur la base du volontariat.

L’employeur ne peut imposer ni l’ouverture, ni l’alimentation, ni l’utilisation du CET.

Le compte épargne-temps permet au salarié :
- d’accumuler des droits à congé rémunéré ;
- de bénéficier d’une rémunération, immédiate ou différée [6].

Le salarié peut aussi utiliser les droits affectés sur son CET pour :
- compléter sa rémunération.

Attention toutefois : les jours acquis au titre de la cinquième semaine de congés payés, épargnés sur un CET, ne peuvent être utilisés que sous forme de congés, et pas sous forme de complément de rémunération. La monétisation des droits versés sur le CET n’est autorisée que pour les droits correspondant aux jours de congés excédant la durée de trente jours [7]. Cette disposition est d’ordre public.
- cesser, de manière progressive, son activité (C. trav., art. L. 3151-3, al. 1)
- passer à temps partiel ;
- financer des jours de repos ou de congés (congé parental d’éducation, congé pour création ou reprise d’entreprise, congé sabbatique, congé sans solde, etc.)
- alimenter un plan d’épargne salariale ;
- financer un complément de retraite ou racheter des annuités manquantes [8].
- donner des jours de repos non pris à des collègues aidants ou dont l’enfant est gravement malade  [9]. Le congé annuel ne peut être cédé que pour sa durée excédant 24 jours ouvrables.

Sous réserve de ces dispositions d’ordre public, les partenaires sociaux ont toute liberté pour définir dans l’accord collectif les modalités et conditions d’utilisation de ce dispositif d’épargne.

L’accord collectif doit définir les conditions d’utilisation des droits stockés sur le CET dans ces hypothèses et notamment la fixation de formalités spécifiques, d’une date limite d’utilisation du CET, du mode de calcul de la monétisation des droits affectés et/ou l’existence de délais de prévenance.

Lorsque l’employeur a affecté sur le compte épargne-temps les heures effectuées au-delà de la durée collective du travail, la convention ou l’accord collectif ayant institué le CET précise les conditions d’utilisation de ces droits, à l’initiative de l’employeur (par exemple : aménagement du temps de travail afin d’adapter le travail des salariés aux fluctuations d’activité).

La garantie des droits inscrits dans le CET.

Les droits acquis dans le cadre d’un CET sont assurés contre le risque de non-paiement en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’entreprise.

Cette garantie s’effectue par le biais de l’AGS (Association de garantie des salaires) dans la limite de six fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d’assurance chômage [10], soit 79 464 € en 2018.

Si le salarié a acquis des droits supérieurs à ce plafond, l’accord collectif ayant institué le CET doit prévoir un dispositif un positif d’assurance ou de garantie financière pour couvrir les droits acquis au-delà de ce montant.

En l’absence d’un tel accord, le salarié perçoit une indemnité correspondant à la conversion monétaire de ses droits affectés au CET (C. trav., art. L. 3153-1 et D. 3154-1).

Rupture du contrat de travail et CET.

La convention ou l’accord collectif déterminent les conditions de liquidation et de transfert des droits d’un employeur à l’autre  [11].

À défaut de disposition conventionnelle prévoyant le transfert des droits d’un employeur à l’autre, le salarié peut [12] :
- soit percevoir, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l’ensemble des droits acquis dans le cadre du CET à la date de la rupture
- soit demander, en accord avec l’employeur, la consignation de l’ensemble des droits qu’il a acquis convertis en unités monétaires auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Le déblocage des droits consignés se fait au profit du salarié ou de ses ayants droit.

Les sommes ainsi consignées peuvent être débloquées, à la demande du salarié, par le paiement, à tout moment, de tout ou partie des sommes consignées, ou par leur transfert sur le CET, le PEE, le plan d’épargne interentreprises (PEI) ou le Perco mis en place par son nouvel employeur, dans les conditions prévues par l’accord collectif mettant en place le CET ou par les règlements des plans d’épargne salariale [13].

