Le bouclier tarifaire s’applique-t-il aux parties communes des copropriétés ?

Par Eric Audineau, Avocat et Alexandre Balossi, Juriste.

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Explorer : # bouclier tarifaire # parties communes # copropriétés # aide financière

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Le bouclier tarifaire s'applique désormais également aux parties communes des copropriétés, en plus des parties privatives. Cela est confirmé par une lecture croisée d'un décret récent et de la loi sur la copropriété.
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Le sujet du bouclier tarifaire, aussi technique soit-il, resurgi à l’aune de l’augmentation de 10% de l’électricité, conformément à l’article 92 de la loi de finances du 29 décembre 2023 pour 2024. Notre équipe a donc souhaité vous apporter un éclairage sur un point juridique complexe qui répond à une question, pourtant, simple : un syndic peut-il prétendre au bénéfice du bouclier tarifaire « électricité » pour un contrat de chauffage des parties communes (1), y compris si ce contrat de fourniture est distinct de celui des lots privatifs (2) ?

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1) L’applicabilité du bouclier tarifaire aux parties communes.

A titre liminaire, il convient de rappeler que la version initiale du texte ne prévoyait pas cette faculté. En effet, seules les parties privatives étaient concernées par cette aide financière récupérée par le syndic et tenu de le restituer au syndicat des copropriétaires.

Néanmoins, depuis le décret n° 2022-1763 du 30 décembre 2022 relatif à l’augmentation du prix de l’électricité au sein de l’habitat collectif résidentiel, le gouvernement a fait le choix d’élargir le champ d’application du bouclier tarifaire, en y intégrant les parties communes.

Toutefois, cette nouveauté textuelle - en dépit de son importance pratique - n’apparaît pas clairement et procède d’une lecture croisée du décret, fondée sur trois éléments d’analyse :

En premier lieu, l’article 1er du décret prévoit que le bouclier tarifaire 2023 (du 1er janvier au 31 décembre 2023) tend à s’appliquer :

« 1° Dans un immeuble à usage total ou partiel d’habitation soumis au statut de la copropriété défini par la loi du 10 juillet 1965 susvisée (…) ».

Or, il est communément admis que dans l’hypothèse où le législateur vise une loi, sans préciser la disposition spécifique, c’est le régime de droit commun de la loi qui tend à s’appliquer, savoir pour la loi du 10 juillet 1965, le chapitre 1 [1].

Or, l’alinéa 2 de l’article 1er de la loi précitée prévoit qu’un

« lot de copropriété comporte obligatoirement une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables ».

Ainsi, conformément à ce principe d’indissociabilité d’un lot privatif et de sa quote-part de parties communes, il ne fait nul doute que le bouclier est aussi applicable pour les consommations en électricité au sein des espaces communs.

En deuxième lieu, et afin de corroborer cette solution, le décret du 30 décembre 2022 prévoit dans son annexe que, dans le cadre de son attestation sur l’honneur, le syndic est tenu d’intégrer une mention obligatoire en vertu de laquelle ce dernier :

« atteste sur l’honneur que le bâtiment dont je suis (…) gestionnaire est affecté à .....% à usage d’habitation (parties communes et parties privatives) / des espaces de logement et d’hébergement des personnes physiques au sein des établissements et lieux dont je suis gestionnaire [2] » [3].

Ainsi, le gestionnaire de l’immeuble est tenu de justifier, par lot, la partie privative et la quote-part associée de parties communes (afin de pouvoir également faire appliquer le bouclier sur ces espaces communs).

En dernier lieu, et surtout, cette mention indiquée dans l’annexe renvoi à l’article 10 dudit décret.

Ce dernier dispose que :

« Pour l’application des articles 3, 4, 5 et 7 qui constituent les modalités de calcul de l’aide, est prise en compte la consommation d’électricité à usage collectif et individuel des espaces de logement et d’hébergement des personnes physiques au sein des établissements et lieux relevant des gestionnaires mentionnés au I ».

Concrètement, cette disposition prévoit que l’aide bénéficie aux espaces de consommation collective (parties communes) et individuelle (parties privatives). Elle confirme donc la solution en indiquant que les lieux relevant des gestionnaires sont également pris en compte. Or, la gestion des parties communes incombe au syndic qui a pour charge « l’administration des parties communes » [4].

2) Les distinctions juridiques en cas de contrat de fourniture différent de celui alimentant les lots privatifs.

Dans le cas où l’immeuble dispose d’un second contrat de fourniture pour les parties communes, indépendamment du système de chauffe pour les lots privatifs, il convient d’interpréter le texte dans le prolongement du raisonnement exposé au premier point.

D’une part, l’article 1 du décret prévoit que l’aide est accordée pour « un contrat collectif de fourniture d’électricité » [5].

Or, dans la mesure où le syndic a conclu un contrat au profit du syndicat des copropriétaires pour chauffer les parties communes, il ne fait aucun doute que le contrat de fourniture est réputé juridiquement « collectif ». Dès lors, ce dernier entre dans la catégorie des conventions éligibles à ladite aide.

De surcroît, l’article 10 dudit décret précise qu’est pris en compte la consommation individuelle et collective incluant, par voie de conséquence, les espaces relevant des syndics, savoir les parties communes.

D’autre part, concernant les tarifs réglementés, si le contrat concerne seulement une fourniture d’électricité en vue de l’éclairage des parties communes (sans chauffage), le calcul sera, sur le fondement de l’article 3 du décret précité, assujetti aux tarifs réglementés. Toutefois, les tarifs réglementés constituent des variables du calcul qui pourront réduire l’aide, mais ne rendront pas nécessairement la copropriété non éligible.

En revanche, si le contrat d’électricité vise aussi à chauffer les parties communes, il pourra être qualifié de « contrat collectif d’approvisionnement en chaleur » [6]. Le cas échéant, les articles 4 et 5 pourront être applicables. En clair, ces derniers posent des règles de calcul plus favorables qui ne dépendent pas des tarifs réglementés, ce qui conduira à augmenter l’aide financière.

En définitive - et faute de précisions textuelles et jurisprudentielles en la matière - il conviendra de se rapporter à l’appréciation du fournisseur et de l’Agence de services et de paiement, chargée d’assurer la délivrance de cet appui financier.

Pour conclure, nous vous recommandons d’annexer, lors du dépôt du dossier, les factures du second contrat de fourniture d’électricité concernant les parties communes afin que le calcul de l’aide prenne en compte la consommation générale de l’immeuble (parties communes et privatives).

Eric Audineau, Avocat
Alexandre Balossi, Juriste
Cabinet Audineau & Associés
audineau.fr

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[1Art. 1 à 16-2.

[2Article 10 du décret n° 2022-1764 du 30 décembre 2022 précité.

[3Point 2 de l’annexe.

[4Art. 14, loi 1965 : qui est d’ailleurs visé dans le décret du 30 décembre 2022.

[5Art 1, II, 1°.

[6Art 1, II, 2°.

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