1. Un contexte complexe : la location saisonnière non déclarée.
Dans cette affaire, Une propriétaire, usufruitière d’un appartement au 5ᵉ étage d’un immeuble, louait ce bien quelques semaines par an à des touristes pour compléter ses revenus de retraite. La ville de Paris, informée par des voisins, a engagé une procédure, estimant qu’il s’agissait d’un changement d’usage non autorisé en violation des articles L631-7 et L651-2 du Code de la construction et de l’habitation. En effet, à Paris comme à Marseille, la mise en location d’un bien à des fins de location saisonnière (via des plateformes comme Airbnb) constitue un changement d’usage, qui nécessite une autorisation préalable de la mairie.
Analyse du risque pour les propriétaires.
Cet exemple montre combien il est facile, pour un propriétaire, de mal interpréter la réglementation complexe entourant les locations de courte durée. La propriétaire, retraitée de 75 ans, avait agi en bonne foi, pensant qu’elle n’avait pas besoin d’autorisation particulière, puisque l’appartement constituait à ses yeux une extension de sa résidence principale située au 2ᵉ étage. Cependant, la ville de Paris a poursuivi pour changement d’usage illicite, soulignant que même une location limitée dans le temps peut être considérée comme une violation des règles d’usage si les formalités n’ont pas été respectées.
2. L’enjeu de la preuve : l’affectation à usage d’habitation au 1ᵉʳ janvier 1970.
Un point clé de cette affaire résidait dans la question de l’affectation du bien au 1ᵉʳ janvier 1970. Selon l’article L.631-7 du Code de la construction et de l’habitation, les locaux qui étaient déjà affectés à un usage d’habitation à cette date ne peuvent être transformés en usage commercial (ou en tout autre usage) sans autorisation préalable. La ville de Paris devait ainsi prouver que le bien était à usage d’habitation à cette date pour justifier sa demande de sanction contre la propriétaire.
Dans ce dossier, la ville n’a pas été en mesure de rapporter cette preuve de manière suffisante. Elle se basait sur des documents postérieurs à 1970, notamment une fiche H2 remplie en 1971, qui ne faisait que confirmer la situation à la date de sa souscription et non au 1ᵉʳ janvier 1970. La Cour d’appel a donc estimé que la ville n’avait pas prouvé l’usage d’habitation à la date requise, déboutant ainsi les demandes principales de la municipalité.
Enseignement pour les propriétaires à Marseille.
Cet argument sur la charge de la preuve est essentiel pour tout propriétaire se trouvant dans une situation similaire. Si une commune (comme Marseille) intente une action en raison d’un prétendu changement d’usage sans autorisation, il incombe à la municipalité de démontrer que le bien était effectivement à usage d’habitation à la date charnière (généralement le 1ᵉʳ janvier 1970). Ce point de droit peut être décisif pour obtenir gain de cause et éviter des sanctions lourdes.
3. Une condamnation modérée malgré une infraction partielle.
Bien que la ville de Paris ait été déboutée des principales demandes concernant le changement d’usage, la propriétaire a tout de même été condamnée à une amende civile de 1 500 euros pour ne pas avoir respecté les dispositions du Code du tourisme, en omettant de déclarer son logement en tant que location saisonnière. Cette amende reste relativement modeste comparée aux 50 000 euros réclamés initialement par la ville de Paris, un montant qui aurait pu être prononcé si l’usage d’habitation avait été prouvé au 1ᵉʳ janvier 1970 et le changement d’usage jugé illicite.
Réflexion pour les propriétaires.
Cette partie du jugement souligne qu’une infraction peut découler non seulement d’un changement d’usage illicite, mais aussi du non-respect des formalités relatives à la location saisonnière. À Marseille, les propriétaires souhaitant mettre leur bien en location de courte durée doivent veiller à se conformer aux obligations de déclaration auprès de la mairie, sous peine de sanctions, même si aucun changement d’usage n’est requis. Une vigilance particulière est donc de mise, tant sur le plan du Code de la construction que du Code du tourisme.
4. La bonne foi et la réduction des sanctions.
Un autre aspect déterminant de cette affaire fut la prise en compte de la bonne foi de la propriétaire. La propriétaire, âgée et peu familiarisée avec la complexité de la législation applicable à Paris, a pu obtenir une réduction substantielle de l’amende envisagée grâce à son âge, sa situation financière modeste et l’absence d’intention frauduleuse. Elle avait loué l’appartement du 5ᵉ étage seulement 289 jours sur trois ans, ce qui démontre qu’elle respectait en grande partie les règles des 120 jours autorisés par an pour une résidence principale, avec une légère erreur de calcul en 2018.
Recommandation pour les propriétaires.
La bonne foi et la transparence peuvent jouer en faveur des propriétaires en cas de litige. Il est essentiel de conserver des traces détaillées des locations, des déclarations fiscales et des échanges avec les plateformes de location. Une défense bien argumentée, mettant en avant l’absence d’intention frauduleuse, peut permettre de réduire considérablement les sanctions en cas de contentieux.
Conclusion : protégez-vous contre les risques du changement d’usage.
L’affaire examinée souligne l’importance cruciale d’une bonne compréhension de la réglementation locale avant d’envisager une modification de l’usage d’un bien immobilier. Que ce soit à Paris, Marseille ou toute autre grande ville, les risques encourus en cas de manquement peuvent être importants, tant en termes d’amendes que d’obligations de remettre le bien dans son état initial.
Il est recommandé de consulter un spécialiste avant de procéder à tout changement d’usage ou de mettre un bien en location saisonnière.