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 2 mars 2021 à 06:22
    par Damien , Le 21 août 2020 à 13:55

    Bonjour j’ai lu beaucoup de chose sur le cet etc, la seul question que je me pose et donc la réponse que je ne trouve pas c’est le délais de réponse pour l’employeur suite a une demande de monétisation, en effet demande a été faite pour 4 jour a être monetisé le 13/05/2020 et a ce jour le 21/08/2020 toujours pas de réponse malgres des entretiens avec les personnes gérant tout ça qui m’ont répondu on s’en occupé voilà plus d’un mois , cordialement

    • par herve , Le 2 mars 2021 à 06:22

      bonjour je me permet de vous contacte j ai une question je mes suis inscris dans une boite intérim et a l inscription il mon demande si je voulais ouvrir un compte CET jai bien refuser et je n ai pas remplie celle partie la et malgré sa il me lon ouvert quand même je voudrais savoir si il son le droit de d ouvrir ce compte sans mon autorisation

  • par boschat , Le 10 décembre 2020 à 19:06

    Bonjour,
    En raison de dépassements horaires chroniques sur mon poste depuis 11 ans maintenant, j’ai sollicité à deux reprises (2017 et 2019), par courrier avec AR adressé à la direction et la présidente de l’association dans laquelle je travaille (convention collective BAD 2010), la mise en place du dispositif CET. A ce jour (fin 2020), je n’ai eu aucun retour par courrier de ma direction ni de la présidente. Ce n’est que fortuitement , au cours d’une réunion , que la présidente m’informe, oralement, que "ce n’est pas possible" sans plus d’explication. L’employeur peut-il refuser d’instaurer le dispositif CET, et ce même si le salarié motive sa demande ?
    Quelles sont les obligations de l’employeur vis à vis du salarié, dans le cas où le CET n’a pas obligation à mettre mis en place ?
    En cas d’illégalité dans la procédure, l’inspecteur du travail a t’il compétence à poser des recommandations, voire des sanctions ?
    Pour info, l’association compte 49 salariés, les DP n’ont bénéficié d’aucune formation lié à leur fonction et ne sont donc pas ressource, il n’y a pas non plus de représentants syndicaux.
    Merci pour vos réponses.

  • par elisemarie17 , Le 21 octobre 2020 à 18:20

    Bonjour

    Merci pour votre article, une question sur laquelle je ne trouve pas de réponse, un salarié de l’entreprise a ouvert un compte epargne temps qu’il pensait utiliser pour partir plus tôt à la retraite, cependant, il a eu un accident de travail et va être licencié pour inaptitude, il lui reste environ 3 ans à travailler, il a placé sur son CET un peu plus d’un an de travail ( uniquement en temps, soit heures supplémentaires, RTT et congés payés. )
    S’il avait utilisé son compte épargne temps comme prévu, il aurait bénéficié des primes et gardé ses droits sociaux et aurait également cotisé et validé des trimestres de retraite ( environ 5 trimestres vu le temps économisé )
    Dans ce cas, il va être perdant car si l’entreprise lui règle ses heures, va t-elle prendre en compte les primes normalement acquises ? qu’en est il pour ses trimestres de retraite car s’il part en début d’année la caisse de retraite ne lui validera pas 4 trimestres sur l’année donc il est perdant, et dans son état il va avoir du mal à trouver un autre travail.
    Est ce qu’en consignant son compte auprès de la caisse des dépôts et consignation ( ou autre ) comment cela va t-il se passer pour cotisations retraite ?
    Je vous remercie

  • par Bruno , Le 9 juin 2020 à 09:11

    Bonjour, Je suis licencié avec un préavis de 6 mois à compter du 27 mai. Puis-je demander à récupérer la totalité de mes RTT en argent (159 jours) durant mon préavis ? et si non est-ce que le fait de le percevoir à la fin de mon préavis fera reculer d’autant la date de perception de mes ARE ? Dans le cas inverse, pourrais-je pouvoir prétendre à percevoir celle-ci au-delà du délai de carence de 7 jours incompressible ? Merci

  • par Post-public , Le 12 juillet 2019 à 10:57

    Et les devoirs de l’employeur afférents au droit d’être informé de l’état du compte ????

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 155 800 membres, 27093 articles, 127 135 messages sur les forums, 2 580 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Faux pas à éviter, bons conseils à suivre : votre check-list pour rédiger une bonne offre d'emploi juridique.

• Votez pour le Prix de l'Article juridique de l'année !




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs